Le Conseil central islamique suisse (CCIS) a organisé fin septembre un week-end de survie réservé aux hommes, avec apprentissage de l’utilisation du couteau…
Si Mickaël Harpon n’avait pas poignardé à mort quatre policiers à la préfecture de police de Paris au début du mois d’octobre, la presse helvétique ne se serait peut-être pas intéressée à l’agenda du Conseil central islamique suisse (CCIS). Elle a découvert ce week-end que la plus extrémiste des organisations islamistes de la Confédération avait organisé les 21 et 22 septembre dernier un camp de survie pour apprendre « la psychologie dans des situations d’urgence » et « le maniement du couteau », comme le révèle le quotidien 24 Heures de Lausanne. Le CCIS, fondé par Nicolas Blancho en 2009, en pleine campagne contre les minarets, est un habitué des provocations.
Ce converti, âgé de 36 ans, à la barbe rousse broussailleuse, se bat en faveur de l’introduction de la charia en Suisse. Il qualifie la lapidation de « valeur de ma religion ». Des propos qui feraient (presque) passer Hani Ramadan, le directeur du Centre islamique de Genève, et frère de Tariq Ramadan, auteur d’un article sur « La charia incomprise », paru dans Le Monde, pour un modéré. Certaines des actions menées par Nicolas Blancho inciteraient davantage à le classer dans la catégorie des « zozos ». Notamment son minaret gonflable lors d’un congrès du CCIS, et la distribution d’étoiles jaunes portant l’inscription « Muslim », car les musulmans de Suisse subiraient, selon lui, les mêmes discriminations que les Juifs sous les nazis…
« Le sauveur de l’islam en terre chrétienne »
Bien que le père de Nicolas Blancho soit français, le CCIS recrute principalement en Suisse alémanique. Il revendique autour de 4 000 membres, soit à peine 1 % des musulmans de la Confédération. Cela n’a pas empêché cet ancien apprenti imprimeur d’être reçu par les autorités du Koweït, puis du Qatar, et d’être présenté par la chaîne de TV par satellite Al Rayane, en 2016, comme le « sauveur de l’islam en terre chrétienne », rappelle le magazine suisse L’Illustré. Le Conseil central islamique suisse ne fait pas que de la provocation. Il a diffusé en 2015 une vidéo de 38 minutes du Saoudien Abdullah al-Muhaysini, le chef spirituel du Front Al-Nostra, la branche d’Al-Qaïda en Syrie, rebaptisée front Fatah Al-Cham. Ce qui a valu à Nicolas Blancho d’être poursuivi par le Ministère public devant le Tribunal pénal fédéral pour « propagande terroriste ».
Nicolas Blancho, qui proclame que « le terrorisme est toujours une interprétation politique », et que « l’extrémisme de droite croissant est un bien plus grand problème », a pourtant été relaxé en juin 2018. Mais le Ministère public de la Confédération a annoncé qu’il faisait recours contre cette décision. Quant à ce week-end de survie réservé aux hommes, par combien de personnes a-t-il été suivi ? Où avait-il lieu ? Qui donnait des cours d’initiation au maniement du couteau ? Autant de questions restées sans réponse. Le Conseil central islamique suisse ne répond pas aux questions des journalistes. « Il n’a aucun intérêt à contribuer à un article qui vise uniquement à le diaboliser, et avec lui l’islam et les musulmans de ce pays », déclare-t-il.
« Le nombre de ceux qui suivent activement le CCIS n’a jamais été communiqué. Je pense qu’il s’agit de quelques dizaines de personnes. Les convertis et les nés musulmans de ce groupe salafiste sont originaires de divers pays tels que le Kosovo, la Bosnie, la Macédoine, la Turquie, l’Allemagne et les pays du Maghreb », constate Saïda Keller-Messahli, présidente du Forum pour un islam progressiste, et auteur de La Suisse, plaque tournante de l’islamisme, paru en 2018.
Source www.lepoint.fr