Quand la Fédération Internationale des Journalistes se réunit à… Ramallah !

0
369

Avec la bénédiction de l’Autorité palestinienne, la FIJ a tenu congrès trois jours durant et participé à une manifestation anti-israélienne. 

C’est un événement très discret dont presque aucun média français n’a rendu compte. Et pourtant, il éclaire d’un jour particulièrement intéressant les connexions susceptibles de se nouer entre les médias occidentaux et les officiels palestiniens.

Cet événement, c’est la réunion de la Fédération internationale des journalistes (FIJ) qui s’est tenue du 16 au 18 novembre 2018 à Ramallah, capitale de l’Autorité palestinienne.

Première organisation mondiale de la profession, la FIJ dit représenter en 2018 plus de 600.000 journalistes dans 146 pays du monde.

Ce congrès de Ramallah a eu peu d’écho en France, mais notre attention a été attirée par ce tweet d’Anthony Bellanger, le secrétaire général de la FIJ.

Quel était l’objet de cette grande réunion ?

Prendre la défense des journalistes palestiniens, bien sûr. Mais contre qui ?

Contre Israël, bien sûr.

Il semble que les critiques des congressistes contre l’Autorité palestinienne – qui muselle y compris par la violence toute voix dissidente dans la presse locale – ont été assez feutrées.

Il faut dire que la délégation des journalistes de la FIJ a été particulièrement bien reçue par ses hôtes palestiniens qu’il aurait été fâcheux de froisser.

Une visite guidée de Ramallah

Dès leur arrivée, nos congressistes ont eu droit à un peu de tourisme.

L’agence officielle Wafa y a consacré une dépêche en arabe et en français.

Au programme, rencontre avec les élus et visite du siège de la radio et télévision palestinienne.

Selon la dépêche, le président de la Fédération internationale des journalistes, Philippe Leruth, aurait à l’occasion de cette tournée dans Ramallah condamné « les violations israéliennes contre les journalistes palestiniens ».

La dépêche Wafa rapporte ensuite les propos du numéro 2 de la FIJ :

De son côté, le secrétaire général Anthony Bellanger a déclaré que la situation de la presse palestinienne était catastrophique à cause de l’occupation, qui a engendré le martyre, les blessures et l’arrestation d’un grand nombre d’entre eux…

Il faut bien sûr toujours prendre avec précaution ces propos rapportés par l’agence officielle palestinienne qui a peut-être tendance à forcer le trait dans un style bien à elle.

Ils n’ont en tout cas pas été démentis par Anthony Bellanger, ni sur son compte Twitter, ni ailleurs.

Qui est Anthony Bellanger ?

Anthony Bellanger est un journaliste français. Peu connu du grand public, il s’est essentiellement consacré à l’action syndicale.

Dirigeant du Syndicat national des journalistes (SNJ) – premier syndicat de la profession en France – de 2005 à 2014, il est aujourd’hui le numéro 2 de la Fédération internationale des journaliste, basée à Bruxelles.

Visite au potentat Mahmoud Abbas

La délégation des journalistes internationaux a été reçue comme il se doit par le président palestinien Mahmoud Abbas.

Une carte de presse offerte Premier ministre palestinien

Le point d’orgue de ces trois jours de congrès a été la venue du Premier ministre palestinien Rami Abdallah au congrès.

Comme dans toute visite officielle, il faut procéder à des échanges de cadeaux.

Le président de la FIJ, Philippe Leruth, a remis à Rami Abdallah une « carte de presse internationale », un document créé par la FIJ dont elle cherche à faire la promotion.

PHILIPPE LERUTH ET RAMI ABDALLAH

On aurait voulu montrer que les journalistes du monde entier et l‘Autorité palestinienne marchent la main dans la main, on ne s’y serait pas mieux pris.

Les territoires palestiniens, pourtant très mal classés en matière de liberté de la presse

Cette complaisance – pour ne pas dire cette connivence – de la Fédération internationale des journalistes à l’égard des dirigeants palestiniens qui la recevaient a tout de même de quoi surprendre.

