Prisons: 75% des condamnés pour terrorisme sortiront d’ici à 2022

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3d interior jail

Les inquiétudes autour des « sortants » avaient contraint Edouard Philippe à lancer, en juillet dernier, une cellule spécifique chargée de suivre les détenus terroristes ou radicalisés à leur sortie de prison. Hébergée par l’unité de coordination de la lutte antiterroriste (Uclat), cette structure monte en puissance. A temps, estiment des spécialistes du dossier. Sur 196 terroristes définitivement condamnés, 22 sortiront d’ici à la fin de l’année et plus de la moitié seront libérés en 2020. D’ici à 2022, 75 % des condamnés pour terrorisme auront purgé leur peine.

Le spectre des détenus surveillés pour velléités terroristes est plus large. Derrière les barreaux, plus de 500 terroristes islamistes (prévenus ou condamnés pour association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste) entrent dans cette catégorie sensible. S’ils présentent des degrés de dangerosité variable (velléitaires, retournés ou menaces endogènes), leur nombre a été multiplié par quatre en quatre ans — au 1er janvier 2015, 166 terroristes étaient suivis par le renseignement pénitentiaire.

Il y a en outre les détenus pour des faits de droit commun suivis pour radicalisation. Selon une source pénitentiaire, 920 sont susceptibles de commettre un acte violent et constituent donc un « intérêt » pour le renseignement. Parmi eux, 600 sont fichés au fichier FSPRT et 300 sous l’œil de l’administration pour évaluation. C’est moins qu’il y a quelques années (1 700 fin 2016), en raison de l’intensification des condamnations pour des faits de terrorisme (514 en 2019) qui font basculer ces détenus dans la première catégorie statistique.

« Avec la surpopulation carcérale, on est dans la volumétrie plutôt que le marquage à la culotte »

« L’administration pénitentiaire a toujours un coup de retard », s’inquiète Wilfried Fonck, secrétaire national d’Ufap-Unsa Justice pénitentiaire. « L’islam radical se développe dans les prisons depuis les années 2000. On ne s’alerte pas quand des détenus se promènent en djellabas dans la coursive. Au final, l’administration est débordée et le temps de contrecarrer, on a perdu entre cinq et dix ans. » Il avait fallu les attentats de 2015 pour qu’une loi – promulguée le 3 juin 2016 – fasse entrer le renseignement pénitentiaire dans la communauté nationale du renseignement. Lancé en 2017 par Jean-Jacques Urvoas, il vient d’être réorganisé par Nicole Belloubet pour devenir un service à compétence nationale.

« Le plus radicalisé ne porte pas la plus longue barbe », relève un responsable pénitentiaire, en rappelant le cas type d’Amedy Coulibaly. Le terroriste de l’Hypercacher en 2015 avait passé cinq ans en détention pour avoir participé à la tentative d’évasion de l’artificier des attentats de 1995, alors emprisonné à la maison centrale de Clairvaux. « Il était passé sous les radars parce qu’il collait complètement aux attentes de l’administration carcérale : attitude exemplaire et formation professionnelle », énumère cet interlocuteur. A l’inverse, après la prise d’otage de deux surveillants à la prison de Condé-sur-Sarthe début juin, l’administration indiquait que l’auteur Francis Dorffer était « suivi pour radicalisation »… Il s’agissait en fait de troubles du comportement sans revendication politico-religieuse. « Avec la surpopulation carcérale, on est dans la volumétrie plutôt que le marquage à la culotte », regrette Wilfried Fonck, peu optimiste. Des difficultés qui risquent, elles aussi, de rejaillir à l’extérieur des prisons.

Source www.lopinion.fr

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