Autour de la table de Chabbat, n°363 Mikets-Hanoucca – Illustration shutterstock
Les jours de ‘Hanoucca sont là, l’allumage des bougies mobilise toute la famille, c’est aussi le moment propice pour réfléchir un tant soit peu sur le sens de cette fête. Comme on le sait, la Tora ne fait pas des commémorations historiques des évènements du passé (comme le 14 juillet). Lorsque les Sages ont décidé de fixer les 8 jours de Hanoucca, ils ne l’ont fait qu’après avoir eu confirmation que c’était agréé par le Ciel. La preuve, c’est que juste après la victoire de l’armée ils n’ont pas fixé des jours d’allégresse mais ont attendu la seconde année.
Nous savons qu’à l’époque reculée du 2ème Temple de Jérusalem l’empire grec étendait ses griffes jusqu’en Erets Israël et pendant près de 2 siècles la culture grecque fit des ravages parmi la population juive. Une bonne partie de la communauté avait abandonné toute pratique pour adopter le nouveau way of life version Athènes. Le reste de la population (les ultras de l’époque) se heurtait à de très sévères décrets interdisant toute pratique juive (sous peine de mort) en particulier la Brith Mila, le Chabbath et l’étude de la Tora. La situation était si critique que le judaïsme dans son entier était à deux doigts de mettre la clef sous la porte, bar minan ! Jusqu’à ce qu’une petite poignée de Kohanim, les fils de Mattitiaou, commencèrent à se battre contre l’empire grec. L’inespéré se produisit, une poignée de Juifs mirent en défaite l’armée la plus forte au monde ! Et, le 25 Kislev, le service divin au Temple sera renouvelé dans toute sa pureté originelle avec l’allumage du candélabre et la reconduction des sacrifices. Bénit soit Hachem !
Seulement on pourra se demander ce qui a tant dérangé les amis de Platon et d’Aristote pour interdire toute pratique des Mitsvoth ? Qui plus est, la Grèce est le précurseur de toute la culture occidentale. C’est à Athènes que se déroulaient les Jeux Olympiques. Les écoles philosophiques étaient nombreuses. L’architecture ainsi que les sciences de la nature étaient étudiées. Toutes les grandes découvertes scientifiques des temps modernes se sont appuyées sur les axiomes développés par les grecs. Donc où le bât blesse ?!
Une ébauche de réponse peut être donnée à partir du fameux Midrach qui décrit dans nos sources la civilisation grecque comme l‘obscurité qui a régné lors des premiers jours de la Création. Pour le Clall Israël, la culture grecque s’apparente aux ténèbres par rapport à la LUMIERE qui se dégage de la Tora et des Mitsvoth ! C’est peut-être aussi le message véhiculé par notre allumage alors que dehors il fait nuit. Parce que l’obscurité est grande à l’extérieur, ALORS nos flammes illuminent. A quoi fait-on allusion ? La civilisation grecque explique le « comment » des choses afin d’accéder aux plaisirs et à une vie plus facile. Seulement les Grecs n’ont jamais eu accès au POURQUOI des choses, le sens de la création. Or la Tora et les Sages jusqu’à nos jours s’occupent de la raison des choses (c’est la base de notre foi), ce qui est dévoilé dans le Talmud et la Tora écrite. En donnant la Thora au Clall Israël, Hachem a donné LA clef de lecture de l’histoire du monde (et la Sienne) et le pourquoi de la venue sur terre de l’homme. Qui plus est, la Tora offre à l’homme la possibilité de se rapprocher de son Créateur.
Dans le monde profane, on pourra trouver de grands chercheurs de la Nasa ou du CNRS pouvant s’occuper de choses profondes à longueur de journée. Pourtant, ils pourront se comporter de la manière la plus vile dans la vie quotidienne ! La preuve c’est qu’on ne verra jamais (car cela n’intéresse personne) à la une des journaux, la photo d’un scientifique prit dans une posture délicate, car la morale et la connaissance des sciences font DEUX ! Tandis que dans la Tora, à l’inverse, un Sage qui a beaucoup étudié les textes mais n’a pas de crainte du Ciel, son étude n’a aucune valeur. La Tora est sainte. Elle nécessite que ceux qui l’étudient soient des gens au comportement exemplaire.
De plus, la Tora développe la foi de l’homme dans son Créateur. L’être humain n’est pas voué aux aléas de la nature, à la peau de banane qui traine dans la rue précisément où l’on pose son pied, au pas de course… Il existe une Main Qui dirige les pas de l’homme, même si quelquefois la vie apparait bien obscure. Le croyant sait que la Providence divine exerce sa protection. Cette même peau de banane sera interprétée par notre homme comme une punition ou expiation de fautes antérieures. Dans tous les cas, il existe une réponse (la question est de la connaitre pour rectifier le tir). Le monde n’est plus un grand mystère, un jeu du grand hasard. Ce regard amènera l’homme à plus de tranquillité vis-à-vis de choses de la vie, à savoir que tout ce qui lui est envoyé est pour son bien (dans ce monde-ci ou dans le monde à venir) (Choul’han ‘Aroukh 222.2) !
