Autour de la table de Chabbat, n° 395 VAETHANAN
Prier et prier encore…
Le début de la paracha mentionne que Moché Rabbénou a prié afin d’entrer en Erets Israël. Nous sommes la dernière année de la traversée du désert. La Guemara dans Sota 14 explique que l’intention de Moché n’était pas de voir les beaux paysages du littoral, mais uniquement de pratiquer la Tora et les Mitsvoth propres à la Terre sainte. Par exemple les prélèvements, Teroumoth et Ma’asseroth, ou les lois de la Chemita (7° année).
Les commentateurs, Ba’alé Tossafoth, enseignent un intéressant ‘Hidouch (nouveauté). Moché a fait 515 prières pour entrer en Erets, car la valeur numérique de VAHETANAN c’est 515 ! La Guémara dans Berakhoth enseigne, au nom de rav ‘Hanina, « si un homme prie et pourtant n’a pas été écouté par Hachem, qu’il revienne et recommence ! » Comme le Psaume le dit : « Espère en Hachem, renforce ton cœur et espère (à nouveau) en Hachem ! » C’est-à-dire qu’un homme ne doit jamais désespérer du fait qu’il n’a pas été écouté une première fois ! Et c’est certainement pour cela qu’on a l’habitude de réciter ce passage après la prière du matin pour nous signaler que même si on a déjà fini sa Tefila il faut continuer à demander ! Seulement on pourra se demander si Hachem a tant besoin de nos nombreuses prières ? Or, D’ écoute chaque prière et n’a aucune difficulté à l’exhausser ! Plusieurs raisons seront proposées.
Le ’Ein Yacov enseigne un ‘Hidouch, c’est que peut-être au moment de notre Tefila c’était un moment de colère dans les Cieux ! Donc la prière a dû être bloquée.
Autre manière de répondre, afin que notre prière soit acceptée, il faut parfois une raison quelconque. Parfois l’homme n’a pas de mérite particulier pour que sa demande soit agréée ! Donc le fait de recommencer, c’est montrer qu’on est conscient que la clef de notre problème est dans les mains du Tout Puissant ! C’est dire en quelque sorte à D’ : « Je sais que tout provient de Toi ! Donc aide-moi par le mérite de la confiance que je place en Toi et en nul autre ! » Multiplier notre prière, marque notre confiance en Hachem !
Le Méiri (Yoma 29) dit : « Un homme doit toujours faire attention de bien prier et même s’il voit qu’il n’a pas été exaucé. Il ne doit pas désespérer ! Car en multipliant la Tefila, il trouvera la solution ! Et un homme ne doit pas considérer qu’il importune Hachem par le fait de multiplier ses prières ! Le Midrach enseigne que les Tsadikim ressemblent aux boucs. En grandissant, les cornes de cet animal des montagnes développent des sortes d’anneaux. De la même manière au fil du temps, la prière des tsadikim s’affine et elle sera écoutée ! »
Une autre manière de comprendre ce phénomène c’est à l’image du père avec son fils. Lorsque le bon fils demande au père un cadeau, ce n’est pas sûr que du premier coup le père acceptera la demande (à moins qu’il se soit particulièrement bien distingué dans une matière en classe). Mais si le fils demande et redemande sans arrêt, alors d’une manière naturelle le père ne restera pas indifférent aux doléances du fils ! Car finalement un père est particulièrement content lorsque sa progéniture se tourne vers lui pour lui demander son aide ! Donc lorsque l’on prie et reconduit notre demande on montre en cela une proximité avec Lui ! C’est ce qu’Il attend de nous !
