Le projet dévoilé : la nouvelle brigade ultra-orthodoxe n’est pas ce qu’on pouvait penser

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Dans sa campagne de relations publiques pour la nouvelle brigade orthodoxe « Hashmonayim », Tsahal s’efforce de présenter une unité « strictement conforme » aux exigences religieuses. Mais un examen attentif du projet de « formulaire d’adhésion » révèle des zones d’ombre inquiétantes. Les recrues pourraient signer de leur propre main une autorisation pour servir dans des unités mixtes ? Tsahal s’engage à offrir un service basé sur une stricte séparation des sexes, mais uniquement « s’il n’y a pas de contraintes opérationnelles ». Un autre point préoccupant : un soldat qui enfreindrait les règles pourrait se retrouver affecté à une unité mixte sans possibilité de recours.

‘Harédim 10

Lancement de la brigade Hashmonayim

Dimanche dernier, une conférence dédiée aux nouvelles recrues de la brigade « Hashmonayim », récemment créée par Tsahal, s’est tenue à la base militaire de Glilot. L’événement s’est déroulé en présence du général de division David Zini, commandant des formations et entraînements, du colonel Avinoam Emouna, fondateur de la brigade, et des épouses des nouvelles recrues.

Selon des informations rapportées par ‘Haredim 10, bien que Tsahal ait déclaré que la brigade respecterait une stricte séparation des sexes, la réalité lors de la conférence était différente. Un simple escalier séparait les dizaines de femmes présentes des hommes dans la salle, en décalage avec les normes orthodoxes habituelles pour les événements publics.

Engagements religieux et surprises dans le formulaire

La promotion de la brigade promet un cadre qui permettrait aux recrues orthodoxes de « rester fidèles à leurs principes religieux ». Parmi les engagements exigés des recrues figurent des promesses telles que :

  • Ne pas se raser la barbe ou couper les péoth (mèches) pendant le service,
  • Porter des vêtements de Chabbat pour les prières et les repas de Chabbat, y compris un costume et un chapeau,
  • Utiliser uniquement des téléphones filtrés,
  • Assister aux prières obligatoires et à des études religieuses.

Cependant, un examen approfondi du projet de formulaire d’adhésion dévoile des contradictions inquiétantes. Les soldats pourraient être confrontés à des situations où ils serviraient aux côtés de femmes, voire être transférés dans des unités séculières et mixtes pour toute la durée de leur service.

Que prévoit réellement le formulaire ?

Tsahal présente la brigade comme destinée à des soldats orthodoxes respectueux des lois religieuses, dans un cadre qui préserverait leur identité religieuse : « Vous sortirez comme vous êtes entré ». Mais le formulaire de demande d’adhésion, révélé par le journaliste Mendy Rizel de Kol Barama, met en lumière des clauses problématiques.

Selon ce document, un soldat qui enfreindrait les règles pourrait être transféré dans une autre unité de l’armée, y compris une unité mixte et séculière, sans droit de recours. La clause stipule :

« Je reconnais que si je suis exclu ou retiré de la brigade, je peux être affecté à une autre unité dans le cadre du service orthodoxe de Tsahal ou à toute autre unité de l’armée, sans droit de recours ni possibilité de contestation. »

Une version préliminaire, mais des doutes subsistent

Tsahal affirme que le document divulgué est un projet en cours et que des modifications y seront apportées. Toutefois, aucune précision n’a été fournie quant aux changements envisagés. Malgré plusieurs demandes, le porte-parole de Tsahal n’a pas communiqué la version finale qui sera signée par les recrues.

En attendant, les inquiétudes demeurent. Selon des sources au sein de Tsahal, un soldat exclu de la brigade Hashmonayim pourrait être redirigé vers des unités comme « Netzah Yehuda », avec l’espoir qu’il ne finisse pas dans une unité séculière ou mixte. Mais aucune garantie n’est donnée.

Pour les recrues et leurs familles, le manque de clarté autour de la politique de transfert et des garanties concernant les conditions religieuses du service laisse planer un doute sérieux sur la conformité de cette brigade avec les promesses initiales.

