Rabbi de Kalov sur Yom Kippour

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Lettre de l’Admour de Kalov, Yom Kippour 5785

Mon vénérable ancêtre, rabbi Its’hak Eizik de Kamarna, que son mérite nous protège, rapporte dans son ouvrage Otsar Ha’haïm un récit dont son beau-père, rabbi Avraham Mordekhaï de Pintchov, lui avait fait part : un jour de Roch Hachana, les élèves du Baal Chem Tov, étaient en pleine prière du Chemoné Essré, lorsqu’une boîte de tabac de l’un des élèves tomba à terre et il la ramassa. Lorsque son ami le remarqua, il en fut très fâché : comment s’était-il interrompu dans sa prière pour le plaisir de respirer l’odeur du tabac ? Il était furieux contre son ami. Le Baal Chem Tov vit de manière prophétique que la colère de ce Tsadik entraîna son ami à être l’objet d’un décret sévère cette année-là.

Le Baal Chem Tov tenta d’intervenir dans le Ciel en invoquant divers arguments pour adoucir le jugement, mais sans succès, jusqu’à Hochaana Rabba, lorsqu’il tenta à nouveau d’intervenir, de s’écrier et d’implorer pour l’abolition du décret sévère. Il réussit à obtenir grâce à sa prière que si l’accusateur trouvait un mérite à son ami, ce dernier échapperait à la peine de mort.

L’élève, le soir de Roch Hachana, était plongé dans ses réflexions lorsqu’il médita sur les origines du phénomène du tabac à respirer et à fumer qui était apparu récemment, réfléchissant au but pour lequel Hachem l’avait introduit dans le monde. Au bout de quelques minutes, il parvint à la conclusion qu’il existe des âmes précieuses à son époque qui doivent être réincarnées à nouveau dans ce monde pour rectifier ce qu’elles avaient abîmé ; ne pouvant redescendre sur terre sous forme humaine, leur rectification essentielle a lieu lorsqu’ils se glissent dans l’odeur de plantes, qui est spirituelle. Tout en réfléchissant à ce sujet, cet élève se remémora l’incident où son ami avait soulevé la boîte à tabac en pleine prière de Roch Hachana, et il regretta sa conduite d’alors et le jugea favorablement, saisissant qu’il avait contribué à l’élévation d’une âme grâce au tabac, en pleine Téfila.

Ensuite, à Hochaana Rabba, cet élève rapporta à son maître l’essentiel des idées qu’il avait élaborées et le Baal Chem Tov lui répondit : « Détaille davantage ce que tu as eu alors à l’esprit ». L’élève expliqua qu’il avait trouvé une manière de juger son ami favorablement. En entendant cela, le Baal Chem Tov se réjouit beaucoup et lui révéla que par sa colère, il avait entraîné une accusation sur son ami, et désormais, par le biais de ce jugement favorable, l’accusation était abolie. Le Baal Chem Tov mit en garde son élève en l’enjoignant de juger désormais chacun favorablement, pour bénéficier ainsi de bienfaits dans ce monde et dans le suivant ; dans le cas contraire, lorsqu’il juge quelqu’un d’autre sévèrement, il entraîne des jugements sévères à son encontre, et de plus, il souffrira lui-même, car dans le Ciel, on le jugera de manière défavorable sur ses fautes, comme l’indique ce texte de nos Sages (Sanhédrin 90a) : la conduite de Hachem est mesure pour mesure. Ce concept est essentiel en période de détresse, car il faut s’évertuer à trouver des mérites à chaque Juif, éprouver de la compassion pour lui et lui épargner tout mal.

Ainsi, mon vénérable ancêtre, rabbi Its’hak Eizik de Kamarna, rappelle dans son ouvrage Hékhal Haberakha, qui s’appuie sur l’ouvrage Tomer Deborah, que dans une telle situation, il faut s’attacher au 9ème attribut parmi les 13 Attributs de Miséricorde, qui est : « Jeter dans les profondeurs de la mer toutes les fautes » : il faut jeter toutes nos fautes, grâce au fait qu’on est jugé favorablement.

