Tous les chemins mènent à D’…

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L’histoire de Rinat Tébéka laissera le lecteur surpris, même s’il a l’habitude de lire des histoires un peu miraculeuses. Cette jeune fille a été éduquée dans une école chrétienne française, puis envoyée chez sa grand-mère en Erets Israël. Là, elle a rencontré pour la première fois de sa vie des notions de foi, en version juive. Elle est repartie en France, et le curé qui l’a détournée de l’église la fera retourner en Terre sainte. Elle se mariera. Son médecin la prévient d’une stérilité indéniable… ce qui ne l’empêchera pas d’avoir des enfants. : « Rien n’est évident dans la vie. Il faut juste savoir remercier l’Eternel pour ce qu’on a, et même pour ce qu’on n’a pas. »

Rinat a beau être née dans une famille juive en France, elle a passé sa jeunesse dans une école catholique. Une maladie génétique l’avait rendue maigre et fragile. Ceci ne l’empêchait pas d’être une bonne élève à l’école. D’un autre côté, elle faisait attention à respecter les lois de la cacherouth, ce qui n’était pas du tout évident dans une telle enceinte, et qui la soumit plus d’une fois à des réactions de mépris. Elle en vint à plusieurs reprises à terminer la journée le ventre vide.
L’hébreu – elle l’a appris à la maison, car sa mère n’utilisait que cette langue, tandis qu’à l’extérieur, elle faisait face d’être une catholique fervente, attitude attendue d’elle. Comment son entourage acceptait-il cette dualité ?
« C’était très dur. Je faisais attention à ne rien manger d’interdit. La nourriture qu’on recevait à l’école, comprenant la plupart du temps de la viande de porc et des fruits de mer, je la distribuais autour de moi, à mes camarades non-juives. Je craignais de manger le reste. Cette conduite me valut une conduite dédaigneuse à mon égard.
– Ceci vous a rapprochée du judaïsme ?
– A mon grand regret, non ; le contraire serait plus vrai. Ces marques de mépris me rapprochèrent plus de la chrétienté ; je voulais prouver à mes camarades que j’étais comme elles, égale et identique à elles. Je ne savais pas encore qu’une personne née juive ne peut changer sa peau, quels que soient ses efforts en ce sens ».
Ces privations dans le domaine de la nourriture n’étaient pas faites pour améliorer la santé de Rinat, déjà fort faible. Avec le temps, son état se dégrada – au point qu’elle nécessita une hospitalisation suivie. Qu’est-ce qui lui a donné les forces pour tenir le coup ? « Ma grand-mère, cette tsadéqeth, décédée voici six mois ! Je ne sais pas comment j’aurais pu tenir le coup sans elle. »
Devant l’aggravation de son état, ses parents décidèrent de l’envoyer en Erets Israël, chez la grand-mère en question. La jeune fille pourrait ainsi profiter de l’air pur du pays, et se refaire une santé. « Elle était forte dans sa foi, et chez elle, j’ai appris ce qu’est la joie et la confiance en D’ – sans oublier le goût sublime de sa cuisine tunisienne. Il m’arrivait de me lever le matin juste pour la voir lever ses bras au Ciel, pour remercier D’ de lui avoir donné la vie. « Je suis ivre, non point de vin, mais de la Tora et de ses tsadiqim », me répétait-elle constamment. Le lundi, le jeudi et le vendredi, elle allumait de nombreuses bougies en l’honneur des tsadiqim, et sa porte restait toujours ouverte pour accueillir des gens. »

La grand-mère décédée : « Toute personne qui te tend la main et te demande de l’aide – donne-lui ! »

