Bien-sûr que je suis pour la paix. On m’a appris à choisir la vie en toute circonstance. Mais comme je suis pour la paix, je suis aussi pour la vérité. Quand on me demande pourquoi je soutiens Israël, je réponds que soutenir Israël, les Juifs, et la vérité historique, la rationalité universelle, n’est pas contradictoire. Philosophe de formation, la vérité a un statut particulier pour moi. Voici une vérité : Israël est bien une terre juive où les Juifs, constitués en peuple, vivaient il y a 2500 ans. On parle aujourd’hui d’Israël comme d’une puissance “occupante”, comme d’une colonie, mais qui a construit une mosquée sur un lieu où, autrefois, s’érigeait un Temple ?
Pourquoi personne ne relève cette autre évidence au sujet des otages ? Comment peut-on ne pas voir cette criante vérité ? A-t-on oublié ce qu’étaient le terrorisme et la radicalité avant l’islamisme ? A-t-on oublié les mafieux, les voyous ? Que représentaient des otages dans le monde d’avant ? Et toujours actuellement pour les narcotrafiquants du Mexique ou les gangsters d’Afrique du Sud ? Une monnaie d’échange. Un faire-valoir. Un moyen de pression, un chantage pour obtenir quelque chose en échange de leur libération. Sinon, à quoi bon kidnapper ?
Il est proprement sidérant que personne ne dise haut et fort le réel à ce sujet : quand les terroristes du Hamas ont commis les atrocités du 7 octobre, où étaient les revendications qui, normalement, vont avec ? Quand ils ont pris en otage 250 personnes, quelqu’un a-t-il entendu un message de demande d’échange ? Les terroristes du Hamas ont-ils parlé à la face du monde pour exprimer un désir, une volonté de contrepartie ? Quand un bandit sans morale kidnappe un enfant, il choisit, j’imagine, l’enfant, en fonction de la richesse qu’il prête à ses parents, à sa famille, à sa “communauté” (Ilan Halimi, on ne t’oublie pas). Mais là, quelle richesse est demandée en échange ? A-t-on entendu les terroristes demander un État palestinien ? Je ne comprends pas pourquoi ceux qui défendent le Hamas aujourd’hui, qui les considèrent comme des résistants, croient les défendre en demandant un État palestinien. Personne du Hamas n’a parlé, n’a demandé d’État palestinien le 7 octobre, et jusqu’à maintenant. Quand 5000 roquettes se sont abattues sur Israël le 7 octobre, c’était pour demander un État palestinien ? Quand des politiciens ou intellectuels réclament la reconnaissance d’un État palestinien pour donner un tour politique à l’action terroriste du 7 octobre, ils ne font que plaquer sur le réel ce qu’ils estiment être le désir des terroristes, projection européenne, occidentale, de nos propres tropismes (la souveraineté d’un État, le nationalisme, “un peuple doit pouvoir disposer de lui-même”, comme si ce n’était pas déjà le cas).
Quand un voyou ou un terroriste “classique” commet un rapt, une action terroriste (par exemple détourner un avion, menacer de faire sauter un bâtiment, menacer les membres d’une famille…), c’est parce qu’il y a, en contrepoint, un élément qui, s’il est réalisé (obtenir une rançon, satisfaire une cause), permet de suspendre le rapt ou l’action terroriste. Ici, pas de contrepartie, sinon l’éradication de l’État d’Israël et la destruction, la sadisation des Juifs. Doit-on négocier avec ces “terroristes” ? Quand, juste après le 7 octobre, certains déniaient le qualificatif de “terroristes” aux meurtriers, ils avaient paradoxalement raison, mais non pour les motifs qu’ils invoquaient : ils ne sont certainement pas des “résistants”, ils sont des exterminateurs, des génocidaires. Ils se fichent pas mal d’une “solution à deux États”. Ils n’espèrent aucune contrepartie à leurs méfaits. Il ne s’agit pas de “terrorisme”. Pas de chantage, pas de pression ici : il s’agit d’une volonté délibérée, calculatrice, d’anéantissement des Juifs.
L’antisémitisme est avant tout une spoliation, un désir de vol. Le désir d’obtenir ce que le Juif possède prétendument. Mais qu’est-ce donc que les Juifs posséderaient qui, s’il était offert aux terroristes, viendrait apaiser leur désir de tuer, étancher leur soif de mal ? Je cherche toujours mais je ne trouve pas. Peut-être parce qu’il n’y a rien à trouver de ce côté-là. C’est autre chose. Les communiqués du Hamas ne réclament pas deux États, ils ne réclament même pas un seul État. Ils réclament la mort des Juifs. Ils ne parlent pas vraiment de “terre”, de cadastre, de zone géographique. Et il y a des personnes parmi nous, des occidentaux, qui prétendent savoir mieux que les “terroristes” ce que ces derniers désirent. Il suffit d’écouter les cadres du Hamas sincèrement pour comprendre très vite qu’il ne s’agit pas d’une affaire de “frontières”. L’acte des terroristes du 7 octobre est égoïste, clos, indépassable par l’aspiration à une quelconque cause collective. Vouloir y déceler la défense d’une cause politique, c’est, d’une certaine manière, être infidèle aux “terroristes” tout en prétendant les comprendre et porter leur message.
En 44, les Alliés ne voulaient pas la “paix” avec les nazis, ils voulaient les vaincre. Ils ne cherchaient pas à voir derrière leurs atrocités antisémites autre chose que de l’antisémitisme. Ils ne cherchaient pas de dimension politique. Ils voulaient mettre fin à ce mensonge que constitue le nazisme au profit d’une vérité universelle, la dignité de tous les hommes.
Faut-il espérer la paix entre Israël et le Hamas ou le triomphe de l’armée israélienne sur le Hamas ?