La chronique de Michèle MAZEL
On vient de commémorer le quinzième anniversaire de ce qu’on appelle ici «le désengagement» c’est-à-dire l’évacuation de tous les Israéliens de la bande de Gaza désormais séparée par une barrière de l’État d’Israël dans ses frontières internationalement reconnues. Est-ce pour marquer l’événement ? C’est un véritable feu d’artifice de ballons qui monte vers le ciel de Gaza et prend la direction du voisin. Ils sont roses, ils sont verts, ils sont blancs et descendent par grappes légères vers les champs et les forêts du pourtour de la bande de Gaza. Il s’agit de ballons d’un genre nouveau : les uns sont incendiaires et atterrissent en douceur mais c’est sans douceur qu’ils déclenchent incendie après incendie. Les autres sont bourrés d’explosifs et il faut les désamorcer en toute hâte.
Qui se charge de les acheter, de les bourrer d’explosifs et de les envoyer par-dessus la barrière ? Personne ne s’en vante mais là-bas des actions de cette ampleur ne peuvent se dérouler jour après jour sans l’aval du Hamas – quand ce n’est pas l’organisation terroriste elle-même qui en prend l’initiative. Pourquoi ? C’est en vertu d’une logique typiquement moyen-orientale. Après l’évacuation de Gaza, c’est l’Autorité palestinienne qui devait en assumer l’administration. Le Hamas, qui ne l’entendait pas de cette oreille, s’en débarrassa dans une révolution sanglante ; toutefois les fonctionnaires continuèrent à être rattachés aux autorités de Ramallah dont ils sont censés recevoir leur salaire.
Seulement ces autorités ont décidé il y a quelques années de ne plus verser ces salaires. Querelles de clochers ou plutôt de minarets. Bon prince, l’émir du Qatar a mis la main à ses coffres, réputés profonds, et s’est proposé de transférer chaque mois l’argent nécessaire en attendant que Gaza et Ramallah se mettent d’accord. Une attente qui perdure d’autant que l’Autorité palestinienne refuse actuellement de recevoir les sommes qui lui reviennent au titre des droits de douane et autres taxes perçus pour son compte par Israël, au motif que ce pays en déduit les salaires payés aux terroristes palestiniens condamnés à de lourdes peines de prison pour avoir perpétré des attentats sanglants.
Problème : le Qatar s’est engagé de verser sa manne jusqu’en septembre, et ne se presse pas de renouveler son offre généreuse. Oui mais quel rapport avec Israël et les ballons ? Simple. Le Hamas fait pression sur Israël pour que ce pays se tourne à son tour vers l’émir et lui demande instamment d’annoncer qu’il va continuer à dépêcher chaque mois ses émissaires et leurs valises de dollars. Il n’y a pas de relations diplomatiques entre Doha et Jérusalem ? Quelle importance ? Nous sommes au Moyen-Orient et l’absence de relations n’est pas un obstacle à des échanges d’informations, voire une solide coopération sécuritaire qui existe, nous dit-on, avec plusieurs pays du Golfe ou l’Arabie saoudite par exemple.
A Jérusalem, le message a été reçu. Le patron du Mossad serait parti hier en catastrophe faire appel au bon cœur de l’émir. Tout de même, et à tout hasard, Tsahal a bombardé dans la nuit plusieurs positions et installations appartenant au Hamas pour manifester son mécontentement. Bref, un état de choses qui aurait ravi Machiavel.
Cette situation est kafkaïenne et ubuesque. Qui est responsable ? Les responsables de la sécurité d’Israël ! A quand une équipe ou une politique qui défendent d’abord les intérêts des citoyens d’Israël et pas celui des terroristes du Hamas ?
Il serait intéressant de savoir ce qu’on peut faire – si ce n’est décapiter tout le monde tout au long de la frontière…