- Le traité de Lisbonne a donné naissance à un système politique autoritaire qui porte atteinte aux droits de l’homme et aux droits politiques.
- L’article 4 stipule notamment : « … Les États membres se mettent au service des objectifs de l’Union et s’abstiennent de toute mesure susceptible de compromettre la réalisation de ces objectifs. » En d’autres termes, les intérêts de l’Union sont supérieurs aux intérêts des États et des citoyens.
- Dans un système démocratique ou l’équilibre des pouvoirs est respecté, un gouvernement peut être contesté ou remplacé par l’opposition. Cette possibilité d’alternance manque à l’UE, le Traité de Lisbonne impose que les membres de la Commission européenne soient choisis en fonction de leur « engagement européen ». Concrètement, un dissident ne peut jamais intégrer la Commission. Comme l’Histoire l’a démontré à maintes reprises, l’absence d’opposition tue la liberté.
Le traité de Lisbonne fait passer les intérêts de l’Union européenne avant les intérêts des États et des citoyens. Jean-Claude Juncker, président de la Commission européenne, s’en est plaint en 2016 : « Trop de politiciens n’écoutent que leur opinion publique nationale. Et si vous n’écoutez qu’elle, vous ne contribuez pas à l’élaboration d’un sens européen commun … « (Photo de Dan Kitwood / Getty Images) |
Le traité de Lisbonne – rédigé en remplacement du traité constitutionnel de 2005 et signé en 2007 par les dirigeants des 27 États membres de l’Union européenne – se définit comme un accord pour « réformer le fonctionnement de l’Union européenne … [et il] intègre l’aide humanitaire comme une compétence spécifique de la Commission. »
Le traité de Lisbonne a abouti à créer un système politique autoritaire qui porte atteinte aux droits de l’homme et aux droits politiques.
Concernant le mandat de la Commission européenne (CE), par exemple, l’article 17du traité précise que :
« La Commission exerce ses responsabilités en pleine indépendance… Dans l’exercice de ses responsabilités, la Commission sera totalement indépendante … Les membres de la Commission ne sollicitent ni n’acceptent d’instructions d’aucun gouvernement, institution, organe ou organisme.
L’article 4 stipule également que :
« … Les États membres facilitent l’accomplissement par l’Union de sa mission et s’abstiennent de toute mesure susceptible de mettre en péril la réalisation des objectifs de l’Union. »
En d’autres termes, les intérêts de l’Union sont supérieurs aux intérêts des États et des citoyens. Ce n’est pas une simple spéculation. Le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, a déclaré ouvertement en 2016 :
« Trop de politiciens sont à l’écoute exclusive de leur opinion publique. Et si vous prêtez l’oreille à votre opinion publique nationale, vous ne développez pas un état d’esprit européen ni le sentiment qu’il est nécessaire d’agir en commun. Nous avons trop d’Européens à mi-temps. »
La même année, Emmanuel Macron – à l’époque ministre de l’Economie – a mis en garde, dans le magazine Time, contre le prochain référendum sur le Brexit au Royaume-Uni en déclarant :
« Si, soudainement, plusieurs pays se réveillent et disent : « Je veux le même statut que les Britanniques », il en résultera un démantèlement du reste de l’Europe. Nous ne devons pas permettre qu’un pays soit en position de détourner le reste de l’Europe parce qu’il a organisé un référendum. »
L’attitude de Macron est dictée par le traité de Lisbonne qui impose aux États membres de s’acquitter des tâches définies par la Commission européenne.
Le traité de Lisbonne utilise 36 fois le terme « responsabilité ». Mais le mot ne vise la Commission qu’une seule fois pour lui faire obligation– « en tant qu’institution, d’être responsable devant le Parlement européen ». Les 35 autres usages de « responsabilité » énumèrent les obligations des États membres.
Dans un système démocratique sain ou l’équilibre des pouvoirs est respecté, une équipe dirigeante peut être contestée ou remplacée par son opposition. Cette possibilité d’alternance est ce qui manque à l’UE, le Traité de Lisbonne imposant que les membres de la Commission européenne soient choisis sur la base de leur « engagement européen ». Cela signifie en réalité qu’aucun dissident ne peut jamais devenir membre de la Commission – ce qui rappelle étrangement le communisme. L’article 4 de la Constitution tchécoslovaque de 1960 par exemple, précisait :
« La force dirigeante au sein de la société et dans l’État est l’avant-garde de la classe ouvrière, le Parti communiste de Tchécoslovaquie, une union de combat volontaire des citoyens les plus actifs et les mieux informés issus des rangs des travailleurs, des paysans et de l’intelligentsia. »
La Constitution nord-coréenne institue dans son article 11 une directive similaire :
« La République populaire démocratique de Corée conduira toutes ses activités sous la direction du Parti des travailleurs de Corée. »
Comme l’histoire l’a démontré à maintes reprises, quand l’opposition est absente, c’est la liberté qui disparaît.
Dans son livre de 1840, De la démocratie en Amérique, le célèbre diplomate et historien français Alexis de Tocqueville écrivait :
Je pense donc que l’espèce d’oppression dont les peuples démocratiques sont menacés ne ressemblera à rien de ce qui l’a précédée dans le monde ; … je vois une foule innombrable d’hommes semblables et égaux qui tournent sans repos sur eux-mêmes pour se procurer de petits et vulgaires plaisirs, dont ils emplissent leur âme. Chacun d’eux, retiré à l’écart, est comme étranger à la destinée de tous les autres : ses enfants et ses amis particuliers forment pour lui toute l’espèce humaine ; quant au demeurant de ses concitoyens, il est à côté d’eux, mais il ne les voit pas ; il les touche et ne les sent point ; il n’existe qu’en lui-même et pour lui seul, et s’il lui reste encore une famille, on peut dire du moins qu’il n’a plus de patrie….
Après avoir pris ainsi tour à tour dans ses puissantes mains chaque individu, et l’avoir pétri à sa guise, le souverain étend ses bras sur la société tout entière ; il en couvre la surface d’un réseau de petites règles compliquées, minutieuses et uniformes, à travers lesquelles les esprits les plus originaux et les âmes les plus vigoureuses ne sauraient se faire jour pour dépasser la foule ; il ne brise pas les volontés, mais il les amollit, les plie et les dirige ; il force rarement d’agir, mais il s’oppose sans cesse à ce qu’on agisse ; il ne détruit point, il empêche de naître ; il ne tyrannise point, il gêne, il comprime, il énerve, il éteint, il hébète, et il réduit enfin chaque nation à n’être plus qu’un troupeau d’animaux timides et industrieux, dont le gouvernement est le berger. »
La description de Tocqueville date d’il y a presque deux siècles, mais elle s’applique – de manière effrayante – à l’Europe d’aujourd’hui.
Jiří Payne est un Tchèque conservateur, membre du Parlement européen et du groupe Europe de la liberté et de la démocratie directe. Il a été membre de la Chambre des députés de la République tchèque (1993-2002) et cofondateur et coprésident des Amis de la Judée et de la Samarie au Parlement européen. Il est co-auteur de It Can Work Differently: Searching for an Alternative Arrangement of the Continent (2018) et Stolen Europe (2015).