Le président de la République y-est-il allé pour sécuriser l’approvisionnement en gaz de la France pour parer à l’embargo russe en direction de l’Europe ?
Nenni. L’Algérie n’a pas la possibilité d’augmenter ses exportations de gaz sauf à investir dans de lourdes et coûteuses infrastructures. Si excédent à rafler il y avait, c’est l’Italie qui en a profité. En mai dernier, l’Algérie a passé un contrat qui prévoit d’augmenter les exportations de gaz en direction de l’Italie de 21 à 30 milliards de mètres cubes.
Qu’on se le dise, les relations italo-algériennes sont ce que devraient être les relations algéro-françaises : coopération, tapes dans le dos et investissement à tous les niveaux. Plus de 200 entreprises italiennes travaillent en Algérie.
Macron est-il allé en Algérie pour inciter ce pays à récupérer ses délinquants ?
Pas vraiment non plus. Le président français a préféré parler d’ « immigration choisie » et de projets d’ « incubateurs high tech » franco-algériens. Macron a aussi évoqué la création de « studios de cinéma » pour favoriser la créativité de la jeunesse algérienne. Ah oui, également, une commission d’historiens sera chargée d’élaborer l’histoire de la colonisation à partir des archives de l’un et l’autre pays.
« Presidency of the Republic »
Qu’apporte l’Algérie en échange ?
À peu près rien. Sinon quelques insultes et camouflets. Le pupitre à partir duquel Macron s’est exprimé à Alger portait l’inscription « Presidency of the Republic ». Le français était banni. Tebboune qui parle parfaitement notre langue s’est exprimé en arabe, se gardant bien d’utiliser le moindre mot de la langue de Voltaire.
Ces mauvais traitements marchent puisque Macron en redemande. L’Algérie a d’ores et déjà obligé la France à renoncer à ses relations avec le Maroc pour ne pas désobliger l’Algérie sur la question du Sahara Occidental, un litige qui oppose les deux pays du Maghreb. L’Algérie a aussi obligé la France à exclure le Grand rabbin de France, Haïm Korsia, de la délégation officielle. Korsia a été publiquement insulté par les Frères Musulmans algériens qui ont jugé sa présence indésirable.
Une soudaine contamination au Covid a opportunément offert au grand rabbin l’occasion de s’exfiltrer « de lui-même » du cortège officiel.
Emmanuel Macron sait très bien que l’Algérie joue sans vergogne de la « rente mémorielle » et de la culpabilité de la France liée à la colonisation. Il sait qu’entre 1954 et 1962, le FLN a été aussi abject que certains tortionnaires de l’armée française, multipliant tortures, assassinats et disparitions. Macron est parfaitement informé aussi que, plus tard, pendant la guerre civile qui a ravagé l’Algérie, l’armée algérienne a allégrement torturé et assassiné les islamistes qui eux aussi ont torturé et massacré la population algérienne.
« Loi de concorde nationale »
Aujourd’hui, après 200 000 morts, l’Algérie a amnistié les terroristes islamistes dont les mains dégoulinent du sang de milliers d’innocents mais le pouvoir feint de se mettre en colère à l’idée que la France pourrait être « pardonnée » en raison de la colonisation. La « loi de concorde nationale » en Algérie a réintégré les islamistes assassins et les terroristes dans le giron national, mais le « crime » des soldats français demeure lui, en apparence du moins, inexpiable.
Face à cette mascarade de relation bilatérale fondée sur une haine réelle du pouvoir militaire algérien envers la France, que veut réellement Macron ? À quoi bon ce déplacement qui n’est lié à aucun grand contrat ni à aucune grande annonce de coopération bilatérale ? Même Xavier Driencourt, ancien ambassadeur de France en Algérie avoue dans l’Express sa perplexité.
L’explication, la seule possible, tient dans le narcissisme de Macron
Ce président qui n’a fait qu’affronter des crises sans en avoir jamais résolu une seule meurt d’envie de laisser une signature indélébile dans l’Histoire. Il veut que son nom brille en lettres de feu au fronton de la Nation française. Ce désir narcissique, le président l’a exprimé en janvier 2020, dans l’avion qui le ramenait de Jérusalem.
À trois journalistes, Emmanuel Macron a confié qu’il existait un défi mémoriel entre l’Algérie et la France et qu’il souhaitait prendre une initiative qui ait « à peu près le même statut que la Shoah pour Chirac en 1995 ».
Oui, vous avez bien lu : « Le même statut que la Shoah pour Chirac en 1995 ». Le parallèle Auschwitz-Algérie esquissé à l’époque laissait clairement entendre qu’un peuple (français) avait abusé mortellement d’un autre (le peuple algérien)… commettant tout au long d’un siècle de colonisation, « un crime contre l’humanité ».
C’est ce sillon mortifère qu’Emmanuel Macron creuse en solitaire depuis quelques années, dans l’espoir qu’enfin le monde entier lui sera reconnaissant d’avoir mis le genou en terre devant le « crime » (monstrueux, forcément monstrueux) des Français en Algérie.
Cette escroquerie mémorielle qui consiste à tracer une équivalence entre l’extermination des Juifs et la colonisation aurait pu aboutir si les Algériens avaient été plus intelligents. Au lieu de rabrouer Macron sans cesse, au lieu de tirer à boulets rouges sur la la France, ils auraient été plus avisés de sourire à Macron et de l’inviter à expier en Algérie. Au lieu de lui dérouler le tapis rouge et de le convier solennellement à inaugurer un monument au crime inexpiable de la France en Algérie, ils jouent les gamins colériques. Au point qu’à la fin, même Macron s’en est agacé.
Résultat, les contribuables français ont financé un voyage présidentiel pour rien. Mais cet argent gaspillé est riche d’un bénéfice impalpable : les Français ne se verront pas charger d’un crime contre l’humanité qu’ils n’ont pas commis pour la gloriole d’un pantin présidentiel qui ne voit pas au-delà de sa vanité. YM♦
Yves Mamou, Dreuz.info©