Tu as déjà vendu le sang de ton père

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L’ancien Premier ministre libanais, Saad Hariri, a récemment déclenché une vive polémique suite à un tweet que beaucoup ont interprété comme un soutien implicite au Hezbollah. Ce message, publié dans un contexte de tension entre Israël et le Hezbollah, a suscité une large réaction en ligne, avec plus d’un million de vues et des milliers de commentaires. Le texte d’Hariri, fils de l’ancien Premier ministre Rafic Hariri assassiné en 2005, soulignait la nécessité d’une « solidarité nationale » et louait les habitants du Sud-Liban, de la Bekaa et de Dahya, des régions connues pour être des bastions du Hezbollah.

Ce message a provoqué des réactions contrastées. D’un côté, certains ont salué la posture de Hariri, y voyant une volonté de transcender les clivages politiques et de privilégier l’unité nationale en ces temps de crise. Les partisans du Hezbollah ont été parmi les premiers à exprimer leur soutien, citant des figures religieuses comme Musa Sader, qui prônaient la coexistence face aux menaces extérieures. Pour eux, Hariri faisait preuve de patriotisme en appelant à la cohésion au-delà des divisions sectaires.

Cependant, une autre partie de l’opinion, notamment les opposants au Hezbollah, a vivement critiqué cette prise de position, la percevant comme un acte de trahison envers la mémoire de Rafic Hariri. Ce dernier a été assassiné en 2005, et un tribunal international a par la suite identifié un membre du Hezbollah, Salim Ayyash, comme responsable du meurtre. Ce lien direct avec l’assassinat de son père a rendu la sortie de Saad Hariri d’autant plus incompréhensible pour une partie de ses soutiens. Ils l’accusent de vouloir réhabiliter ceux qu’ils tiennent responsables de la tragédie familiale.

Le tweet d’Hariri a suscité une vague de commentaires acerbes. Certains internautes se sont dits outrés par ce qu’ils considèrent comme un appel à soutenir ceux qu’ils tiennent pour responsables de la mort de Rafic Hariri. Des propos acerbes ont fleuri sur les réseaux sociaux, notamment du côté des utilisateurs venant des pays du Golfe. « Comment peut-on soutenir ceux qui ont assassiné ton père ? », s’indignait un internaute. D’autres ont été encore plus virulents, allant jusqu’à l’accuser d’avoir « vendu le sang de son père » et de se ranger du côté de ceux qui avaient célébré sa mort.

Des voix du Golfe, notamment en Arabie saoudite et au Koweït, se sont également jointes au concert des critiques. Les liens complexes entre Hariri et ces pays, en particulier l’Arabie saoudite, n’ont pas manqué d’être rappelés. En 2017, Hariri avait démissionné depuis Riyad, évoquant alors l’emprise de l’Iran et du Hezbollah sur le Liban, avant de revenir sur sa décision quelques jours plus tard. Pour beaucoup, cette démission avait été dictée par les autorités saoudiennes, ce qui avait déjà entaché sa crédibilité auprès de certains observateurs.

La position de Saad Hariri est d’autant plus délicate qu’il doit jongler avec un héritage politique lourd, celui de son père, tout en naviguant dans un paysage politique libanais marqué par des tensions sectaires et régionales. Son tweet a, en quelque sorte, réouvert des blessures encore vives au sein de la communauté sunnite du Liban, qui perçoit le Hezbollah non seulement comme une force militaire et politique dominante, mais aussi comme un acteur responsable de nombreuses violences, notamment l’assassinat de Rafic Hariri.

Il est indéniable que Hariri, en tant que leader sunnite, se trouve dans une position difficile. D’un côté, il est attendu qu’il se montre ferme face au Hezbollah, groupe accusé de son implication dans le meurtre de son père. D’un autre côté, le contexte libanais, avec ses équilibres précaires et la montée des tensions avec Israël, peut pousser à des appels à l’unité, même avec ceux que certains considèrent comme des adversaires politiques irréconciliables.

Ce tweet met en lumière les contradictions profondes au sein de la politique libanaise, où les alliances et les rivalités évoluent constamment en fonction des événements régionaux. Alors que le Liban fait face à une crise économique et politique sans précédent, la question de l’unité nationale devient cruciale pour éviter un effondrement total du pays. Dans ce contexte, les propos de Hariri peuvent être vus, par ses partisans, comme un effort pour rassembler un pays déchiré. Cependant, pour ses détracteurs, ils marquent un abandon des principes fondamentaux de justice et de responsabilité.

En conclusion, Saad Hariri a, volontairement ou non, ravivé des débats passionnés sur l’avenir du Liban et le rôle du Hezbollah dans la société libanaise. Alors que certains y voient un geste d’apaisement dans une période troublée, d’autres considèrent ce tweet comme une trahison envers la mémoire de son père et les idéaux qu’il a défendus. Il reste à voir comment cette polémique influencera la trajectoire politique de Saad Hariri dans un pays où les équilibres sont aussi fragiles que vitaux.

Jforum.fr

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