L’Agoudath Israël des Etats Unis, un groupe politique orthodoxe des plus importants et des plus représentatifs dans ce pays, s’est réuni en début novembre. Le « comité des Grands de la Tora » qui le préside a demandé que soit envoyé un courrier au Président de la France, François Hollande, à propos de la continuation de la garde et du respect de toutes les tombes juives se trouvant en Algérie.
A la suite de la lettre adressée à M. Hollande par le Grand de la génération, le rav Aharon Lev Steineman, puis celle du rav ‘Hayim Kanievski dans le même sens, l’inquiétude n’a pas réellement été dissipée : aucun engagement n’a été connu de la part des autorités françaises à ce sujet, malgré le discours officiel selon lequel la décision des rabbanim sera celle qui sera suivie par la France. Or du côté rabbinique, la prise de position ferme et claire du rav Erenthreu de Londres a été exprimée dans une lettre officielle, le Grand-rabbin de Paris et le président du Consistoire ont accepté cette conclusion, et plus encore le Grand-rabbin de France.
Le rav ‘Hayim David Tzibel écrit : « Sous la direction des Grands de la Tora des Etats Unis et avec l’Agoudath Israël mondiale, je vous envoie le présent courrier pour vous faire savoir notre profonde inquiétude quant à la destruction prévue de dizaines de milliers de tombes juives en Algérie. Le compte-rendu de ce projet de réduction de cimetières et leur regroupement en une tombe générale nous trouble, et a attiré l’attention et la douleur de Juifs dans le monde entier. »
Il ajoute : « Pour la foi juive, un cimetière est un lieu saint que l’on ne peut pas détruire. Le fait que l’on s’y attaque frappe avec force nos sentiments, et va à l’encontre de nos règles. Plus encore : le regroupement de ces sites sanctifiés va à l’encontre des principes connus dans le monde entier de respect et de morale, et représente une infraction internationale au droit de chacun de se conduire selon sa foi. La douleur est encore plus forte quand il s’agit de tombes se trouvant en Algérie, anciens de centaines d’années, et que parmi eux on trouve celles de dirigeants et de sages importants de la communauté. Il ne s’agit en fait non point uniquement de cimetières de ressortissants européens, mais des derniers restes d’une communauté juive forte et respectable qui a vécu en Algérie, avec toute sa tradition. »
Tout en insistant sur la responsabilité directe du gouvernement français dans la solution à apporter à ce sujet, le rav Tzibel écrit au nom des Grands de la Tora des Etats Unis que « sur le gouvernement français repose la capacité d’éviter ce saccage. Depuis l’indépendance, la France a pris la responsabilité du sort des cimetières juifs en Algérie. Il s’agit d’une obligation humanitaire que la France a prise sur elle du fait des milliers de citoyens français, du pays et du monde entier, dont les ancêtres étaient résidants algériens. Depuis lors, la responsabilité de la France n’a fait qu’augmenter, quand les Juifs d’Algérie, après des siècles de poursuites et de violence, ont été rejetés de ce pays, et que nul ne pouvait s’occuper de ces tombes ou d’en prendre la responsabilité. Nous nous tournons en ce jour vers le gouvernement français afin qu’il ne permette pas une nouvelle poursuite des Juifs d’Algérie de se produire, entrainant une destruction ou un déplacement de leurs lieux de repos ».
Dans cette missive, l’Agoudat Israël remercie le gouvernement français et conclut : « Nous apprécions et faisons savoir notre reconnaissance face aux informations nous parvenant que la France œuvre en collaboration étroite avec les responsables rabbiniques de la communauté juive de leur pays pour amener une issue positive à ce problème en Algérie. Nous nous adressons à vous, avec respect et déférence, afin que vous continuiez à les consulter et à faire tout ce qui est possible pour entraver la profanation qui menace ces sites anciens et saints ».
Nous recevons, à la suite de la parution du présent article, la réaction suivante de l’Ambassadrice de France à Tel Aviv, Mme Helène Le Gall : « Je ne doute pas qu’une réponse y sera apportée . La France respectera la décision des autorités rabbiniques s’agissant du non déplacement de ces tombes ». Dont acte.