Par le mérite du Pardon…
Cette semaine je vous présente un très intéressant sipour véritable (qui s’est déroulé l’année dernière) qui sera une clef pour accéder à la consolation des semaines de deuil du 9 Av. Il s’agit d’un Avrekh (une personne qui se dévoue à l’étude de la Tora pour le bien être de toute la population habitant la Terre sainte et du monde entier, même si les nouveaux dirigeants du pays pensent différemment. Et c’est dommage…) s’appelant Yossef qui habite la ville de Beth Shemech. Notre reb Yossef a pour voisin un instituteur d’une école religieuse se nommant Chelomo. Un jeudi soir, on frappa à la porte de Yossef, c’est Chelomo qui lui demande conseil : « Tu sais, demain vendredi on m’a annoncé l’enterrement de l’oncle de ma femme. Or, je ne sais pas si je dois me rendre à son enterrement… Cet homme a provoqué dans ma vie de véritables catastrophes que je ne lui pardonne pas ! Cela fait quatre années que je ne lui adresse plus la parole à cause de tout le mal fait ! Et je viens juste d’apprendre son décès… » Après une pause, il ajoute, » Seulement je réfléchis à nouveau à cette nouvelle situation, et je me demande si cela ne vaut pas mieux que je me rende au cimetière et avant son ensevelissement que je lui pardonne le mal fait afin qu’il monte propre et saint au Ciel ou bien non, dois-je garder la rancœur pour tout le mal fait ? » Chelomo, son grand ami, connaît les dessous de l’affaire et sait combien l’oncle de sa femme a été responsable, plus ou moins directement, de grands déboires dans la vie de famille de Chelomo. Au point que sa femme est tombée (indirectement) malade et a subi une paralysie partielle de son corps lui rendant difficile ses déplacements et même sa parole ! Que D’ nous en préserve.
Reb Yossef répond à son ami : « Je ne pourrais jamais répondre entièrement à ta question car je n’ai pas vécu tes grandes difficultés. Seulement je peux te raconter une histoire dans ma famille. J’ai un proche parent (mon oncle) qui a eu une fille il y a 11 années et depuis il n’a plus eu d’enfant… Il voulait tellement en avoir d’autres qu’il a fait tout les efforts possibles… en vain. Seulement il y a juste deux semaines j’ai été appelé pour participer à la Brith Mila de son fils. Je tiens à te faire partager les tenants de l’histoire. Cela remonte à quelques années en arrière, cet oncle a été contacté par son beau-frère qui lui a proposé d’investir une très forte somme d’argent dans un produit qui devait rapporter de gros dividendes. Or en très peu de temps tout l’argent investi parti en fumée ! Mon oncle était complètement dépité. Rapidement il considéra que son beau’f l’avait roulé ou qu’il avait fait de très lourdes fautes de gestions… Tandis que ce dernier se défendait en disant qu’il avait tout fait pour éviter la catastrophe et que ce n’était pas sa faute… La situation était très tendue entre les deux hommes et les familles se séparèrent… Avec le temps les deux beaux-frères devinrent des ennemis jurés… Quelques années passèrent et une personne est venue voir mon oncle en lui disant qu’il fallait peut-être pardonner. Il lui dit : « C’est certainement vrai que tu as raison, mais c’est tellement dommage de gâcher la vie d’une famille pour ce motif ! » Petit à petit son cœur s’est ouvert, et, maintenant au bout de 10 ans, il attend un autre enfant. Or, maintenant il sait que la clef de la bénédiction dépend du Chalom/paix. Au début du mois de mars 2019, les deux beaux-frères se réunirent pour la première fois depuis de longues années et ils se serrèrent la main en signe de paix, les deux voulurent tourner la page… Quelques mois plus tard (dans l’histoire il n’est pas dit combien) un fils naquit chez mon oncle après 11 années d’attente ! L’émotion était à son comble dans la famille et le garçon fut appelé CHALOM car mon oncle avait compris que ce bébé était le fruit direct de l’entente avec son beauf… » Fin de l’histoire racontée par Yossef et les deux voisins se séparèrent le jeudi soir au pas de la porte.