La liberté de la presse, et plus globalement la liberté d’expression, sont des denrées rares dans les territoires palestiniens, qu’il s’agisse de la Cisjordanie ou de Gaza.

Ce n’est pas nous qui le disons.

Amnesty International (une organisation peu suspecte de sympathies excessives à l’égard d’Israël) a dressé un tableau très sombre de la situation.

Dans ce communiqué, l’organisation dénonce la « campagne de répression » lancée par les dirigeants palestiniens contre la « liberté d’expression ». De nombreux journalistes se sont retrouvés dans les prisons du Hamas et de celle de l’Autorité palestinienne pour avoir eu le tort de faire entendre une voix dissidente.

Reporters sans frontières (une organisation pourtant elle aussi très anti-israélienne) a inscrit la Palestine dans la queue du peloton, à la 134e place de son classement mondial de la liberté de la presse.

Le constat de RSF est lui aussi sans appel « Interpellations, arrestations sans charge, sites internet de médias d’opposition rendus inaccessibles… », tel est le lot quotidien des journalistes palestiniens.

Les congressistes organisent une manifestation anti-israélienne

Mais pour continuer à accuser Israël d’être le responsable des malheurs des journalistes palestiniens, nos congressistes internationaux ont organisé le 17 novembre une manifestation sur la voie publique en exhibant leurs carte de presse internationales.

(Nota bene : A Ramallah, on ne descend pas dans la rue sans l’assentiment des autorités locales.)

Puis ils ont décidé d’avancer ainsi en cortège jusqu’au check-point israélien de Qalandia qui, en vertu des accords d’Oslo,  commande l’accès à la zone C, contrôlée par Israël.

Leur objectif déclaré était tout simplement de forcer le passage et de pénétrer en zone israélienne en se prévalant de leur seule qualité de « journalistes internationaux ».

Cette petite cohorte a été stoppée dans son audacieuse progression par quelques tirs de quelques grenades lacrymogènes.

Les syndicats de journalistes affiliés à la FIJ condamnent les « violences israéliennes »

L’incident qui a résulté de cette petite provocation est dérisoire.

Mais la Fédération internationale des journalistes et ses relais syndicaux en France ont essayé de faire monter la mayonnaise, de manière toute aussi dérisoire.

Petite leçon de battage médiatique :

Dans les heures qui suivent la FIJ publie un communiqué, immédiatement repris par le Syndicat national des journalistes(SNJ), majoritaire chez les journalistes français.

Dominique Pradalié, secrétaire générale du Syndicat national des journalistes et ancienne déléguée du SNJ France Télévisions, où elle fût des années durant rédactrice en chef, faisait partie du voyage à Ramallah

Elle a consacré pas moins d’une dizaine de tweets à cette aventure dans lesquels elle affirme que les journalistes ont été « gazés violemment ».

Le syndicat CGT des journalistes n’a pas voulu être en reste et a publié lui aussi le communiqué de la FIJ…

Et la CFDT a emboîté le pas.

Conclusion

Cette ficelle de l’indignation syndicale est tellement grosse que pratiquement aucun media français n’a consacré une ligne au pseudo incident de Qalandia.

Même l’AFP, pour le coup, n’a pas diffusé la moindre dépêche sur l’assaut de la brigade des journalistes internationaux repoussé par trois grenades lacrymogènes.

Pour le reste, ce grotesque battage témoigne du parti-pris anti-israélien des trois principaux syndicats de journalistes français et du dévoiement de l’action syndicale à des fins de propagande.

Ah ! Nous allions oublier un détail important : la FIJ qui assure représenter 640.000 journalistes dans 146 pays a des bureau dans une quinzaine de pays arabo-musulmans (dont l’Irak, la Syrie, l’Iran, le Yemen, le Soudan…).

Mais aucune adresse en Israël. Son site internet, en tout cas, n’en indique pas. 

Aucun commentaire

Laisser un commentaire