Syrie : « Silence, on tue »

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1300 civils alaouites morts en 3 jours

Les Syriens de confession alaouite, branche dissidente du chiisme, sont la cible depuis vendredi 7 mars de tueries d’une ampleur sans précédent depuis la chute du président Assad, le 8 décembre 2024. Pour avoir constitué, de gré pour certains, de force pour la plupart, la base du pouvoir du clan Al-Assad, ils sont jugés complices des crimes que celui-ci a perpétrés en cinquante-quatre années de règne.

« Vendredi matin, à 8 heures, des factions militaires sont entrées dans Banias avec des milices de la région, notamment de Bayda, où un massacre avait été commis du temps du régime Al-Assad. Il y avait des étrangers avec eux, des Turkmènes et des Tchètchènes. Ils ont commencé à tuer des habitants. Ils étaient partout », raconte un habitant d’un quartier alaouite de cette ville où cohabitent plusieurs confessions, située sur le littoral syrien.

« Demain, il n’y aura plus un seul homme vivant dans mon village », témoigne cet autre sur les tueries visant la minorité alaouite.

Pour info: tous les témoins ont demandé l’anonymat pour leur sécurité.

Depuis jeudi, le sang coule à nouveau dans l’ouest de la Syrie, effaçant quelque peu les espoirs de nouvelle ère née après le départ de Bachar al-Assad. L’OSDH, Observatoire syrien des droits de l’homme, a fait état dimanche de 830 civils alaouites tués depuis jeudi par les forces de sécurité syriennes et des groupes alliés, au cours de combats avec des fidèles du président déchu Bachar al-Assad dans l’ouest du pays, chiffre qui porte le bilan des violences à plus de 1.311 morts, dont 481 membres des forces de sécurité et des combattants loyaux au clan Assad, selon la même source.

La majorité des victimes seraient des civils appartenant à la minorité alaouite, dont est issu le clan Assad.

Depuis plusieurs jours, des affrontements ont lieu dans la région de Lattaquié, bastion de la minorité alaouite du président déchu, entre fidèles à Bachar al-Assad et forces de sécurité du nouveau régime. Ces combats ont été particulièrement violents jeudi soir, quand un convoi des forces de sécurité a été attaqué, faisant seize morts.

Des opérations de ratissage

Le pouvoir a dès lors envoyé des renforts et lancé des opérations de ratissage dans la région. Selon une source de sécurité, cette opération visait des membres « des milices d’Assad et ceux qui les ont soutenues et aidées » et appelé les civils à « rester chez eux ».

Si un couvre-feu a été décrété, les affrontements se sont largement déplacés des montagnes aux villes, des témoins faisant état de combats urbains, et la répression s’est étendue aux civils alaouites.

Au moins 830 civils alaouites ont été tués, des familles entières souvent.

L’OSDH a publié vendredi des vidéos montrant des dizaines de corps en vêtements civils empilés dans la cour d’une maison, des femmes pleurant à proximité. Une autre séquence montre des hommes en tenue militaire forçant trois personnes à ramper, avant de leur tirer dessus à bout portant.

Que fait le nouveau pouvoir pour mettre fin à la violence ?

Le couvre-feu et l’envoi de renforts pour les forces de sécurité n’ont pas suffi à enrayer la violence dans l’ouest de la Syrie. Depuis Damas, le président par intérim de la Syrie, Ahmad al-Chareh, a appelé à « préserver l’unité nationale, la paix civile autant que possible » et annoncé la formation d’une « commission d’enquête indépendante » chargée d’enquêter sur « les exactions contre les civils et de traduire en justice les responsables de cette flambée de violence dans un pays multiethnique et multiconfessionnel, morcelé par plus de 13 ans de guerre civile.

A l’international, on « condamne » ces « informations choquantes » desquelles l’ONU déclare qu’elles « doivent cesser immédiatement ».

A noter: Gideon Saar, le chef de la diplomatie israélienne, a exhorté l’Europe à « cesser d’accorder une légitimité au pouvoir de transition syrien » et à « se réveiller ».

Source : Tribune Juive – Illustration : fort de Banias, Syrie

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