Nouvelle prouesse de l’intelligence artificielle (IA) en radiologie : des chercheurs d’IBM et de l’université de Haifa en Israël ont publié, ce mardi 18 juin, dans la revue « Radiology » un article scientifique portant sur un système informatique de détection du cancer du sein. « L’algorithme […] peut être appliqué pour évaluer le cancer du sein à des niveaux comparables à ceux de radiologues », indiquent les auteurs.
Le logiciel parvient à prévoir la présence d’une tumeur un an avant une confirmation par biopsie (prélèvement de tissus). Il identifie correctement le développement d’un cancer du sein dans 77,3 % des cas, et parvient à écarter les cas non cancéreux avec un taux de 87 %.
Combiner des données différentes
Pour mettre au point l’algorithme, les chercheurs ont utilisé « l’apprentissage profond ». Cette technique est à l’origine du retour en grâce de l’IA ces dernières années car elle s’est avérée très performante pour reconnaître des objets dans des images. Elle utilise pour cela des « réseaux de neurones artificiels » qui reproduisent grossièrement le fonctionnement de nos propres neurones.
Le grand avantage de cette technique est que le système apprend à se paramétrer presque tout seul. Mais pour cela, il faut entraîner la machine avec une grande quantité de données. Les chercheurs ont ici utilisé près de 38.500 mammographies de plus de 9.000 patientes.
L’algorithme a pris en compte non seulement deux types de vues différentes pour les radiographies, mais aussi un jeu de données cliniques telles que les antécédents familiaux, l’indice de masse corporelle ou l’âge. « Un des plus grands défis que nous avons rencontré pour entraîner nos modèles a été de combiner les données de trois origines différentes, explique Michal Chorev, chercheuse chez IBM, dans un communiqué de la firme . Outre des formats disparates, les données cliniques sont souvent pleines de bruit ou avec des valeurs manquantes. »
Le système s’est également montré plus pertinent que certains praticiens sur des cas difficiles : « L’algorithme a identifié correctement un cancer du sein pour 34 femmes sur 71 (48 %) pour lesquelles l’interprétation originale du radiologue avait été négative alors qu’une tumeur cancéreuse fut détectée dans l’année qui suivie », précisent les auteurs.
Cette pathologie a été découverte chez 60.000 personnes en France en 2017, et fut à l’origine de 12.000 décès la même année. Au niveau mondial, selon les derniers chiffres de l’Organisation mondiale de la santé, elle fut diagnostiquée chez 500.000 personnes en 2011.
Récemment, un autre outil d’IA, développé par le MIT a permis de détecter le cancer du sein sur une période de cinq ans avec des mammographies. L’outil a correctement catégorisé dans les cas les plus graves 31 % des dossiers pour lesquels un cancer était réellement apparu. L’année dernière, Google annonçait de son côté avoir mis au point un outil capable de distinguer une image avec ou sans cancer du sein métastatique dans 99 % des cas, une performance supérieure à celle des médecins.
Il convient toutefois de préciser que les erreurs de la machine et celles de l’humain sont sensiblement différentes, ce qui laisse supposer que l’ordinateur ne pourra pas pour le moment se passer de la supervision du médecin. Pour le diagnostic du cancer du sein, qui nécessite l’avis de deux médecins, les auteurs envisagent néanmoins que l’IA puisse se substituer à l’un d’entre eux.
Rémy Demichelis – www.lesechos.fr