En direct sur la radio du service public, les auditeurs ont pu entendre un journaliste décrire l’ensemble des Israéliens comme des « colons », ce qui revient à appeler à mettre fin à l’existence de leur pays. Dangereux, à l’heure où de nombreux responsables reconnaissent que l’antisionisme est la dernière mutation de l’antisémitisme.
Tous les jours, la rédaction de France Inter choisit de zoomer sur un sujet. Lundi 12 novembre, les jumelles de la radio publique se sont fixées sur la frontière israélo-libanaise.
Israël y construit une barrière, comme il l’a fait à d’autres frontières, pour se protéger des ennemis qui l’entourent. Au Liban, il s’agit du Hezbollah, mouvement soutenu par l’Iran fondamentaliste et fort de 150’000 missiles et roquettes destinés, si le loisir lui en était laissé, à éradiquer l’Etat juif.
La chronique d’Aurélien Colly donne la parole à Mahmoud, un « vieux forgeron libanais ». Le journaliste explique qu’il a « dépassé la soixantaine ». Mahmoud explique :
« Quand on était petit, on allait en Palestine. On achetait des affaires, on vendait des choses. Il y avait du commerce. Les Juifs n’étaient pas comme aujourd’hui, ils étaient sages, ils n’attaquaient personne, ne prenaient les terres de personne. C’est comme ça qu’ils étaient avant. »
S’il a la soixantaine, Mahmoud est né en 1958 ou un peu avant. Le mandat britannique sur la Palestine s’est terminé en 1948 : il y a 70 ans. Et un bébé n’a pas de souvenirs. Il faudrait, au minimum, que Mahmoud ait 75 ans, voire 80, pour avoir des souvenirs si précis. On ne sait pas si Mahmoud est réellement un forgeron, mais on peut être raisonnablement sûr qu’il n’a pas l’âge que le journaliste lui prête.
Et Mahmoud est un antisioniste (qui refuse l’existence de l’Etat d’Israël) doublé d’un antisémite : il s’en prend directement aux Juifs qu’il accuse de vol de terres, déniant la légitimité de l’Etat d’Israël et le droit pour le peuple juif à un Etat souverain.
Il envoie ainsi un message toxique, avalisé sans réserve par la radio publique, aux antisémites de France qui se voient confortés dans leur envie de s’en prendre aux frères de ces « Juifs voleurs » et « pas sages » (c’est-à-dire pas soumis – pas dhimmis en langage islamique…) en attaquant un Juif à kippa, une synagogue ou un magasin cacher.
Mahmoud poursuit :
« Ce que je veux c’est qu’ils enlèvent le mur, que ça redevienne la Palestine et qu’on récupère nos terres. Ils disent que c’est une frontière ? Non ! Notre frontières (sic) elle n’est pas là, nos terres sont de l’autre côté. »
Un appel à éradiquer Israël entériné par le journaliste qui le diffuse sans le commenter et jusqu’à adopter la terminologie du Hezbollah et des autres mouvements terroristes islamiques entourant Israël en parlant de « colonies israéliennes » pour désigner trois villes situées en territoire israélien internationalement reconnu :
Sur les collines arides qui surplombent la vallée libanaise de Marjayoun, on voit parfaitement les colonies israéliennes de Metula, Kfar Guiladi ou Khiriat Shmona, à quelques kilomètres.
La route reliant ces trois localités se situe dans le « doigt de la Galilée », la région la plus septentrionale d’Israël.
Bien loin de Gaza ou des territoires contestés de Cisjordanie / Judée Samarie. Aucune instance internationale ne conteste la souveraineté d’Israël sur cette région. Parler de « colonies israéliennes » revient à adopter le langage des ennemis aux idées génocidaires d’Israël qui considèrent toute présence juive sur cette terre comme illégitime (à l’image de la vedette des médias Ahed Tamimi dont nous avons mis en lumière les mêmes excès).
C’est techniquement faux, et cela devrait préoccuper la rédaction d’une radio qui se dit sensible à la lutte contre les « fake news » (nous pourrions ajouter à ce tableau l’interview, là encore sans filtre, d’un homme du Hezbollah – un mouvement reconnu comme terroriste non seulement par Israël, mais aussi par l’Union européenne ou les Etats-Unis ; l’affirmation contestable selon laquelle « le Hezbollah n’est plus au Sud-Liban » et n’a « plus de position militaire » – ce qui est contesté jusque dans des journaux libanais ; et le « post-scriptum » ajouté à cette rubrique par Nicolas Demorand, le présentateur du 7-9, qui donne le bilan des affrontements de la nuit précédente autour de Gaza sans préciser la nature des morts palestiniens dont plusieurs étaient des membres avérés de mouvements terroristes, et sans mentionner les roquettes et missiles lancés par les mouvements islamistes du territoire contre les civils israéliens).
C’est surtout indigne d’une radio publique française à l’heure où le gouvernement dénonce – mais sans oser pointer la responsabilité de médias qui désinforment quotidiennement sur Israël – l’aggravation de l’antisémitisme. Il faut rappeler que, pour le président Macron comme pour beaucoup d’autres responsables politiques, l’antisionisme n’est que la dernière forme en date de l’antisémitisme.
France Inter serait bien inspiré, au minimum, de corriger la terminologie des « colonies israéliennes » sur la version écrite de cette chronique; et de réaliser pour faire bonne mesure un « zoom de la rédaction » donnant la parole aux habitants de la région de Kiryat Shmona qui sauront sans aucun doute éclairer les auditeurs sur les sentiments que leur portent leurs voisins du Hezbollah.
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