Par Jean-Pierre Braun LPH INFO
« Mal nommer les choses ajoute aux malheurs du monde » disait Camus.
L’attaque d’une cruauté inouïe perpétrée par le ‘Hamas le jour de Sim’hath Tora n’est pas une « opération », ce n’est pas non plus une « incursion » ou une « révolte ». Aucun de ces termes ne reflète, même de très loin, l’ampleur de ce qui s’est passé et continue de se dérouler sous nos yeux. Ces termes ne peuvent pas non plus décrire les intentions des attaquants, leur volonté de nuire de la manière la plus extrême et leur comportement abject vis-à-vis des victimes et otages.
Alors s’agit-il d’une guerre ? Pas vraiment, une guerre est une confrontation entre entités nationales, légales, organisées, avec des objectifs définis et des moyens d’y parvenir. Les batailles se déroulent entre armées, formelles ou non, les civils ne sont le plus souvent que des pertes collatérales. Exceptées les guerres dites « de religion » et la Seconde Guerre mondiale.
Ma conviction intime, c’est que cette attaque du ‘Hamas est un POGROM, dans le sens le plus absolu du terme.
Si au départ un pogrom était une attaque contre un groupe religieux, juif ou autre, ces derniers siècles, le terme pogrom a été exclusivement (quel privilège !) réservé aux attaques contre les communautés juives.
Qu’est ce qui caractérise un pogrom ? (1) c’est une attaque antisémite dirigée contre les Juifs (2) c’est une attaque qui vise les populations civiles, hommes, femmes, enfants, personnes âgées, (3) c’est une attaque visant à déshumaniser les Juifs en temps qu’individus et en temps que membres de la communauté, (4) c’est une attaque sans limite au niveau de la cruauté, du traitement infligé aux victimes : violence, abus, viol, massacre, exécutions sommaires. Le vocabulaire de la cruauté antisémite ne connait pas de limites, (5) les violences sont presque systématiquement accompagnées de vol, de pillage et de spoliation des biens des populations juives victimisées, (6) au-delà de la violence, un des buts du pogrom est de se débarrasser de la population juive, de l’expulser ou de la faire partir. Les pogroms qui sont ancrés dans notre mémoire collective, malheureusement, se sont déroulés à Varsovie en 1881, Kishinev en 1903, Kiev en 1905 et 1919, etc. Par cette même définition, la nuit de Cristal organisée par les nazis en Allemagne en 1938 a été un des plus importants pogroms de l’ère moderne et un prélude à la Shoah. Les pogroms n’ont pas été limités au monde ashkénaze. On se rappelle également les pogroms de 1941 à Farhud en Irak, de Tripoli en 1945 et d’Aleppo en 1947, parmi d’autres.
OK, c’est un pogrom, et alors ?
Reconnaissons d’abord que les six attributs du pogrom listés ci-dessus sont présents, sans exception, dans la catastrophe de Sim’hath Tora du 7 Octobre 2023.
Cet exercice de classification n’est pas juste un exercice gratuit, une sorte de gymnastique intellectuelle sans conséquence.
Ayant défini sans ambiguïté cette attaque du ‘Hamas comme un pogrom nous permet de tirer les conclusions suivantes :
- A part l’échec spectaculaire des services de renseignements Israéliens, cela n’a pas grand-chose de comparable à la Guerre de Kippour.
- Cela rappelle par contre les massacres haineux des pogroms mentionnés ci-dessus : les intentions morbides des terroristes du ‘Hamas sont virtuellement identiques à celles des milices russes, ukrainiennes, nazis, et arabes dont nous venons de parler.
- Ces milices et terroristes sont motivés par un antisémitisme profond, primaire, atavique. Le Juif n’a pour eux pas de dignité. Ils ne le considèrent pas comme humain. La vie juive à leurs yeux n’a que peu de valeur. Civils et militaires, femmes, enfants et vieillards peuvent être violentés et massacrés sans limite. De nombreuses vidéos qui circulent sur le web attestent de tout ce que je viens d’affirmer. Ce sont des vidéos insupportables. Aucune personne civilisée ne peut les regarder sans fondre en larmes.
- Comment peut-on parler, négocier ou raisonner avec de pareils sauvages ? Et même si on essayait de le faire, comment peut-on jamais leur faire confiance ? C’est clairement impossible.
- Alors que faire ? Pour les populations juives désarmées, faibles et vulnérables des siècles derniers en Europe et en terre arabe, souvent la seule solution était l’exil. Pour nous ici et maintenant, en Israël, l’exil n’est pas une option : אין לנו מדינה אחרת, nous n’avons pas d’autre pays. Mais en même temps, nous ne sommes plus la population juive faible et apeurée des siècles passé. Nous sommes Israël, nous avons Tsahal, nous avons prouvé à travers notre courte histoire notre résilience et notre amour pour notre seul pays. Nous pouvons faire bien mieux que juste nous défendre.
Eléments de stratégie
Il ne sert à rien de traiter ces terroristes comme des interlocuteurs légitimes, comme des entités avec qui négocier. Ce sont des ennemis à qui en aucun cas nous ne pouvons proposer un pays, ni même un territoire à gouverner. Aucune solution à un, deux, ou trois Etats ne peut convenir. Ces sauvages ne méritent rien de tout cela. Comme les hordes de Chmielniski, comme les nazis du 3eme Reich, ils ne méritent que d’être pourchassés, éliminés, détruits.
Israël s’est lourdement trompé ces dernières années en considérant qu’une politique d’apaisement vis-à-vis du ‘Hamas pouvait conduire à une coexistence pacifique, peut-être même à la paix. En conséquence, Israël a aidé le ‘Hamas à se forger une respectabilité oh combien non-méritée. Ne comprenant pas que nous avions à faire à une organisation de sauvages inhumains et cruels, nous leur avons donné l’opportunité de grandir, de s’enrichir, de s’armer jusqu’aux dents et de préparer leurs desseins funestes. Nous en subissons les conséquences aujourd’hui. Nos 700 morts zal et nos 2050 blessés sont là pour nous rappeler l’ampleur de notre erreur.
Nous devons à tous nos martyrs de réagir sans pitié, sans remords et sans faiblesse afin d’éradiquer le ‘Hamas et tous ses terroristes une fois pour toutes.
Jean-Pierre Braun a passé sa carrière au cœur de la Hi Tech dans la Silicon Valley (Californie). Jean-Pierre a également été le fondateur et président pendant 20 ans d’une synagogue unique au centre de la Silicon Valley et, à son retour en France, est devenu vice-président du CRIF Rhône Alpes et président de la communauté Rachi à Grenoble. Avec sa femme Annie, ils ont fait leur Aliyah a Jérusalem en 2016.