Le 2 mai 2019, le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a prononcé un discours pour marquer le troisième anniversaire de la mort de Mustafa Badr al-Din, le commandant des forces du Hezbollah en Syrie, tué près de Damas le 13 mai 2016.
Nasrallah a révélé de nouveaux aspects sur l’opération Ansariya, menée par le Hezbollah dans la nuit du 4 au 5 septembre 1997 contre un commando israélien de la marine israélienne opérant au Liban.
Nasrallah a précisé que le Hezbollah avait réussi à intercepter, en temps réel et sur une période de deux semaines, des images transmises par un drone israélien montrant la zone du débarquement désignée par un commando d’éclaireurs israéliens.
De ce fait, le Hezbollah a préparé dans une zone couverte de vergers plusieurs embuscades.
La stratégie de Nasrallah et de Badr al-Din, chargé de l’opération, était de préparer une embuscade aux éclaireurs-combattants israéliens qui avaient atterri sur le rivage et y étaient revenus à plusieurs reprises. Dès le départ, le Hezbollah était convaincu que Tsahal préparait une opération plus vaste, et donc il décida d’attendre patiemment, de suivre le pas des éclaireurs mais d’éviter à tout prix de les attaquer.
Badr al-Din (à droite) avec le commandant de la Force el Qods, Qasem Soleimani (Arab Press)
Mustafa Badr al-Din et Imad Mughniyeh, chef des opérations de la milice chiite, se sont eux-mêmes rendus sur le terrain pour préparer une embuscade contre une opération israélienne qui serait, selon eux, menée probablement de nuit. Soulignons que sur le lieu choisi venaient travailler, du lever du soleil jusqu’au soir des agriculteurs cultivant les vergers.
Chaque nuit, les forces du Hezbollah plantaient des engins explosifs et attendaient impatiemment les forces israéliennes. Le lendemain matin, les engins explosifs étaient démantelés car les commandos israéliens n’étaient point au rendez-vous. Selon Nasrallah cela a duré plusieurs longues journées jusqu’à la nuit fatale du 4 au 5 septembre 1997.
12 soldats israéliens ont été tués lors de cette embuscade et quatre autres furent grièvement blessés.
Depuis cette nuit, Mustafa Badr al-Din est considéré comme un héros et est entré dans le panthéon des chefs militaires du Hezbollah.
Plus tard, en juin 2011, Badr al-Din fut traduit en justice – avec d’autres membres du Hezbollah – par un tribunal spécial libanais chargé de l’enquête sur l’attentat perpétré en février 2005 contre l’ancien Premier ministre, Rafic Hariri.
Deux ans plus tard, lorsque le Hezbollah a envoyé ses forces en Syrie dans le cadre du soutien de l’Iran au régime d’Assad, Mustafa Badr al-Din fut nommé commandant des forces du Hezbollah en Syrie. La guerre fut très rude contre les rebelles, et le Hezbollah a subi de nombreuses pertes. Les corps des combattants furent rapatriés clandestinement au Liban et enterrés dans la nuit noire. Les chiites libanais protestaient amèrement en constatant que leurs fils mourraient dans une guerre qui n’était pas un djihad contre Israël, mais étaient en réalité exposés à être tués, chair à canon pour les ambitions hégémoniques de l’Iran.
Les funérailles de Badr al-Din (tv iranienne, YouTube)
Mustafa Badr al-Din a été tué en mai 2016 dans des circonstances demeurant obscures jusqu’à ce jour. Il aurait été touché par des tirs d’artillerie ou par un missile dans l’une des bases du Hezbollah située près de l’aéroport de Damas, un projectile l’a étrangement frappé mortellement.
Dans un communiqué officiel, le Hezbollah a affirmé qu’il avait été tué par les tirs des rebelles. La commission d’enquête mise en place par le Hezbollah n’est parvenue à aucune conclusion définitive. Selon certaines informations diffusées dans la presse arabe, sa mort fut la cause de sévères rivalités internes au sein du Hezbollah – et plus particulièrement des exigences du commandant de la Force el Qods, Qasem Soleimani. Ce dernier avait rencontré Badr al-Din quelques heures avant sa mort dans un bâtiment situé près de l’aéroport de Damas.
Dans son récent discours, Nasrallah n’a pas évoqué les circonstances de la mort de Badr al-Din en Syrie, mais n’a pas blâmé Israël ni les rebelles. Il n’a pas promis non plus de venger la mort de celui qui fut le plus haut gradé des commandants militaires du Hezbollah après Imad Mughniyeh.
Le 21 mars 2017, le chef de l’état-major israélien, le Général. Gadi Eizenkot, avait déclaré que les informations faisant état de l’assassinat de Badr al-Din par les Iraniens concordaient avec d’autres fournies par Israël et témoignaient de l’ampleur de la crise au sein du Hezbollah.
Cette année encore, aucune cérémonie n’a eu lieu en Iran pour commémorer la disparition de Mustafa Badr al-Din. Le ministre des Affaires étrangères, Javad Zarif, s’est contenté d’une courte missive adressée à Hassan Nasrallah dans laquelle il lui rendait brièvement hommage. Les Gardiens de la révolution ont également gardé un mutisme complet.
Tout ce manège contraste particulièrement avec les cérémonies, en grande pompe, commémorant l’anniversaire de l’assassinat d’Imad Mughniyeh…
Shimon Shapira – jcpa-lecape.org