Avant de consommer la matsa et le maror, prenons un instant pour nous imprégner du message profond qu’ils véhiculent.
La matsa, surnommée dans le Zohar Hakadoch le pain de la émouna, n’est pas qu’un simple aliment. En la mangeant, nous nous connectons à une foi pure et profonde — une “émouna intraveineuse”, une consommation spirituelle puissante et nourrissante.
Le maror, quant à lui, symbolise l’amertume de l’esclavage, les épreuves, la douleur. Et pourtant, il nous enseigne que même ces moments difficiles viennent d’Hachem, et qu’ils ont un sens.
Ces deux aliments si différents font chacun l’objet d’une bénédiction spécifique :
« Al akhilat matsa » et « Al akhilat maror ».
Un détail subtil mais profond : les initiales de la fin de ces deux bénédictions — א, ע et מ — forment les lettres du verset “אין עוד מלבדו” (Il n’y a rien d’autre que Lui). Cela nous enseigne que, même séparés, la émouna (matsa) et les épreuves (maror) sont liées : tout vient d’Hachem.
Encore plus fort : chacune de ces bénédictions est composée de 13 mots, un nombre qui correspond à la guematria du mot “E’had” (Un). Deux bénédictions, deux fois 13 mots : ensemble, cela fait 26, soit la valeur numérique du Nom d’Hachem (י-ה-ו-ה). Une manière de rappeler que l’unité, même dans la diversité, révèle la présence divine.
Et c’est justement ce que symbolise le korekh, ce fameux sandwich où la matsa entoure le maror. On mange la matsa accoudé, en signe de liberté. Le maror, lui, ne se consomme pas accoudé, car il évoque l’amertume. Mais pour le korekh, on s’accoude. Pourquoi ? Le Rav Biderman répond : Lorsque l’amertume est entourée de émouna, on peut s’accouder. On peut trouver la sérénité au sein même de l’épreuve.
Le mot כורך (korekh) lui-même cache un message :
כו = 26, le Nom d’Hachem,
רך = doux.
Tout ce que fait Hachem est douceur, même si parfois cela semble amer.
Enfin, pensons à la harosset, dans laquelle on trempe le maror. Elle rappelle le mortier de l’esclavage, mais son nom חרוסת contient aussi le mot חרות (liberté), accompagné de la lettre ס (samekh), allusion au mot סומך (somekh), « Celui qui soutient », comme il est dit dans les Tehilim (145) : « סומך ה’ לכל הנופלים » — Hachem soutient tous ceux qui tombent. Même dans l’épreuve, Hachem est là. Il nous porte, Il nous guide.
En mangeant la matsa, le maror et le korekh, souvenons-nous : la foi donne un sens à la douleur, la lumière se cache parfois dans l’obscurité. Et surtout — tout vient d’Hachem, tout est pour notre bien, même si nous ne le voyons pas encore.
Mordekhaï BISMUTH