Les Américains s’y sont opposés, l’Iran a insisté : « C’est un complot manifeste. Préserver la capacité de dissuasion est la première ligne de défense – il ne faut pas en négocier. »
Walla – Illustration : Naïm Qassem – Wikipedia
Vendredi dernier, le secrétaire général du Hezbollah, Naïm Qassem, a prononcé un discours dans lequel il a principalement répondu aux voix croissantes au Liban réclamant que le Hezbollah remette ses armes à l’État – de sorte que seule l’armée libanaise en soit détentrice. Qassem s’y est fermement opposé, déclarant : « Ceux qui pensent que nous sommes faibles au point de permettre à Israël d’entrer partout au Liban – cela n’arrivera pas. »
« Si quelqu’un pense que nous sommes faibles et que nous allons accepter ce qu’on nous dit, alors il se trompe lourdement. »
L’une des premières réactions est venue de Morgan Ortagus, ancienne porte-parole du Département d’État américain et envoyée spéciale de l’administration Trump pour le Moyen-Orient. Elle a partagé un post sur X relatant les propos de Qassem, et a simplement commenté d’un mot : « Bâillement ».
Par ailleurs, des sources américaines ont déclaré samedi soir à la chaîne libanaise Al-Jadeed que les déclarations belliqueuses de Qassem, et son refus de remettre les armes à l’État libanais, entravent la reconstruction du Liban et sapent les efforts internationaux visant à faire cesser les attaques israéliennes et à pousser vers un retrait israélien du Liban.
Le président libanais Joseph Aoun a également réagi, déclarant qu’il s’agit d’une question sensible qui doit être traitée de façon responsable et dans un dialogue apaisé avec le Hezbollah. Il a rappelé que la décision de confier uniquement les armes à l’armée libanaise a déjà été prise, affirmant : « Les Libanais ne peuvent pas supporter une guerre. Seules les forces armées du Liban doivent être responsables du port d’armes et de la défense de la souveraineté nationale. »
Dans son discours, Qassem a menacé d’une guerre civile entre l’armée libanaise et le Hezbollah si l’armée tentait de désarmer le mouvement par la force.
Des proches de la présidence libanaise ont déclaré qu’il n’a jamais été question d’un désarmement forcé du Hezbollah, mais plutôt d’un dialogue, que Qassem a lui-même affirmé être ouvert à entreprendre. Ils précisent que le ton dur employé dans son discours était destiné principalement à rassurer les partisans du Hezbollah, alors que l’organisation traverse une période difficile. Ils ont souligné positivement le fait que Qassem ne s’est pas opposé au dialogue avec le président, n’a pas attaqué l’armée libanaise, et s’est uniquement opposé à l’établissement d’un calendrier pour le désarmement.
Ces mêmes sources ont ajouté que ce discours s’inscrit dans le contexte des négociations en cours entre les États-Unis et l’Iran sur le programme nucléaire iranien, et que Qassem a adressé un message à Téhéran : « L’armement du Hezbollah ne vise pas uniquement Israël, mais toute entité alliée à Israël. Par conséquent, ces armes sont aussi un atout stratégique pour l’Iran, à exploiter dans les négociations sous pression américaine ».
En réaction, l’Iran, principal fournisseur d’armes du Hezbollah, a également répondu. L’ambassadeur d’Iran au Liban, Mojtaba Amani, a écrit sur X après le discours : « Le projet de désarmement est un complot évident. Tandis que les États-Unis continuent de fournir à l’entité sioniste les armements et missiles les plus sophistiqués, ils interdisent aux autres pays d’armer leur propre armée et les forcent à réduire ou détruire leur arsenal sous divers prétextes. Une fois ces pays désarmés, ils deviennent vulnérables aux attaques et à l’occupation – comme cela s’est produit en Irak, en Libye et en Syrie. »
Il a ajouté : « L’Iran est conscient du danger que représente ce complot pour la sécurité des peuples de la région et met en garde contre le piège tendu par les ennemis. Maintenir la capacité de dissuasion est la première ligne de défense de la souveraineté et de l’indépendance, et ne peut faire l’objet d’aucune négociation. »
Le Liban est à l’aube d’un dialogue crucial entre la présidence et le Hezbollah sur le désarmement de l’organisation. Si ce dialogue aboutit, il pourrait changer radicalement le visage du Liban et de toute la région. Une conséquence positive supplémentaire pourrait également se faire sentir en Israël, mais l’attention doit rester concentrée sur le cœur du problème : l’Iran.
Ainsi, les États-Unis devraient exercer une pression sur l’État libanais pour obtenir le désarmement du Hezbollah d’une manière qui forcerait l’Iran à faire des concessions dans les négociations nucléaires – plutôt que de le pousser à accélérer ses projets nucléaires en réponse à la perte d’un bras opérationnel majeur dans la région.