Cette institution internationale est critiquée de longue date pour sa politisation. Comme dans le cas de leur retrait de l’UNESCO, les États-Unis dénoncent notamment une focalisation sur la question israélienne, l’État hébreu étant particulièrement visé par les recommandations du conseil des droits de l’homme.
Les États-Unis ont décidé, ce mardi, de quitter le Conseil des droits de l’homme de l’ONU. L’ambassadrice américaine aux Nations unies, Nikki Haley, a fait valoir que cette institution prenait notamment une position partisane systématiquement défavorable à Israël. Aux côtés du chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo dans les locaux du département d’État, elle a accusé la Russie, la Chine, Cuba et l’Égypte de s’être opposés à la volonté des États-Unis de réformer le Conseil.
La critique américaine de ce conseil onusien est ancienne. Dès 2006 lors de sa création, George W. Bush n’avait pas voulu que son pays rejoigne cette nouvelle entité, qui prenait la succession de la commission pour les droits de l’homme, jugée déjà trop partiale et politisée. Il a fallu attendre 2009 pour que Washington, sous le mandat de Barack Obama, finisse par rejoindre le conseil des droits de l’homme.
● Le conseil des droits de l’homme et la question israélienne
Cette institution «se focalise de manière excessive et entretient une hostilité sans fin à l’égard d’Israël», a déclaré Nikki Haley. C’est, selon elle, «la preuve évidente que le Conseil est animé par des intentions politiques et non par les droits de l’homme». Le Conseil des droits de l’homme a un point permanent à l’ordre du jour sur les soupçons de violations des droits de l’homme commises par Israël dans les territoires palestiniens, que Washington voulait supprimer. L’État hébreu est le seul pays à faire l’objet d’une telle surveillance, spécificité déjà critiquée en 2008 par le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon.
Depuis le début de ses activités, le conseil des droits de l’homme a émis 78 recommandations visant l’État hébreu pour son rôle dans le conflit israélo-arabe, soit plus que celles visant l’ensemble des autres États du monde. Une focalisation dénoncée par Tel-Aviv, qui a quitté l’institution onusienne dès 2012 et dont le premier ministre, Benjamin Nétanyahou, a salué ce mardi les États-Unis pour l’annonce de leur retrait. Washington avait également annoncé leur retrait de l’UNESCO en octobre dernier, estimant là aussi que l’organisation internationale était «anti-israélienne».
Le retrait américain ne devrait pas changer le fonctionnement du conseil sur la question israélienne, mais pourrait indirectement influencer le cours des négociations entre Israël et la Palestine. En mettant en avant ce qu’elle dit être un préjugé contre Israël, l’administration Trump pourrait renforcer les arguments des Palestiniens selon lesquels Washington, qui se prépare à présenter un plan de paix au Proche-Orient, ne peut pas être considéré comme un médiateur neutre.
● Une politisation critiquée
L’administration Trump menaçait depuis longtemps de quitter cette institution si elle n’était pas réformée. Les États-Unis souhaitaient notamment faciliter l’éviction du conseil des États ne respectant pas les droits de l’homme de façon flagrante. Un tel renvoi nécessite actuellement un vote à la majorité des deux tiers des 193 membres de l’Assemblée générale des Nations unies. «Le Conseil des droits de l’homme permet des abus en exonérant les malfaiteurs par le silence et en condamnant faussement ceux qui n’ont commis aucune infraction», a estimé Mike Pompeo.
Le Conseil des droits de l’homme se réunit trois fois par an pour examiner les violations des droits de l’homme dans le monde. Il dispose d’enquêteurs indépendants pour examiner des situations telles que la Syrie, la Corée du Nord, la Birmanie ou le Soudan du Sud. Par ailleurs, dans le cadre d’une procédure dite d’«examen périodique universel» dont le cycle dure quatre ans, tous les États siégeant à l’Assemblée générale de l’ONU sont soumis à un contrôle. «Mais les recommandations du conseil n’ont qu’une force morale, puisqu’elles ne sont pas contraignantes», explique au Figaro l’historienne Chloé Maurel, chercheur associé à l’ENS-Ulm. «Washington ne comprend pas que certains pays ne soient pas inquiétés», explique la spécialiste de l’ONU qui évoque une «politisation presque inévitable dans toutes les institutions internationales».
Preuve s’il en est de cette politisation, les États-Unis chargent ce mardi des pays avec lesquels ils entretiennent de fortes rivalités (Chine, Cuba, Venezuela), mais ne citent pas le cas de son principal allié arabe au Moyen-Orient, l’Arabie Saoudite, vivement critiquée en 2015 pour avoir pris la direction du «groupe consultatif» au sein du Conseil des droits de l’homme.
● Un impact pour les finances du conseil des droits de l’homme
«Comme pour l’UNESCO, le retrait américain pourrait également avoir un impact sur les finances du conseil des droits de l’homme», estime Chloé Maurel. Le budget de cet organisme onusien – environ 250 millions de dollars en 2017 – est financé à 40% par le budget général de l’ONU et à 60% par les contributions volontaires des États membres. Or les États-Unis apportaient jusqu’à maintenant la plus forte contribution – 20 millions de dollars. C’est donc un peu moins de 10% du budget du conseil de l’Europe qui pourrait être amputé dès l’année prochaine.
Source www.lefigaro.fr