« Six jours on se livrera au travail ; mais le septième jour il y aura repos, repos complet consacré à Hachem » (Chemoth 31,15)
Hachem nous ordonne, dans cette paracha de Ki Tissa, de respecter le Chabbath. C’est un commandement et donc un ordre (il existe deux types d’ordres dans la Tora : les mitsvoth ta’assé, positives, faire quelque chose ; et lo ta’assé, négatives, ne pas faire).
Hachem nous ordonne ici le repos, mais pas n’importe quel repos, « un repos complet consacré à Hachem.» Que signifie cette notion de repos ?
Au sujet du Chabbath, la Guemara (Chabbath 10b ) nous enseigne : « Hachem dit à Moché : « J’ai dans Ma réserve de trésors un cadeau précieux, et son nom est Chabbath. Je veux l’offrir à Israël. Va le leur annoncer. » »
Nous voyons dans cette Guemara que ce repos, imposé par D’, est un cadeau, qui devra d’après notre verset, se répéter chaque semaine : « Six jours on se livrera au travail ; mais le septième jour il y aura repos. »
Spontanément nous pensons tous que nous arrêter de travailler pendant un jour ne peut être qu’un bien. Toute la semaine est une période de travail, de production et de création : il faut nourrir sa famille, donc gagner de l’argent. Pour cela nous avons besoin d’outils qu’il faut fabriquer, on utilise des matières premières, on les transforme, on creuse, on entrepose, on fabrique, on produit, etc. On court à droite et à gauche, pas de temps pour sa femme, ses enfants ou tout simplement pour soi. Pas le temps de se poser ni de réfléchir.
La vie est une course effrénée et tout est au service de la matérialité, il faut manger et il faut du confort ! La place réservée au spirituel est, proportionnellement, infinitésimale ! Hachem nous donne un jour pour arrêter de produire et reposer notre corps, pour nourrir notre âme de paix, de repos, et d’étude.
A première vue, nous avons une très belle mitsva, très facile à accomplir : se reposer ! Pourquoi Hachem l’a-t-Il donc imposée jusqu’à en faire un commandement ?
Nous sommes malheureusement, tous les êtres humains, ou presque, très préoccupés de notre confort matériel. L’appât du gain et les contraintes qui en découlent dont la pression et le stress, peuvent nous faire oublier que nous sommes déjà le sixième jour au soir et que nous devons tout laisser pour nous reposer. Ce repos « forcé » nous paraît irréalisable, « Impossible, je ne peux pas m’arrêter ! » Et pourtant, c’est parce que nous allons prouver notre confiance au Créateur du monde, en appliquant Ses commandements même s’ils paraissent contraignants, que nous allons bénéficier de la bénédiction.
Si ce jour n’était pas fixe et imposé, peut-être que nous l’oublierions et recommencerions une nouvelle semaine sans avoir profité de cette pause. Chabbath est la source de la bénédiction tant pour la semaine qui vient de passer que pour celle qui suit.
Sans cet arrêt, toute notre vie ne serait qu’un temps d’hyper-productivité, dénué de spiritualité. Nous serions comme des machines à faire, et l’être n’aurait pas de place.
Hachem a donc fait en sorte, afin de nous détacher complètement de notre quotidien centré sur la matérialité, de limiter nos actions pendant cette journée de Chabbath. C’est l’une des raisons pour laquelle certains voient le Chabbath comme le jour des contraintes : « Assour » de porter, « Assour » de prendre la voiture… Le Chabbath se résume donc au mot : « Assour »! Pourtant, n’oublions pas notre Guemara, parmi les trésors de Hachem, un cadeau précieux nous fut offert : Chabbath.
Comment un jour d’une telle valeur peut-il alors apparaître comme une source de contraintes ? Tout simplement parce que nous n’en avons pas compris la signification et que c’est ainsi que cela nous fut transmis !
La Guemara nous apporte une explication à notre incompréhension face à l’obligation de garder le Chabbath. « L’empereur romain demanda à rabbi Yehochoua ben ‘Hananya : « Pourquoi les mets de Chabbath ont-ils une odeur spéciale ? »
Ce à quoi il répondit : « Nous avons un condiment appelé « chévète », nous le mettons dans le plat pour lui donner une bonne odeur.
