Des dizaines de milliers de Juifs survivants de la Shoah interdits de retourner dans leurs maisons à Paris

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Des maisons appartenant à des Juifs, confisquées par les nazis à Paris pendant la guerre, n’ont jamais été restituées à leurs propriétaires d’origine. C’est ce que révèle un nouveau livre publié récemment à l’occasion du 80e anniversaire de la libération d’Auschwitz. Les autorités françaises ont refusé de permettre à des dizaines de milliers de Juifs parisiens survivants de la guerre de retourner dans leurs maisons, et les plaintes juridiques à ce sujet ont été rejetées par la justice française.

Be’hadré ‘Harédim – Yanki Farber

En 1935, Israël et Hélène Malouanczik vivaient au 118 boulevard de la Villette, dans le 11e arrondissement de Paris. Le couple – lui, modiste originaire de Pologne, et elle, couturière française – habitait un appartement de deux pièces avec leurs deux jeunes filles.

Cinq ans plus tard, après l’occupation de la France par les Allemands, le destin de la famille Malouanczik fut semblable à celui de nombreux Juifs parisiens. Israël fut déporté vers les camps, tandis qu’Hélène et ses filles s’enfuirent vers une zone non contrôlée directement par les nazis.

Lorsque Hélène et ses filles revinrent à Paris après la libération de la ville en août 1944, elles découvrirent non seulement que leur appartement avait été vidé de tous ses meubles, mais qu’il avait été occupé par un autre couple, André Pestaux, un mécanicien, et son épouse Yvonne, selon The Guardian.

Hélène dut alors s’installer chez des proches survivants. Elle apprit qu’Israël avait été assassiné à Auschwitz, parmi les 40 000 Juifs parisiens morts dans les camps d’extermination. En juin 1946, un tribunal décida qu’Hélène ne pouvait pas récupérer son appartement, où la famille Pestaux vécut jusqu’en 1956.

Un nouveau livre, intitulé Appartements témoins, publié à l’occasion du 80e anniversaire de la libération d’Auschwitz, révèle que le cas de la famille Malouanczik n’était pas isolé. Les autorités françaises ont systématiquement refusé à des dizaines de milliers de Juifs parisiens survivants de la guerre le droit de retourner dans leurs foyers.

Le livre souligne que les nouveaux occupants des logements juifs se montraient souvent surpris, voire déçus, de voir que les anciens propriétaires avaient survécu et réclamaient la restitution de leurs biens. Beaucoup de Parisiens étaient convaincus que les Juifs ne reviendraient jamais. Après la guerre, de nombreuses personnes vivant dans des appartements juifs furent étonnées du retour des familles juives à Paris.

Sarah Gensburger, professeure à Sciences Po Paris, a déclaré à The Guardian que les Malouanczik faisaient partie des 25 000 familles juives auxquelles il avait été interdit de récupérer leur logement. Les autorités françaises de l’époque justifiaient cette situation en affirmant que des familles non juives, dont les maisons avaient été endommagées ou détruites par les bombardements, avaient été relogées dans des appartements appartenant à des Juifs déportés. L’occupation des biens juifs était alors considérée comme une « pratique courante et normale ».

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