Par Sabine Roitman – Desinfos
Si les voyages forment la jeunesse, ils instruisent aussi les adultes, et ce n’est qu’en se rendant sur place dans les Emirats qu’on comprend vraiment à quel point les « Accords d’Abraham » ont changé la donne au Moyen-Orient. On mesure encore mal aujourd’hui toutes les retombées positives pour Israël de ces accords, snobés dès leur signature par beaucoup de pays européens, par les démocrates et par la majorité des juifs américains car, « péché originel », ils étaient l’œuvre d’un Donald Trump méprisé et d’un Benjamin Netanyahu stigmatisé.
Il faut se rendre à Dubai ou Abu Dhabi pour mesurer à quel point Donald Trump, Bibi Netanyahu et Jared Kushner ont réussi à bouleverser les alliances régionales et à bousculer le dogmatisme islamo-gauchiste et antisioniste que l’on retrouve pourtant un peu partout dans le monde : l’héritage abrahamique commun des Juifs et des musulmans est en effet clairement mentionné dans le texte des accords, et en faisant jouer la Hatikva dans leurs palais les dirigeants de ces pays arabes reconnaissent implicitement les Juifs comme peuple biblique de la terre d’Israël. De quoi démoraliser pour un temps nos ennemis et déstabiliser leur discours… N’en déplaise à certains, ces trois hommes d’Etat méritent sans conteste le Prix Nobel de la paix, attribué en d’autres temps sous forme de chèque en blanc à des Arafat ou des Obama.
L’invasion brutale de l’Ukraine par la Russie prouve dans cette époque de bien pensance que seuls les Etats forts peuvent survivre. Et ce n’est pas par bonté d’âme mais bien parce qu’Israël est fort aujourd’hui, que des Etats arabes longtemps hostiles sous la pression des « Palestiniens » ont décidé de revoir leur position à 180° : ils y trouvent un intérêt économique et technologique bien sûr, mais surtout le bénéfice d’une alliance politique et militaire contre leur inquiétant voisin iranien.
Au plan stratégique, c’est en se promenant le long des plages de ces émirats qu’on réalise tout à coup que l’Iran n’est qu’à 180 km, juste en face sur le Golfe persique. On mesure mieux alors l’avantage exceptionnel que peut donner à Israël l’accord de coopération de défense signé par Naftali Bennett avec le Bahreïn, et qui prévoit que du personnel naval et des responsables de défense israéliens pourront désormais y stationner en permanence, littéralement sur la frontière ouest de l’Iran.
Ce mouvement est symétrique de celui déjà réalisé avec l’Azerbaïdjan aux portes de l’Iran côté nord, et qui offre de ce fait à l’Etat hébreu une profondeur de champ pour sa stratégie politique et militaire de sécurité. Téhéran s’est déjà insurgé contre cette coopération croissante de l’Azerbaïdjan avec Israël qui, en lui vendant de l’armement sophistiqué pour l’aider dans le conflit du Haut-Karabakh, a obtenu en retour l’autorisation d’utiliser les aéroports azéris en cas d’attaque contre les installations nucléaires de l’Iran.
Avec les accords d’Abraham, Israël peut de même garder un œil sur le Quatar, à quelques encablures des Emirats Arabes Unis. Rappelons que ce pays finance les Frères musulmans, le Hamas, le Jihad islamique et le Hezbollah, et subventionne la haine d’Israël dans le monde, jusque dans les campus universitaires. Il met également à profit son influent réseau de télévision Al Jazeera pour miner la stabilité de ses voisins arabes pro-occidentaux. Tout en sachant préserver son avenir et faire bonne figure face à l’Occident en menant un double jeu dans lequel il est passé maître, avec d’importants investissements économiques, culturels et sportifs qui masquent ses campagnes de lobbying, de désinformation et de cyber-espionnage véhiculant sans trêve l’idéologie islamiste.
Au quotidien, ce qui est le plus saisissant quand on se rend aux Émirats, ce n’est pas tant la débauche de luxe, de gratte-ciels, de Maserati ou de Lamborghini pilotés par des émiratis dont le dromadaire était encore le seul moyen de transport il y a à peine cinquante ans, que la chaleur avec laquelle tout Juif ou israélien est accueilli par la population locale qui a du même coup enrichi son langage habituel de quelques mots d’hébreu… Combien de visiteurs arabes du pavillon israélien n’avons-nous pas vus aussi à l’exposition universelle de Dubai, applaudissant sans retenue les présentations ou les chants qu’on y entendait.
Des accords parfaits d’un côté, désaccords parfaits de l’autre : quand on revient, que ce soit en France ou en Israël, c’est un peu la douche froide lorsqu’on voit dans tous les média les Juifs s’invectiver entre eux, se stigmatiser, se traiter de tous les noms, alors que l’histoire nous a prouvé à maintes reprises que la haine entre Juifs ne conduit qu’à des catastrophes. Du coup on a brusquement envie de s’en retourner pour un temps vers ces pays où Juifs et israéliens sont appréciés, admirés même, et accueillis avec tant de chaleur (plus de 40° en été), tout en espérant que l’on pourra très vite entendre à nouveau chez nous et entre nous la petite musique des accords parfaits.
Sabine Roitman