C’est pour cette raison que les membres de la tribu de Dan furent choisis pour devenir « l’arrière-garde de tous les camps » (Bamidbar 10,25), c’est-à-dire qu’ils se trouvaient à l’arrière de toutes les tribus et aidaient tous les faibles et les traînards (Rachi sur Yechayahou 52,12), car ils se distinguaient particulièrement dans cette vertu de juger favorablement, comme il est dit (Beréchith 49,16) : « Dan sera l’arbitre de son peuple, sous lui se grouperont les tribus d’Israël » : ils jugeaient un homme du peuple au même titre qu’un membre éminent des tribus ; ils se sacrifiaient pour aider chacun, sans aucune exception, et ils profitèrent ainsi d’une protection supérieure et d’une aide divine conséquente grâce à cette qualité. Lorsqu’un homme s’habitue à juger favorablement son prochain, il en vient à juger également favorablement ceux qui lui causent des tourments, il leur pardonne leurs offenses et fait preuve d’indulgence, et par ce mérite, sa prière a une force particulière, comme nous le voyons ici (Ta’anit 25b) : un jour, lors d’une sécheresse, rabbi Akiva fit une courte prière et aussitôt, la pluie tomba.

Une Bat Kol (voix céleste) annonça que sa prière avait été exaucée directement, car il traitait autrui avec indulgence. Mon vénérable ancêtre, rabbi Yehouda Tsvi de Razla, accomplissait des prodiges, mais il avait des détracteurs qui lui causaient beaucoup de tort. Un jour, ses proches et sa famille l’interrogèrent : puisqu’il possédait une grande force, dans ce cas, pourquoi ne l’utilisait-il pas pour punir et réduire au silence ses détracteurs ?

Mon saint ancêtre répondit avec sagacité : « Toute ma force vient d’eux, qui me causent des tourments alors que je garde le silence ; or, si je les punis, je perdrais instantanément toute ma force. » Chaque Juif qui s’inspire auprès des Tsadikim de cette vertu de renoncement, qui, en étant humilié, ne répond pas, allège les peines décidées à son encontre. En effet, Hachem se conduit avec lui mesure pour mesure, en évitant de le traiter avec l’attribut de la stricte justice pour ses fautes à l’égard de D.ieu, comme l’indiquent nos Sages : « Toute personne qui est indulgente voit ses fautes traitées avec indulgence, comme il est dit (Chemoth 34,7) : « Il supporte le crime, et passe sur la rébellion : celui qui supporte le crime ferme les yeux sur le crime. » Il est écrit dans les ouvrages sacrés (Kedouchat Lévi) que le Baal Chem Tov attirait l’attention du peuple sur ce verset (Tehilim 121,5) : « Hachem est ton ombre » : tout comme ton ombre imite chacun de tes mouvements, de même, le Créateur, loué soit-Il, se conduit avec l’homme de la même façon que ce dernier se conduit avec son prochain. Les décisionnaires nous mettent en garde : la veille de Yom Kippour, l’homme doit veiller à éviter la cruauté et pardonner à ceux qui l’ont offensé, car le pardon est la préparation indispensable pour être acquitté au jour du jugement.

Nous pouvons en trouver une allusion dans le terme Yom Ki-pourim : ce jour-là, il convient de se conduire comme à Pourim : tout comme à Pourim, c’est une Mitsva de multiplier les gestes de paix et d’unité par l’envoi de Michlo’hé Manoth et de cadeaux aux pauvres, de même à Kippour, il faut accroître l’union en apprenant à juger les autres favorablement et à leur pardonner leurs offenses, car par ce mérite, les prières seront agréées avec miséricorde et nous mériterons d’être inscrits et scellés dans le Livre de la Vie.

Gmar ‘Hatima Tova !

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