-Donne-le-nous! Répliqua l’empereur.
-II est utile pour celui qui observe le Chabbath mais pas pour les autres. »
(Au départ, rabbi Yehochoua’ avait parlé de chevet pour faire croire à l’Empereur qu’il s’agissait d’un condiment. Lorsque celui-ci lui demanda ce condiment, rabbi Yehochoua’ lui expliqua qu’il avait fait allusion au Chabbath, qui n’est profitable qu’à celui qui l’observe.)
Comme il est écrit (Ichaya/Isaïe 58,13) : « Si tu cesses de fouler aux pieds le Chabbath, de vaquer à tes affaires en ce jour qui M’est consacré, si tu considères le Chabbath comme un délice, et comme le jour saint pour l’Eternel, digne de respect, si tu le tiens en honneur en t’abstenant de suivre tes voies ordinaires, de t’occuper de tes intérêts et d’en faire le sujet de tes entretiens, alors tu te délecteras en Hachem, et Je te ferai dominer sur les hauteurs de la terre et jouir de l’héritage de ton ancêtre Ya’akov… C’est la bouche de Hachem qui l’a dit. »
Chabbath nous renforce, nous apporte l’équilibre, la sérénité. Il remet notre vie en ordre et permet à l’être de faire contrepoids à l’action.
C’est le jour où il est enfin possible d’être en famille, de chanter, de manger des plats délicieux qui ont nécessité un long temps de préparation, de se consacrer à Hachem avec de belles prières et de l’étude, et au repos, bien mérité ! Chabbath n’est pas un jour où l’on crée, c’est un jour où l’on vit.
Ces limites ordonnées par Hachem offrent un cadre restreint pour le domaine de l’action, afin d’élargir celui de l’esprit. Plus notre corps est limité, plus notre esprit grandit. Le Chabbath, nous pouvons enfin absorber les bénédictions produites par les efforts de la semaine qui vient de s’écouler, et également nous revivifier pour continuer, être capables de reprendre le temps de la production. Finalement ce sont ces interdits et ces contraintes qui constituent le vrai cadeau de Hachem.
Relisons à présent de nouveau notre verset : « Le septième jour il y aura repos, repos complet consacré à Hachem. »
Durant notre temps de repos, n’oublions pas qu’Il représente la source de toutes les bénédictions. Ainsi chaque Chabbath, chantons, mangeons, louons Hachem, étudions Sa Tora qu’Il nous a transmise dans Son infinie bonté.
Profitons de ce jour au maximum, pour jouir de la proximité avec Hachem, comme il est écrit (Chemoth 31,17) : « Entre Moi et les enfants d’Israël c’est une alliance perpétuelle » Chabbath représente un soixantième du Paradis, du Gan Eden. Hachem Seul connaît nos besoins et sait ce qui est bon pour nous, il faut simplement Lui faire confiance.
Ce commandement qui nous semblait à première vue facile et très agréable à appliquer, puis source de contraintes et oppressant, nous dévoile à présent toute sa profondeur et sa signification réelle. Comment pourrions-nous vivre sans Chabbath ? Hachem nous demande de profiter de ce jour pour nous élever et non nous laisser-aller.
Le rav Dessler zatzal souligne que ce jour de repos ne doit pas être vécu dans un état d’inertie et d’oisiveté. Il est consacré à Hachem, aux activités de Kedoucha. Mais le véritable but est de nous tenir à l’écart de nos indénombrables exigences matérielles.
Ce repos est le fait de créer un espace de sérénité à l’intérieur du quotidien tourbillonnant, ce qui constituera l’essence même de notre spiritualité et de notre contact avec la Présence révélée de D’ dans le monde.
Et, comme nous l’exprimons dans la prière de min’ha de Chabbath, il s’agit d’un : « Repos d’amour et de dévouement, repos de vérité et de foi, repos de paix, de sérénité, de quiétude et de confiance, repos de plénitude que Tu désires. Tes enfants reconnaîtront et sentiront que c’est de Toi que provient leur repos, et à travers le repos, ils sanctifieront Ton nom. »
Retrouvez d’autres cours sur la paracha Ki Tissa
Zohar Ki Tissa: En attendant la délivrance finale
Ki Tissa: Chabbath source de bénédiction
Chabat Chalom, Mordekhaï Bismuth