tous les chemins mènent à D'L’un des souvenirs les plus forts de cette période est celui des achats effectués avec la grand-mère, au marché, le mardi. « Le marché était plein de femmes arabes accompagnées d’enfants, assis dans un coin, qui tendaient la main pour recevoir de l’aide. Grand-mère ouvrait son porte-monnaie et leur donnait de l’argent avec largesse. Je me suis très violemment énervée contre elle à cause de cela : « Ce sont des Arabes, nos ennemis ! » lui ai-je lancé. Elle m’a tenu la main et m’a répliqué :
« « Ma fille, toute personne qui te tend la main et te demande de l’aide, donne-lui ! C’est peut-être Eliahou le prophète ? Par le mérite de l’aide que tu apportes, tu ne manqueras jamais de rien dans ta vie1. »
– Comment avez-vous réagi ?
– Je me suis tue. Que pouvais-je répondre ?
J’ai enregistré cela, je savais que ma grand-mère était une tsadéqeth. Si elle le disait, c’est qu’elle savait ce qu’elle faisait ».
Rinat séjourna quelques mois chez sa grand-mère, jusqu’à ce qu’elle doive revenir chez sa famille, qui l’attendait en France. Toutefois, l’atmosphère « goya », tout comme le climat, ne furent pas des meilleurs pour améliorer son état général. « Je suis souvent tombée malade, et mes articulations me faisaient très mal. J’ai beaucoup souffert, et mes états d’âme m’amenaient souvent au désespoir ». A cette période, de plus, divers actes antisémites commencèrent à se manifester, par-ci par-là. « Le peuple français est connu pour sa haine envers le peuple juif, et il leur suffit de voir la face d’un des nôtres pour qu’elle resurgisse tout entière. »
Malgré cela, au lieu de comprendre le message, et d’écouter l’âme juive en elle, un phénomène spécial, irremplaçable, une réalité tant détestée par les goyim – Rinat voulait de tout son être se rapprocher de ses camarades et leur ressembler.
Jusqu’au jour où elle se rendit à l’église, pour la première fois de sa vie. Le choc qu’elle y reçut ne la quittera jamais. « Je suis revenue de l’école avec mon frère Moché, et sur notre chemin, nous avons vu un grand immeuble, orné d’une croix. Nous avons décidé de nous y rendre. Nous avons avancé doucement le long d’un corridor obscur, où régnait une odeur de moisissure. De nombreux cierges allumés y étaient déposés. A notre droite, un crucifix.
A gauche, la « sainte mère », avec un enfant dans ses bras. Même si je les avais déjà vus de nombreuses fois auparavant, cela ne me fit rien, me laissa froide. »

Un passage traumatisant à l’église : « Ce n’est qu’aujourd’hui que je comprends que je me suis prosternée devant une statue »

Selon Tébéka, son impression à l’église reposait sur une étrangeté, sur une peur. Elle se tourna de tous les côtés, espérant ressentir quelque chose, mais rien. Son cœur demeurait fermé à double tour, jusqu’à ce qu’elle découvre des lettres en or connues, au-dessus de l’un des bancs. Elles représentaient le Nom de D’, tel qu’utilisé dans les livres saints du judaïsme. « Soudain, j’ai senti une grande lumière m’envahir de chaleur et d’amour. Je n’ai pas compris pourquoi, mais j’ai compris à ce moment ce que signifie ressentir la qedoucha.
bougies« Cela peut paraître surprenant, mais c’est là-bas, au centre du contraire, que j’ai été prise d’un sentiment positif, tellement bon ; que j’ai éprouvé le besoin d’allumer un cierge, et prier face à cet Etre insaisissable Que je pensais être D’, sans savoir alors que j’étais en fait en face d’une statue, pour nous l’opposé de l’Eternel – j’avais juste douze ans… »
D’un coup, une énorme ombre la couvrit. Elle se retourna, pour se retrouver nez à nez avec un curé au regard sévère. « N’es-tu pas juive ?» lui demanda-t-il. Saisie par une grande peur, et lui répondit à voix basse : « Oui ».
« En réaction, le curé me prit par le bras et me ramena à la sortie : « Sors d’ici, ma fille, ce n’est pas une place pour toi ! » »
Dehors, son frère s’en prit à elle : « Je te l’avais bien dit ». Or, elle avait vécu une expérience si forte qu’elle ne pouvait plus imaginer continuer sa vie comme chrétienne, sans poser plus de questions ou amener des arguments. « Depuis lors, j’en pleurais toutes les nuits, et je priais l’Eternel d’avoir pitié de moi et de m’aider à revenir en Terre sainte, chez ma grand-mère. Je Lui expliquais qu’ici, entourée de tous ces non-Juifs, je ne pourrais jamais vivre comme une vraie fille d’Israël. « Si Tu existes, ramène-moi en Erets et montre-moi que j’ai une place dans le monde ! » ai-je demandé. »

