La Silicon Valley divisée : quand les alliances politiques déchirent le monde technologique
Le monde de la Silicon Valley, longtemps réputé pour son inclinaison à gauche, traverse une période de turbulences inédites. Les élites technologiques, habituellement unies dans leur soutien aux candidats démocrates, se déchirent désormais publiquement autour de la présidentielle américaine. Ce clivage profond met à l’épreuve non seulement les relations d’affaires mais aussi des amitiés de longue date.
Elon Musk, fervent partisan de Trump, n’a pas hésité à critiquer ouvertement ses homologues démocrates, allant jusqu’à traiter l’investisseur Vinod Khosla de « dérangé » sur X (anciennement Twitter). De son côté, Aaron Levie, PDG de Box et soutien de Harris, a suggéré avec sarcasme que l’investisseur David Sacks devait être sous l’effet du sirop contre la toux pour avoir soutenu Trump.
Ce climat tendu a des répercussions bien au-delà des échanges en ligne. Les relations d’affaires et personnelles en sont affectées, comme en témoigne Josh Felser, un investisseur engagé dans les technologies climatiques. Dans un message poignant sur LinkedIn, il a exprimé son malaise face au soutien de certains de ses collègues à Trump, soulignant que leurs relations « seraient probablement changées à jamais » et que l’histoire ne les jugerait pas favorablement.
Sur le plan financier, les deux campagnes bénéficient d’un soutien substantiel de la part des titans de la technologie. En juillet, la campagne de Kamala Harris avait récolté environ 204 millions de dollars, contre 47,5 millions pour celle de Donald Trump. Harris, en particulier, a vu sa collecte de fonds dynamisée par le soutien de figures influentes de la Silicon Valley, comme Reid Hoffman, cofondateur de LinkedIn, qui a contribué à organiser une collecte de fonds générant plus de 13 millions de dollars.
Les partisans de Trump dans le secteur technologique se montrent cependant sceptiques face à l’approche de Harris, redoutant notamment des hausses d’impôts pour les entreprises prospères et une régulation accrue des industries émergentes telles que la cryptomonnaie sous une administration Harris.
Face à cette polarisation croissante, certains leaders technologiques appellent à l’apaisement. Mark Pincus, cofondateur de Zynga et ancien donateur aux causes démocrates, a décidé de ne soutenir aucun candidat cette fois-ci. Sur LinkedIn, il a plaidé pour une diminution des tensions, affirmant que « nous croyons tellement profondément que notre camp est juste que nous jugeons moralement l’autre camp. Nous sommes tous allés trop loin. »
En somme, la Silicon Valley, autrefois bastion d’unité politique, est désormais le théâtre d’une bataille idéologique qui pourrait bien redéfinir les alliances et les relations dans le secteur pour les années à venir. Cette fracture, sans précédent dans l’histoire récente de la tech, pourrait laisser des traces durables, tant sur le plan personnel que professionnel, au sein de cette communauté autrefois soudée.
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