Ma’ariv | Prof. Efraim Baram
Dans un discours exceptionnel, le secrétaire général adjoint du Hezbollah, Naïm Kassem, a reconnu une crise sans précédent au sein de l’organisation : les voies d’approvisionnement en armes depuis l’Iran sont bloquées, et pour la première fois, l’organisation s’engage à se retirer jusqu’au fleuve Litani. « C’est un moment de déclin historique », affirme le Prof. Baram.
Le discours de Kassem : le point le plus bas du Hezbollah depuis sa création
Dans un discours hors du commun marquant l’une des périodes les plus difficiles de l’histoire du Hezbollah, le cheikh Naïm Kassem, secrétaire général adjoint de l’organisation, a tenté de galvaniser les membres du Hezbollah alors que celui-ci traverse une crise sans précédent. Tout en déclarant vouloir poursuivre le combat, son discours a révélé une réalité marquée par des défaites militaires, des perturbations logistiques causées par la guerre en Syrie et, surtout, une reconnaissance explicite de la résolution 1701 des Nations unies, qui impose un cessez-le-feu et un retrait jusqu’au Litani.
Le Prof. Efraim Baram, spécialiste du Moyen-Orient, a analysé ce discours et souligné : « C’est un moment de déclin historique pour le Hezbollah. Kassem reconnaît explicitement les limites de l’organisation et son incapacité à poursuivre la guerre contre Israël comme auparavant. »
« La méthode change, mais le combat continue »
Au début de son discours, Kassem a tenté de projeter un esprit de combativité et de persévérance, mais ses propos ont révélé l’ampleur de la crise. Il a décrit la situation actuelle comme une « phase de transition » dans laquelle l’organisation modifie sa tactique pour préserver sa force. « Ce n’est pas la fin du chemin, mais une adaptation à une réalité temporaire », a-t-il déclaré, ajoutant que le cessez-le-feu avec Israël visait à « protéger ce qui a déjà été accompli ».
Le Prof. Baram a commenté : « La manière dont Kassem a tenté de justifier le cessez-le-feu montre que le Hezbollah est dans une position défensive sans précédent. Ce n’est pas le discours d’un leader dictant une politique, mais celui d’un leader essayant de sauver ce qui reste. »
Crise logistique : la fermeture des voies d’approvisionnement
Une partie essentielle du discours portait sur l’impact de la guerre en Syrie et de la révolution à Damas sur le Hezbollah. Kassem a admis que les principales voies d’approvisionnement en armes depuis l’Iran via la Syrie étaient presque entièrement bloquées, une situation qui rend la poursuite des combats extrêmement difficile. « Nous ne pouvons pas continuer comme avant », a-t-il déclaré.
Selon le Prof. Baram : « Lorsque Kassem dit cela, il révèle au monde entier, ainsi qu’aux membres du Hezbollah, que la capacité de renforcement militaire de l’organisation a été gravement affectée. C’est une reconnaissance implicite de la dépendance profonde du Hezbollah envers le soutien iranien et syrien, actuellement presque totalement interrompu. »
Kassem et la résolution 1701 : reconnaissance formelle ou défaite politique ?
La déclaration la plus surprenante du discours a été l’engagement clair de Kassem envers la résolution 1701 du Conseil de sécurité de l’ONU, qui appelle à un cessez-le-feu et au retrait des forces du Hezbollah jusqu’au fleuve Litani. « Nous nous engageons envers cet accord. Nous protégerons nos frontières et ce que nous avons construit », a déclaré Kassem.
Le Prof. Baram a noté : « C’est une reconnaissance sans précédent. Jusqu’à présent, le Hezbollah avait évité de déclarer explicitement son engagement envers la résolution 1701. Kassem comprend que s’il ne s’engage pas dans cet accord, Israël pourrait reprendre les combats, ce qui, dans l’état actuel de faiblesse du Hezbollah, pourrait signifier la fin de l’organisation. »
Cependant, cette déclaration suscite des interrogations. Le Prof. Baram ajoute : « C’est une tentative désespérée d’envoyer un message diplomatique au monde, en particulier aux États-Unis et à Israël. Kassem leur dit : ‘Nous respectons le cessez-le-feu.’ Mais cela s’accompagne aussi d’une reconnaissance implicite qu’ils ne peuvent tout simplement pas se battre maintenant. »
Un appel à la « nouvelle Damas » : un geste vain ?
Une autre partie du discours portait sur la tentative de Kassem de rallier la « nouvelle Damas » à la poursuite du combat contre Israël. « Ne laissez pas les Israéliens dicter la politique dans la région », a-t-il déclaré, dans une tentative désespérée de susciter une solidarité islamique commune, malgré les différences confessionnelles entre les sunnites de Damas et les chiites du Hezbollah.
Le Prof. Baram se montre sceptique : « L’appel à la nouvelle Damas ressemble à une tentative de s’accrocher à une chimère. Les sunnites de Damas ne considèrent pas le Hezbollah comme un partenaire naturel, et dans une réalité où le Hezbollah est affaibli, il est difficile de les voir rejoindre un combat qui est avant tout une lutte chiite. »
Le message aux membres : le discours peut-il galvaniser ?
L’objectif principal du discours était avant tout d’encourager les membres du Hezbollah, mais le ton pessimiste qui s’en est dégagé a soulevé des questions. « Nous n’avons pas d’autre choix que de nous adapter à la réalité », a déclaré Kassem, soulignant que le combat continuerait, mais sous une forme différente.
Le Prof. Baram conclut : « Ce discours est en apparence un discours de motivation, mais il s’agit en réalité d’une reconnaissance totale d’une défaite partielle. Les membres du Hezbollah entendent ici un leader qui admet les limites de l’organisation, et il n’est pas certain que cela puisse leur inspirer de l’espoir ou de la motivation. C’est un message de survie, pas de victoire. »
Le discours de Kassem marque un nouveau chapitre dans l’histoire du Hezbollah – un chapitre où l’organisation admet ses limites et s’adapte à une nouvelle réalité. Le Prof. Baram souligne : « Ce discours résume l’une des périodes les plus difficiles pour le Hezbollah. La combinaison de défaites militaires, d’isolement régional et de perturbations logistiques rend la situation insoutenable pour l’organisation. Kassem comprend qu’il n’a d’autre choix que de projeter un engagement envers l’accord, ne serait-ce que pour gagner du temps. »