Le Pr Israël Auman, Prix Nobel d’Economie, s’est exprimé aujourd’hui (dimanche) dans le cadre du Congrès de Jérusalem organisé par le groupe de presse Besheva.

En tant que spécialiste de la théorie des jeux, il a été interrogé sur la stratégie de négociations face au Hamas pour obtenir la libération des otages. Le Pr Auman a rappelé le ”paradoxe du maître-chanteur”: ”On donne à Reuven et Shimon 10000 shekels à se partager. Ils les recevront à condition qu’ils arrivent à se mettre d’accord sur le partage entre eux.

Reuven dit : partageons en deux parties égales. Shimon dit : non, je ne partirai pas d’ici sans 9000 shekels. Reuven lui répond : Et pourquoi? Tu es meilleur que moi? Alors Shimon lui rétorque : Je ne suis pas meilleur que toi mais je ne sortirai pas d’ici sans 9000 shekels. Alors Reuven réfléchit et arrive à la conclusion que Shimon est irrationnel et par conséquent, il ne changera pas sa position. Reuven se dit que finalement 1000 shekels c’est toujours mieux que rien. Alors Reuven le ”rationnel” repart avec 1000 shekels et Shimon empoche les 9000”.

Pour conclure cet exemple, le Pr Auman interroge : ”En fin de compte, lequel des deux est le plus rationnel? C’est exactement la situation entre Israël et le Hamas. Le Hamas n’est pas rationnel mais il repart avec plus, j’espère qu’il ne sortira pas vraiment avec plus mais a priori il se comporte de manière irrationnelle pour obtenir plus et nous nous comportons de manière rationnelle.

Après la Guerre des Six Jours, Moshé Dayan a dit qu’il fallait se comporter de manière folle pour tirer le maximum”.

A la question de savoir ce qu’il pensait d’une libération ”à n’importe quel prix”, le Pr Auman répond: ”Je suis désolé. Le Rambam décrète que la mitsva de libérer des prisonniers est la plus importante. Mais un peu plus loin, il écrit qu’on ne libère pas les prisonniers à un prix supérieur à leur sang, selon son expression. Ici, il s’agit de vies et nous n’avons pas le droit de payer n’importe quel prix. Cela signifie, 1. ne pas arrêter la guerre et renoncer en faveur du Hamas, 2. ne pas libérer des milliers et des milliers de terroristes. Leur libération entrainera la mort d’un nombre beaucoup plus important de personnes qu’il n’y a d’otages aujourd’hui. Mon coeur est avec les otages mais parfois il faut être rationnel”.

Et il ajoute: ”On m’a demandé quel était le meilleur moyen pour ramener les otages à la maison selon la théorie des jeux. J’ai répondu que si ramener les otages à la maison était le SEUL objectif, le SEUL, l’objectif suprême, alors le meilleur moyen était d’accepter toutes les exigences du Hamas. Mais je pense que cela mettrait en péril l’existence même d’Israël. Donc le meilleur moyen pour les ramener à la maison est de céder au Hamas mais est-ce souhaitable? Je vous laisse répondre”.