Vendredi passe, les sirènes sonnent l’entrée du Shabbat et la paix du Shabbat s’installe dans les quartiers de Beth Shemech. Vendredi soir, durant le repas du Shabbat on frappe à la porte de Yossef. Ce dernier ouvre la porte et voit à nouveau son voisin Chelomo. Il lui dit : « Je n’ai pas de mots pour te remercier… « Que s’est-il passé ? » Chelomo inspire profondément et lui dit : « Après que tu sois parti, la nuit dernière, j’ai beaucoup réfléchi à tes paroles et à ton histoire. Qu’est-ce que cela m’apportera que je garde rancune et haine dans mon cœur ? Peut-être, qu’au contraire, je pourrais accéder à la délivrance si je lui pardonne le mal fait. La nuit dernière j’ai peu dormi, je me suis plusieurs fois retourné dans mon lit pour savoir si j’allais ou non à l’enterrement. Finalement j’ai décidé d’y aller. Le matin, j’ai garé ma voiture devant le cimetière et j’ai parcouru toutes les allées, d’un pas très lourd, jusqu’au rendez-vous. Je me demandais si j’allais arriver à ouvrir la bouche, tant l’émotion était grande. Je me suis approché de l’endroit où l’on faisait les oraisons funèbres afin de m’imprégner des bons côtés de cet homme…Je me suis alors approché du cercueil et j’ai dit : « Je te pardonne… » puis j’ai crié « Ma’houl Lekha. « (Je te pardonne) trois fois de suite d’après la coutume. Je suis reparti en direction de ma voiture, j’ai ressenti mon pas beaucoup plus leste et mon cœur libre. Je savais que j’avais fait quelque chose de souhaitable et de bien.
Je suis rentré à la maison et au moment de l’allumage des bougies du Shabbat ma femme à fait de longues prières alors qu’elle était en sanglots… Elle pria que, par le mérite du pardon de son mari (vis-à-vis de son oncle), qu’elle accède à la guérison complète.
Lorsque je me suis rendu à la synagogue pour accueillir le Shabbat, j’ai chanté le Lékha Dodi où on dit le passage : » Approche toi, Princesse du Shabbat, Lève-toi, Lève-toi… » J’ai pensé à ma femme afin qu’elle se lève de sa paralysie … Après la prière, je suis rentré à la maison, j’ai frappé à la porte en attendant qu’un de mes enfants ouvrent. J’ai eu alors le choc de ma vie, la porte s’est ouverte et c’est ma femme qui l’a ouverte sans aide en disant un grand « Shabbat Chalom » sans aucun problème de langage… Je n’enrevenais pas, ma femme souffre d’une demi-paralysie doublée d’une difficulté de langage… Et d’un seul coup tout a disparu ! Est-ce que tu comprends… Ma femme vient de sortir de sa paralysie ! Je me suis assis à table avec elle et j’ai commencé des chants de louange à D’ pour ces grands miracles. Je voulais faire le Kidouch et je me suis souvenu de toi, l’ami qui m’a donné ce conseil (de lui pardonner). C’est donc vers toi que je me dirige afin de t’annoncer la formidable nouvelle… ». Et les deux amis commencèrent spontanément à chanter et à faire une ronde (sans bondir – Voir Rama 339.3) pour remercier le Maître du Monde pour toutes ces grandes bontés et en particulier la guérison de sa femme… Fin de cette histoire extraordinaire qui a eu lieu sous les cieux cléments de la Terre sainte. Et pour nous, de savoir que parfois la bénédiction est stoppée du Ciel à cause d’une veille rancune, ou d’une sourde colère… Peut-être que les semaines de consolations qui suivent le 9 Av seront propices pour reconsidérer les choses sous un autre aspect… Et de se dire qu’il est temps de pardonner afin de recevoir, pour de bon, la grande bénédiction du Ciel qui nous attend.
Chabbat Chalom et à la semaine prochaine si D’ le veut !
David Gold
Soffer écriture ashkenaze-sépharade
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Une bénédiction dans tout ce qu’entreprend mon Roch Collel : Le rav Acher Berakha Chlita afin qu’il multiplie l’étude de la Tora dans la ville de Raanana (15 rue Palmah) et qu’Hachem lui donne la bénédiction dans son foyer et ses enfants.