Sans exigence sur la question centrale, l’Iran continuera d’armer le Hezbollah au nord

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Sans exigence sur la question centrale : l’Iran continuera d’armer le Hezbollah au nord | Opinion

Un accord purement militaire, qui n’inclut pas de normalisation ou de changement profond au Liban, mènera à l’érosion des acquis de Tsahal et permettra à des acteurs comme l’Iran et le Hezbollah de continuer à opérer dans la région, sous le couvert d’un cessez-le-feu apparent.

Ma’ariv

Il semble que toutes les parties (y compris l’État d’Israël) souhaitent mettre fin aux efforts militaires au Liban et parvenir à une cessation des hostilités. En somme, un désir clair et légitime (même si nous n’avons pas semé les graines pour une réalité différente au Liban le jour d’après – un élément crucial à mon avis).

La question n’est pas « quoi » mais « comment » – comment allons-nous terminer les combats au nord, sachant que, comme le passé proche et lointain l’a prouvé (notamment le retrait du Liban en 2000), le « comment » a une immense importance.

Le narratif central est que le cessez-le-feu/l’accord est l’outil pour mettre fin aux combats. Qu’entend-on par accord ? Un document écrit, vraisemblablement signé par les États-Unis, Israël et le Liban (pas le Hezbollah, pour ceux qui se posaient la question), énonçant les règles à suivre le jour d’après au Liban.

Il ne s’agit pas d’accords de normalisation avec le Liban ni d’un document traitant du changement souhaité au Liban, qu’il faudrait définir et planifier pour l’avenir. C’est un document purement militaire, dont le contenu principal est l’absence du Hezbollah au sud du fleuve Litani et la liberté d’action de Tsahal en cas de violation de l’accord.

Je souhaite poser quelques questions critiques sur ce narratif :

La question principale – si Israël dispose déjà d’une liberté d’action totale au Liban, pourquoi faut-il un document écrit pour l’ancrer ?

Le document traite-t-il uniquement de l’aspect militaire, c’est-à-dire du retrait du Hezbollah au-delà du Litani et de la liberté d’action militaire d’Israël au Liban ? N’y a-t-il pas de lien entre l’aspect militaire et la dimension politique, structurelle, organisationnelle et économique d’une nouvelle réalité régionale au Liban ? Le Liban n’a-t-il pas des engagements politiques à prendre dans le cadre de l’accord ?

Étant donné qu’Israël et le Liban n’ont pas de différends fondamentaux, les États-Unis envisagent-ils d’utiliser les Accords d’Abraham comme levier pour inclure le Liban ? Le document d’accord trace-t-il une voie claire pour l’avenir ?

L’Iran est-il mentionné explicitement dans le document à signer ? Quelqu’un s’est-il demandé pourquoi l’Iran soutient cet accord ? Se pourrait-il que l’Iran, qui a déclaré aujourd’hui même que « Téhéran appelle à accepter le cessez-le-feu sur la base de la résolution 1701 et au retrait au-delà du Litani », continue de soutenir le Hezbollah et l’aide à se remettre des coups qu’il a subis ? Qu’en est-il des membres des Gardiens de la Révolution présents au Liban, ainsi qu’en Syrie (qui constitue la « route Philadelphie du nord » pour la reconstruction du Hezbollah) ? Y a-t-il une condition dans le document pour leur retrait de la région dans un délai court (un ultimatum) ?

Qu’est-ce qui est défini comme une violation de l’accord ? La reconstruction civile du sud du Liban est-elle autorisée ? Les membres du Hezbollah ne sont-ils pas aussi des citoyens libanais (beaucoup d’entre eux ont leur adresse enregistrée dans le sud du Liban) ? Par exemple, des conduites d’égouts introduites pour la reconstruction pourraient-elles ensuite être transformées en roquettes (ainsi que d’autres matériaux à double usage, comme cela a été fait dans la bande de Gaza) ?

Avons-nous bien compris pourquoi tous les accords précédents n’ont limité qu’Israël, et avons-nous une réponse à cela dans le document que nous souhaitons signer ?

Comprenons-nous que la sémantique est importante et que, lorsque l’Iran et le Liban qualifient l’accord de « cessez-le-feu », cela signifie qu’il n’y a pas de changement, et qu’à leurs yeux, ce n’est qu’une nouvelle manche de combat, car toute pause a une fin.

Je pense que se concentrer uniquement sur l’aspect militaire de l’accord, sans obliger le Liban à adopter une nouvelle réalité libanaise et en laissant une présence militaire iranienne au Liban et en Syrie, risque d’éroder considérablement les gains militaires obtenus au Liban.

Étant donné que le Liban est, à mon avis, un microcosme de l’ensemble du conflit (« la première guerre d’Iran »), ce qui s’y passera déterminera si nous parvenons à créer une nouvelle réalité régionale où « l’axe de la résistance chiite » cesse de fonctionner et où les Accords d’Abraham prennent sa place, du moins le long des frontières israéliennes.

Ainsi, je pense que la signature par Israël d’un accord de ce type ne changera rien à la situation actuelle, mais ne fera que limiter Israël à une sorte d’arbitrage international, tout en renforçant progressivement la « conception du calme » dans l’opinion publique, au point de réduire la liberté d’action de Tsahal (même si elle est définie comme complète) au Liban et en Syrie.

Une partie du changement de la réalité régionale passe par un message fort d’Israël aux États-Unis et aux acteurs régionaux, selon lequel Israël n’est plus disposé à signer un accord qui ne soit pas une normalisation. Ceux qui veulent « limiter » Israël et sa liberté d’action ne pourront le faire que dans le cadre d’une normalisation – c’est le changement majeur apporté par cette guerre.

De plus, signer un accord maintenant pourrait nuire à la nouvelle réalité d’après-guerre. Il est donc essentiel, avant de commettre cette erreur, de penser différemment et de faire preuve de courage : Israël peut s’engager auprès des États-Unis, mais en aucun cas signer un document écrit qui ne soit pas une normalisation, surtout s’il est qualifié par l’autre partie de « cessez-le-feu » et s’il ne concerne que l’aspect militaire, sans aborder la nouvelle réalité régionale rendue possible par les succès militaires impressionnants de Tsahal.

L’auteur est un ancien adjoint au chef de la section palestinienne de la branche de planification de Tsahal et ancien chef de la section nord du renseignement naval.

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