Exil dans une unité mixte

Voici des extraits directs du formulaire que le conscrit signe :
« Je soussigné… m’engage, pendant toute la durée de mon service dans la brigade, tant dans le cadre militaire qu’à l’extérieur, à respecter les règles suivantes : maintenir en permanence un mode de vie conforme à celui de la société orthodoxe ; veiller constamment à un langage propre, sans propos déplacés… Je me comporterai en permanence avec pudeur selon les règles en vigueur. »

Le conscrit s’engage également à des obligations telles que l’étude publique de la Tora, trois prières par jour en minyan, porter des vêtements orthodoxes même pendant les repas de Chabbat et les permissions, et d’autres engagements similaires.

Jusque-là, cela semble logique. Mais les « pièges » se trouvent dans la suite. À l’article 10, le conscrit s’engage :
« Je suis conscient que le respect strict de toutes les règles ci-dessus, dans leur lettre et leur esprit, constitue une condition préalable et absolue pour servir dans la brigade, depuis l’incorporation jusqu’à la libération.
Je suis conscient que la non-observation d’une seule des règles entraînera mon expulsion de la brigade sans droit d’appel. Je déclare par ma signature avoir lu la politique de la brigade, l’avoir comprise et m’engage à la respecter.
Je suis informé que si je suis expulsé de la brigade, je devrai effectuer la durée complète de mon service conformément à la loi.
Je suis informé que si je suis expulsé de la brigade, je pourrais être transféré dans une autre unité relevant du service des orthodoxes dans Tsahal ou dans toute autre unité militaire, sans droit d’appel ni possibilité de réclamation. »

Ce que cela signifie :
Dès la signature, l’armée dispose d’un document signé par le conscrit, stipulant qu’il accepte d’être transféré dans une unité totalement mixte, sans pouvoir émettre aucune objection ni exercer un droit d’appel – tout en étant tenu de servir la durée complète prévue par la loi.

Comment ? Très simplement : si vous ne respectez pas toujours un langage propre ou manquez une prière en minyan, ou si vous partez en permission vêtu légèrement pour vous détendre, l’armée peut vous expulser de la brigade « Hashmonayim » et vous affecter à une unité de son choix, y compris une unité mixte.

Un responsable orthodoxe ayant servi trois ans dans une unité combattante déclare à ‘Haredim 10 :
« Est-il juste de traiter ainsi les gens ? Leur promettre une ‘préservation de leur identité orthodoxe’, mais leur faire signer un engagement qui permet de les expulser dans une unité laïque mixte ? Comment peut-on accepter cela ? C’est un piège ! »

Ce responsable ajoute :
« Il y a un autre problème – alors que les engagements du conscrit sont détaillés de manière exhaustive et dans un langage juridique rigide, chaque infraction permettant à l’armée de le transférer dans une unité mixte, les engagements de l’armée envers lui, comme le respect du Chabbat, de la cacherout, etc., sont mentionnés en une seule phrase ! Et même cela, dans des termes vagues, généraux et non contraignants.

« Sans parler du fait que dans de nombreux cas, l’armée n’a pas respecté ses engagements envers les orthodoxes ou les religieux, comme en témoignent publiquement des officiers et soldats dans la Knesset et les médias. Voyez les plaintes des directeurs des Yechivoth Hesder depuis des années, dénonçant que l’armée ne respecte pas ses engagements envers eux, et leurs étudiants deviennent laïcs au sein de l’armée. »

La clause des « contraintes opérationnelles »

Mais tout cela n’est qu’un prélude au pire : le conscrit signe de ses propres mains son consentement à un service mixte, même pendant son service dans la brigade orthodoxe.

Vous ne me croyez pas ? Dès le début du document, le conscrit doit déclarer explicitement :
« Je suis conscient que pendant mon service dans la brigade ‘Hashmonayim’, l’armée me fournira un service basé sur une séparation absolue entre les sexes, sauf en cas de contraintes opérationnelles. »

En termes simples : l’armée s’engage à fournir un service séparé des femmes – sauf en cas de « contraintes opérationnelles ».

