« Le procès Klaus Barbie, Lyon, 1987 », au Mémorial de la Shoah

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Jeudi s’est ouvert au Mémorial de la Shoah l’exposition Klaus Barbie, le procès. Lyon 1987, marquant le 30ème anniversaire du retentissant procès de l’ancien criminel de guerre nazi, chef de la Gestapo de Lyon de 1943 à 1944.

Premier procès pour crime contre l’humanité en France, filmé par quatre caméras qui vont, pour la toute première fois, enregistrer les 157 heures d’un « procès-spectacle » ouvert le 11 mai 1987, l’exposition retrace les 37 jours d’audience au cours desquels défileront à la barre quelques 107 témoins et 42 avocats.

Après des fonctions à Amsterdam, Klaus Barbie entre à la Gestapo de Lyon en novembre 1942, avant d’en prendre la direction quelques mois plus tard. Zélé et violent, le « boucher de Lyon », comme on le surnomme, fait régner la terreur dans une ville qui désormais ne connaît plus qu’arrestations, rafles et exécutions, une cruauté qui atteint son point d’orgue le 6 avril 1944 lorsqu’il ordonne l’arrestation et la déportation des 44 enfants de la maison d’Izieu. Âgés de 4 à 17 ans, ils seront envoyés à Auschwitz et gazés dès leur arrivée. Ce macabre événement, jusque-là peu connu, va refaire surface et s’afficher en une des journaux du monde entier.

Conservée au Mémorial de la Shoah, la pièce maîtresse de l’accusation, le télégramme envoyé par Barbie après la rafle des enfants d’Izieu, dans lequel il annonce à la Gestapo la liquidation de ce foyer d’enfant juifs, y est présenté pour la première fois.

Fin 1944, dans le chaos de la Libération, Klaus Barbie parvient à s’enfuir en Allemagne où, bien qu’arrêté à plusieurs reprises, il parvient toujours à cacher son identité.

Criminel de guerre recherché par la France, bourreau, tueur d’enfants, ce lourd passif n’empêchera cependant pas les services du contre-espionnage américain d’engager discrètement le « boucher de Lyon » de 1947 à 1951, dont l’expérience contre la résistance et la traque des Juifs présente pour l’Amérique de Truman un atout considérable dans sa lutte contre le communisme. Une Amérique décidément bien protectrice puisque ce sera également avec son concours qu’en 1951, grâce à un passeport de la Croix Rouge internationale, Klaus Barbie sera exfiltré d’Allemagne, et s’installera en Bolivie sous le nom de Klaus Altmann, où il collaborera avec la junte militaire au pouvoir.

Mais lorsqu’en juin 1971, le parquet de Munich décide d’un non-lieu en faveur de Klaus Barbie, Serge et Beate Klarsfeld vont se mobiliser pour faire rouvrir le dossier.

Toujours recherché mais introuvable, ce sera la demande de visa de sa fille Ute pour l’Allemagne qui fera revenir l’ex-chef de la Gestapo de Lyon à la surface. Désormais, Berlin sait où se cache Klaus Barbie. De juin 1971 à février 1983, les époux Klarsfeld vont traquer sans répit l’ancien criminel nazi, accomplissant un véritable périple en vue de de réclamer son extradition de Bolivie. Serge Klarsfeld envisagera même de l’enlever, comme ce fut le cas vingt-six ans plus tôt en Argentine pour Adolf Eichmann. A la faveur d’un changement de régime politique, après une fuite de quarante années, Klaus Barbie est finalement extradé et remis aux autorités françaises le 5 février 1983.

Cependant, les crimes de guerre pour lesquels il a déjà été condamné sont prescrits depuis 1974. Il incombe donc au juge d’instruction de rechercher de nouveaux éléments susceptibles d’être qualifiés de crime contre l’humanité afin de rouvrir le procès.

Après sept semaines d’un procès à la résonance internationale, Klaus Barbie sera finalement reconnu coupable de la rafle de 84 personnes à l’UGIF de Lyon en février 1943, de l’arrestation et la déportation des 44 enfants juifs d’Izieu, ainsi que de celle de 650 autres en août 1944.

Des faits qui lui seront reproché, Klaus Barbie assurera ne se souvenir de rien, prétendant même ignorer le sort réservé aux hommes, femmes et enfants qu’il déportait, et refusera de se rendre au tribunal dès le troisième jour du procès.

Klaus Barbie sera reconnu coupable de dix-sept crimes contre l’humanité – c’est la première fois que ce chef d’accusation est retenu en France –, condamné à la réclusion criminelle à perpétuité le 4 juillet 1987, et décédera à la prison de Lyon en septembre 1991.

Passeport délivré par la Croix Rouge en 1951, carte de service du lieutenant-colonel honoraire Klaus Altmann au sein de l’armée bolivienne, unes de journaux et de magazines, affiches, bandes magnétiques, procès-verbaux, mandat d’arrêt international émit en novembre 1982, coupures de presse et photos inédites, extraits vidéos, mais aussi le colossal rapport d’Allan Ryan sur les relations qui liaient Klaus Barbie au gouvernement américain, sans oublier le télex original envoyé suite à l’arrestation des enfants d’Izieu, et pour la toute première fois l’intégralité des 157 heures du procès, consultable jour par jour, audience par audience, avec accès aux comptes-rendus, auditions des témoins, etc., ce sont des centaines de documents, fac-similés ou orignaux, qui sont ici présentés au public – dont certains pour la première fois -, proposant de découvrir – ou redécouvrir -, trente ans après, l’une des affaires judiciaires françaises les plus retentissantes.

Un procès d’assises ordinaire pour un accusé extraordinaire. Un travail colossal pour la Mémoire.

Le procès Klaus Barbie. Lyon, 1987, jusqu’au 13 octobre 2017 au Mémorial de la Shoah.

Source http://cultures-j.com/le-proces-klaus-barbie-lyon-1987-au-memorial-de-la-shoah/

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