C’est aussi une allusion que l’on retrouve dans l’allumage des bougies. Il existe une loi intéressante qui stipule que l’on doit placer nos bougies entre 3 tefa’him à partir du sol (dans les 30 cm) jusqu’à 10 tefa’him (un mètre). Dans le cas où on allume sur le rebord de la fenêtre on n’aura pas besoin de tenir compte de ces limites. Or normalement, puisqu’il s’agit d’un objet de Mitsva, on aurait dû allumer au moins à partir d’un mètre du sol (car plus bas cela marque une certaine désinvolture dans l’accomplissement de la Mitsva). Certainement que c’est une allusion à notre développement. L’allumage de notre Hanoukia vient pour illuminer les niveaux plus bas éloignés de toute sainteté. C’est un message propre à la Tora, car même dans la plus grande obscurité il y a toujours une possibilité de s’en sortir… Comme le dit bien rabbi Na’hman ben Feïgue, LE DESESPOIR N’EXISTE PAS!
Chéhé’hianou vekiémanou…
Le sippour que je vous propose cette semaine est un peu difficile (par rapport à la joie qui doit se dégager de nos allumages), mais je pense que son message est important à connaitre. Il s’agit de l’Admour (le rav dans les communautés ‘hassidiques) de la ville de Bélozov. Il était connu comme un grand tsadik qui, toute sa vie, a œuvré pour le bien-être matériel et spirituel de la communauté. Il a vécu vers la fin de sa vie en Amérique et s’est éteint à l’âge très vénérable de 100 ans. Que son mérite soit source de bénédictions pour le Clall Israël.
Le rabbi avait passé tous les affres de la guerre en Europe et maintes fois échappa à la mort. Durant cette période, des plus sombres, il se tenait auprès de ses frères pour les renforcer afin qu’ils ne perdent pas courage et espoir. Lorsque les nazis sont arrivés dans la ville de Bélozov, ils réunirent une partie de la communauté forte de 500 personnes dans un petit ghetto en attendant de les envoyer à Auschwitz. La communauté était donc parquée dans un quartier de la ville sévèrement gardé par des soldats allemands. Les journées et semaines passèrent alors que le manque de nourriture et la promiscuité était grande. Les jours de Hanoucca approchèrent et les prisonniers cherchèrent à faire un allumage. Or, à pareille époque, il était formellement interdit d’allumer un feu au ghetto et à plus forte raison de faire une quelconque action liée à la pratique juive.
Après de nombreux efforts et beaucoup d’audace, des membres du ghetto réussirent à faire entrer dans l’enceinte un peu d’huile et des mèches pour allumer les lumières de Hanoucca. Seulement, les responsables juifs décidèrent qu’il ne devait y avoir qu’un seul allumage pour l’assemblée. La peur était tellement grande, qu’il fallait faire le strict minimum. Tout était fait dans le plus grand des secrets car si les nazis étaient mis au courant ils se déchaineraient contre les fautifs, passibles de la peine capitale. Donc avec beaucoup de courage ils choisirent, coute que coute, de faire l’allumage. Le premier jour de Hanoucca arriva et le soir l’assemblée se regroupa auprès de la seule lampe de Hanoucca. Les organisateurs avaient un dilemme : qui aurait l’illustre honneur de l’allumer ? Après un court échange, les responsables décréteront que la personnalité la plus apte à faire cet allumage était le rav de la communauté ‘hassidique de la ville. C’est lui qui devait rendre quitte toute l’assemblée de la Mitsva. Lorsque le rabbi compris qu’il avait été désigné, il s’y préparera avec un grand sérieux et beaucoup de pureté de cœur. Au moment convenu, le rav arrivera sereinement devant la Hanoukia tandis qu’un grand silence parcourait l’assistance. Le saint homme prit la bougie en main (le chamach) et commença à réciter les textes d’introduction (le Léchem Yhoud et les bénédictions). Le rabbi commença avec une voix très distincte à dire la première bénédiction « lehadlik ner ‘Hanoucca ». Toute l’assistance répondit « Amen » ! Puis la seconde bénédiction, « ché’assa nissim », pareillement l’assemblée répondit avec beaucoup de ferveur une seconde fois « Amen ». Seulement le rav se tut et ne dit pas la dernière bénédiction (« Chéhé’hianou ») juste avant l’allumage, il garda le silence. Le public s’impatientait mais le saint rabbi ne prêtait attention à quiconque. Il restait à côté de la Hanoukia avec son chamach sans bouger avec un air très pensif… Les gens commencèrent à dire, « Nou, Nou… »Chéhé’hianou »… », l’assemblée voulait voir enfin cette allumage. Puis soudainement le rav récita distinctement, « Baroukh … Chéhé’hianou, vekiémanou, lazman hazé », tout le monde répondit « Amen ». Le rav alluma la première bougie. Après son allumage des élèves s’approchèrent de lui et demandèrent : »Rabbi, pourquoi avoir tant attendu avant de faire la dernière bénédiction ? » Le rav leur dira : « Pour la première et deuxième bénédiction je n’ai pas eu de problèmes. Seulement lorsqu’est arrivé la dernière bénédiction je n’ai pas pu sortir de ma bouche le « Chéhé’héinou » (ndlr: Chéhé’hianou veut dire « Béni soit D’ pour nous faire vivre ces moments-là (de la Mitsva) »). Car comment puis-je bénir Hachem pour ces temps terribles que l’on passe au ghetto ? Notre vie ne tient qu’à un fil, la faim nous tenaille et notre avenir est très sombre. Donc comment je peux dire « Béni soit Hachem qui nous fait vivre jusqu’à ce moment et nous fait vivre ces instants » ? J’étais dans le plus grand désarroi de ne pas avoir de réponse. Puis j’ai une nouvelle fois réfléchi sur notre situation. J’ai vu ces centaines de Juifs qui se tiennent auprès de cet allumage et qui cherchent à tout prix à accomplir la Mitsva de D’. Malgré la mort, notre quotidien, et la dureté de notre enfermement, le public me presse de dire le « Chéhé’hianou »! J’ai alors compris que précisément dans cette situation des plus obscures, il jaillit une lumière très intense, c’est cette volonté de faire la Mitsva. Il s’agit ni plus ni moins que de l’éclat de l’âme juive qui resplendit dans le plus grand des enfers sur terre. Au plus profond de cette assemblée (même de gens éloignés) ils brulent l’envie de faire la Mitsva de D’. Et c’est justement à cause de ces vicissitudes quotidiennes que se dévoile un point fondamental de la sainteté de la communauté. A ce moment j’ai pu dire clairement : »Béni soit Hachem pour me faire vivre de pareils instants…« . Incroyable !
Coin Halakha : Dès la tombée de la nuit, on fera son allumage dans sa maison en particulier en Erets où on allume à l’extérieur. En conséquence, on évitera de faire une visite amicale ou familiale au moment de l’allumage. Il faudra d’abord allumer chez soi puis partir chez son ami. On peut allumer à partir du Plag soit une heure et quart avant le coucher du soleil. Seulement on fera attention de mettre une quantité d’huile suffisante pour éclairer jusqu’à une demi-heure après la nuit tombée. Autre possibilité, nommer un émissaire afin qu’il allume, à son domicile, à sa place (en général, son épouse). Un invité qui dort chez son hôte devra s’associer à l’allumage en payant une pièce. En cela il acquerra une partie de l’huile de son hôte. D’après la coutume ashkenaze, chaque personne de la maison, allument sa Hanoukia. Notre invité pourra donc allumer sa propre Hanoukia dans le cas où sa femme n’a pas allumé pour lui dans sa maison.
Pour les familles qui passent le Chabbath à l’hôtel, elles devront allumer le vendredi soir avant l’allumage des bougies du Chabbath à l’hôtel. Ils allumeront dans leur chambre, à l’entrée ou à la fenêtre donnant sur la rue, s’ils sont à moins de 10 mètres du sol, soit 3/4 étages. Dans le cas où la direction de l’hôtel l’interdit (pour cause de sécurité) il existe une discussion entre les Poskim pour savoir si on est rendu quitte lorsqu’on allume dans la salle à manger.
Motsé Chabbath: si on a le temps de rentrer à la maison et d’allumer alors qu’il y a encore du monde dans les rues, on le fera. Sinon, on allumera là où on a passé le Chabbath même si on a l’intention de rentrer le soir. On veillera, toutefois, à rester à côté de l’allumage le temps de la demi-heure et on mangera un petit repas sur place.
Chabbath Chalom et on souhaitera à tout le Clall Israël de bonnes fêtes de Hanoucca, que nos allumages apportent beaucoup de lumière dans nos maisons.
Une bénédiction au rav Yohanan Wolf et à épouse à l’occasion des fiançailles de leur fille (petite-fille de notre lecteur assidu M. Yossef Wolf Elad).
Une Berakha à ma sœur Rafaële Frima Bat Sima pour tout son aide de relecture (en vue de la parution du nouveau livre « Au cours de la Paracha » saison 2) et une bénédiction à toute sa descendance dans la Tora et les Mitsvoth
Nouveau ! Nouveau ! « Autour de la Table de Shabbat » s’associe avec l’action sociale de l’association « Léchem Chamaim » sous la direction du rav Asher Brakha chlita pour l’aide aux familles nécessiteuses (Avrékhim) en Erets Israël. Connaissant personnellement le rav Chlita et son action bénie pour son aide à de nombreuses familles religieuses (300), je vous invite à soutenir généreusement son œuvre. Votre don amènera du bien-être à ces grandes familles (avec de nombreux enfants) et amènera beaucoup de lumière dans vos foyers. Votre argent sera transformé en bons d’achats valables dans les grandes surfaces.
Avec la bénédiction du rav Asher Brakha chlita et de votre feuillet préféré : »Autour de la Table du Chabbath »
Possibilité de recevoir un reçu séif 46 (dons israéliens) ou un Cerfa (pour les français), il suffit de cliquer sur le lien qui apparait