Quelques courts mois plus tard, Rinat put constater de visu que sa prière avait été exaucée. Entre l’aggravation de l’antisémitisme français et la traversée d’une mauvaise phase des parents sur le plan financier, la famille laissa tout derrière elle et partit, de nuit, pour Erets Israël.
Rinat ne mena pas une vie tellement plus facile dans le pays, mais sa proximité avec sa grand-mère et son immense foi lui permettait de tout prendre aisément. En quelques mois, elle se sentit transformée, redevenant juive et abandonnant toutes ses mauvaises habitudes d’auparavant.
MikveElle avait treize ans, et ne connaissait pratiquement rien du judaïsme, si ce n’est les moments d’élévation chez sa grand-mère. Que faire ? Elle se rendit à l’arrière de l’immeuble dans lequel sa famille vivait, et se mit à prier D’ de tout son cœur : « Je me souviens que dans ma prière, j’ai parlé de fiancé tsadiq, de miqwé, de respect de la pureté familiale. J’en fus moi-même stupéfaite : d’où avais-je pris ces notions, dont je ne savais pas même le sens ? »
De visite chez sa grand-mère, elle se permit de lui demander la définition de ces termes. Son interlocutrice la prit dans ses bras, et avec un regard particulier, elle lui dit : « Tu sais, ma mère, ‘Hafsia, était la responsable du miqwé. Elle habitait à sa proximité à Tunis, et tu portes son nom »…
« Je fus très enthousiasmée. Cela m’apparaissait comme une sorte de prophétie sur ce qui allait m’arriver plus tard. J’étais sûre que l’Eternel exaucerait ma prière. »

Les années passèrent. A dix-huit ans, alors qu’elle pensait s’engager à l’armée puis préparer un diplôme de modéliste à Schenker, elle rencontra celui qui, plus tard, allait devenir son mari. Comme il respectait la Tora et les mitswoth, il insista pour arriver le plus tôt possible à un mariage. Il la pressentit dès le départ comme l’épouse qui lui était destinée. « Il m’introduisit à sa famille, et leur dit : « Voici celle qui va devenir ma femme ! » D’un côté, j’étais plus que surprise qu’il parle ainsi de moi sans me connaître réellement, mais d’un autre, je vivais avec la même impression. Ce sont des choses qu’on ne peut pas expliquer. »
Quand ils dévoilèrent à sa grand-mère leur petit secret concernant leurs projets, une grande joie l’envahit, malgré le jeune âge de Rinat. « Mamie m’a donné sa bénédiction, et nous a souhaité une grande réussite. Telle était ma grand-mère, toujours là pour encourager et dire un mot positif. Son grand amour envers l’Eternel se traduisait constamment par un amour envers les autres. »
Cette grand-mère est décédée voici six mois, à l’âge de 85 ans. « Je suis certaine qu’elle a eu droit à une si longue vie uniquement grâce à sa personnalité spéciale. Elle se montrait toujours présente pour tous, et en particulier pour moi. Que sa mémoire soit bénie ! »
Les parents se trouvèrent plus difficiles à convaincre, mais finirent par accepter eux aussi l’idée du mariage. La date fut fixée, mais alors, Rinat se souvint que le fiancé n’avait pas été averti de sa maladie. « Cela m’était très difficile, car je craignais qu’il ne fasse marche arrière et abandonne ce projet.
– Une dure épreuve, en effet. Qu’avez-vous fait, finalement ?
– Je n’avais pas le choix. Avec toute la difficulté, je lui ai parlé de ce sujet, et nous nous sommes rendus ensemble à l’hôpital Tel Hachomer pour recevoir des informations sur la gravité de mon mal. Rendez-vous fut fixé avec un professeur, et, dès qu’il commença à parler, je vis noir… »
Non sans raisons : le spécialiste n’épargna aucun détail de ce qui pourrait arriver par la suite, y compris les très faibles chances de fertilité. Séchant ses larmes, Tébéka raconte : « Malgré cela, il ne s’est pas rétracté. Il a expliqué au médecin qu’il y avait un Dirigeant du monde, Lequel décidait à qui donner des enfants, et à qui non… »
Ils se marièrent donc.
Et des enfants ? « Que l’Eternel soit loué ! Nous en avons dix ! » répond Tébéka, avec un grand sourire, mais ce n’est pas tout. Vous souvenez-vous du miqwé au sujet duquel elle avait prié, à treize ans ? « Je suis une preuve que l’Eternel ne reste pas redevable, et donne à chacun ce à quoi il est destiné, au bon moment. Durant les vingt années que dure déjà notre mariage, nous avons connu de nombreux appartements, tous situés à proximité d’un miqwé. C’est également le cas de notre logis actuel, à Qiriyat Séfer …

« Rien n’est évident dans la vie. Il faut savoir remercier l’Eternel pour tout. Pour ce que nous avons, et sur ce qui nous manque. Et croire, intégrer, l’idée qu’Il écoute nos prières et les exécute.

Si l’objet de nos supplications est positif, nous l’obtiendrons sans aucun doute. Il faut juste prendre patience, c’est là le mot clé. »

(Issu du site de Hitdabrouth)

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