Dans un article retentissant, l’expert en affaires militaires Yossi Yehoshoua pointe du doigt ce qu’il appelle : « Le prix de l’addiction au calme ». Partant du fiasco de l’évasion des terroristes, il dénonce une politique générale pratiquée sur tous les fronts par les instances sécuritaires commes les responsables politiques qui est de préserver à tout pris le calme dans les prisons, dans les villes mixtes ou sur les fronts militaires, d’éviter toute escalade, même au prix de capitulations dangereuses. En l’occurence, il s’agit des services pénitentiaires qui accordent des avantages et cèdent souvent devant les terroristes détenus afin d’éviter des vagues. Le résultat est que ces terroristes sont devenus une force de pression face aux services pénitentiaires et menacent de mutinierie ou de grèves de la faim s’ils n’obtiennent pas ce qu’ils exigent quand ce n’est pas une nouvelle Intifada à l’extérieur.
L’une des grandes erreurs commis par les services pénitentiaires dans l’affaire de l’évasion des six terroristes est qu’ils ont renoncé – sur pression des détenus – à faire usage des systèmes de brouillage des conversations téléphoniques, pourtant acquises pour des millions de shekels, ce qui a permis aux fugitifs de communiquer avec leurs complices à l’extérieur. La peur des réactions des terroristes a poussé la direction à ne pas employer ce moyen pourtant indispensable. Des geôliers témoignent eux-mêmes que le message qu’ils reçoivent de leur hiérarchie, qui elle entend les messages des responsables politiques, est qu’il faut « maintenir le calme par tous les moyens ».
Yossi Yehoshoua note le même schéma de comportement face aux menaces extérieures, comme le Hamas et le Hezbollah, où l’on cherche toujours à « avaler », à « faire le gros dos », « apaiser » ou « jouer le temps » au lieu de se mesurer à ces menaces alors qu’elles sont encore minimes.
Concernant le Hezbollah, par exemple, Yossi Yehoshoua confirme qu’il s’agit du plus grand danger pour Israël à l’heure actuelle et rappelle la fameuse phrase de l’ancien ministre de la Défense Moshé Yaalon qui affirmait que les missiles de l’organisation terroriste « finiraient par rouiller dans leurs entrepôts ». Cette théorie est vieille de plus de vingt ans, elle s’est poursuivie durant les gouvernements Netanyahou et elle est encore en vigueur à l’heure actuelle, avec la non-réaction du gouvernement Benett aux tirs d’une vingtaine de roquettes sur le nord d’Israël. Cette poitique fait que le Hezbollah dispose aujourd’hui de 150.000 missiles de toutes sortes ainsi que des drones qui peuvent atteindre n’importe quel point du territoire israélien.
Cette attitude attentiste est visible aussi face au Hamas. Depuis 2006, et après les promesses d’Ariel Sharon sur une « réaction terrible dès la première roquette », les gouvernements israéliens successifs tentent invariablement d’acheter le calme, de « clore les incidents », aux prix de cadeaux et gestes inimaginables.
« Les dirigeants – politiques et militaires – du pays veulent par-dessus tout le calme », constate l’expert militaire, qui reconnaît aussi que la société israélienne est également de plus en plus réticente à des opérations d’envergure avec comme corollaire des noms de soldats tombés qui apparaissent lors des jounaux télévisés. « Mais cela a un prix », souligne-t-il : 150.000 missiles du Hezbollah, 14.000 missiles du Hamas et des terroristes qui dictent leur volonté aux centres pénitentiaires. « Les dirigeants préfèrent leurs intérêts à court terme plutôt qu’à long terme, car cela exigerait l’élaboration d’une véritable stratégie et d’une politique sécuritaire consensuelle, ce qui n’est pas le cas ».
Un scénario qui selon lui serait encore plus difficile à voir disparaitre aujourd’hui dans un gouvernemement aux conceptions aussi antagonistes.
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