Qu’est-ce qu’une « contrainte opérationnelle » ? Ce terme général est très ouvert à interprétation. Cela ne concerne pas uniquement des missions spéciales en territoire ennemi. Une simple garde, une manipulation d’équipement ou même un trajet en véhicule peuvent facilement entrer dans cette définition.

Le responsable orthodoxe explique :
« Des femmes servent presque partout dans Tsahal, et elles veulent être intégrées dans encore plus de postes, donc il est impossible qu’un soldat orthodoxe n’en rencontre pas. De nombreux cas ont été rapportés où des soldats orthodoxes et religieux ont dû servir directement avec des soldates. Il faut se rappeler que la brigade orthodoxe est une unité opérationnelle. L’armée ne recrute pas des soldats pour qu’ils restent dans une salle d’étude. Par conséquent, être en poste mixte pour une garde de nuit ? C’est une contrainte opérationnelle ! »

Ce responsable conclut :
« Dès qu’un soldat entre dans l’armée, il reçoit un nouveau numéro d’identification, un numéro militaire, et il a maintenant une nouvelle identité. Vous êtes dans un monde différent. En formation de base, on nous disait : ‘Comprenez que vous êtes maintenant la propriété de Tsahal.’ C’est un système de contrainte et de soumission totale aux supérieurs. Le soldat est entièrement soumis aux ordres de l’armée et à ceux de ses commandants, qui eux-mêmes obéissent au chef d’état-major. À personne d’autre.

« Et encore une chose : peu importe combien ils promettent une unité séparée pour les orthodoxes, elle reste toujours une partie intégrante de l’armée laïque, qui fonctionne selon des besoins urgents. Pendant mon service, j’ai vu comment des soldats étaient soudainement transférés d’une unité à une autre contre leur volonté pour répondre à une nécessité.

« Alors, que se passera-t-il lorsque des soldats orthodoxes seront nécessaires dans une unité mixte ? Ce n’est pas surprenant que le rabbin Eyal Karim, rabbin en chef de Tsahal, ait déclaré lors de la création de la brigade : ‘Pour toutes les questions impliquant des passages dans des bases où il y a des femmes, nous consulterons les dirigeants orthodoxes.’ Vous réalisez ce qu’ils font signer à nos jeunes ? »

Ce responsable met également en garde contre un autre danger :
« Cela ouvre la porte à des pressions personnelles. Le conscrit signe : ‘Je suis conscient que si une plainte est déposée contre moi… sur des questions de valeurs, et qu’elle est prouvée fondée… cela constituera une raison pour mon expulsion de la brigade sans droit d’appel.’ Alors, qu’est-ce qui pourrait arriver ? Imaginez un soldat orthodoxe qui se soucie vraiment des choses, et qui se plaint à juste titre que l’armée n’a pas respecté un de ses engagements, par exemple concernant la cacherout ou le Chabbat.

« En réponse, quelqu’un pourrait fouiller dans son dossier et trouver une règle qu’il n’a pas respectée ‘à tout moment’, ‘tant dans le cadre militaire qu’à l’extérieur’, ‘dans leur lettre et leur esprit’ – et ce soldat se verrait immédiatement menacé d’être envoyé dans une unité mixte !

« C’est un piège. Délibéré ou non ? Je ne sais pas, et je ne fais pas d’accusation. Mais s’il vous plaît, soyez prudents. Car ils vous font signer. »

1 Commentaire

  1. Le projet dévoilé : la nouvelle brigade ultra-orthodoxe n’est pas ce qu’on pouvait penser : j’aurais dit « n’est pas trop différente de ce qu’on pouvait penser » !
    Techniquement et même idéologiquement, il est impossible, voire inefficace de créer une brigade opérant au sein d’une armée qui ne pourrait pas compter sur elle car très différente, d’où la la clause de « contrainte opérationnelle »
    Mais l’armée a ses contraintes, ses principes, ses théories et tout peut devenir nécessaire.

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