Pourquoi Hachem S’exprime-t-Il en égyptien ?

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Réflexion sur la paracha de la semaine par le rav Mordekhai Bismuth:

La paracha de cette semaine énonce les dix Commandements, les dix « Paroles » données par Hachem aux Bené Israël, au pied du mont Sinaï : croire en D’, rejeter l’idolâtrie, ne pas invoquer le nom de Hachem en vain, sanctifier le jour du Chabbath, honorer son père et sa mère, ne pas commettre d’homicide, ne pas commettre d’adultère, ne pas commettre de vol, ne pas porter un faux témoignage, et ne pas convoiter ce qui appartient à son prochain.

Le premier commandement nous incombe de croire en D’, c’est-à-dire que nous devons croire qu’Il est à la fois l’origine et la cause de toute chose, celui qui fait exister toutes les créatures (Rambam Séfer Hamitsvoth).

Le Zohar (Vaéra 25b) explique que nous avons devons accepter l’existence d’un Créateur Tout-Puissant, et de savoir qu’Il exerce une Providence continuelle sur l’univers. Qu’Il est la force qui dicte toutes les lois naturelles, et qu’Il soutient et nourrit toutes les créatures, de la plus grande à la plus petite.

Et selon le Séfer Ha’hinoukh, cette mitsva ne se limite pas à des moments spécifiques, comme la plupart des mitsvoth, mais c’est une Mitsva «temidith/continuelle ». La conscience de l’existence de Hachem et de Son pouvoir doit être une préoccupation constante pour le Juif et à chaque instant et même dans les moments les plus anodins.

Ce premier commandement commence par « Anokhi. Je ». Pourquoi Hachem a-t-Il choisi de commencer par le terme « Anokhi » plutôt que « Ani », qui signifie également « Je » ? Il existe plusieurs réponses : – Le terme « Ani », lorsqu’il n’est pas ponctué [comme dans le rouleau de la Tora] pourrait, à D. ne plaise, se lire aussi « eïni -Je ne suis pas, Hachem votre D’ ». Alors que le terme « Anokhi » ne présente pas ce danger (Malbim).
-Le terme « Anokhi » renferme différentes significations. Le aleph de valeur numérique 1, représente l’Unité de D’ et Sa souveraineté. Le noun qui est égal à 50 et le khaf à 20, font allusion aux 70 nations de la terre que Hachem domine. Quant au youd d’une valeur numérique de 10, il représente les dix commandements (Pessikta Rabati chap 21).
– « Anokhi » est aussi un acronyme de la déclaration araméenne qui exprime l’essence même de Hachem: « Ana nafchi ketavith yehavith-Je l’ai écrite [Seul] et l’ai donnée » : l’origine divine de la Tora et son authenticité ne sauraient être remises en question (Chabbath 105a).
-Le Yalkout Chemouni rapporte au nom de rabbi Né’hémia que le terme « Anokhi » est en langage égyptien (Voir aussi Tora Cheléma Yitro chap 20 note 30).

Penchons-nous sur cette dernière explication : pourquoi Hachem s’exprime-t-Il en égyptien pour commencer le fameux passage des 10 commandements ? Pourquoi Hachem n’emploie pas la langue sainte pour s’introduire, mais opte pour une langue profane, celle du pays que la Tora désigne elle-même comme un pays d’impureté et d’immoralité ?

Dans de nombreuses religions, être religieux, orthodoxe, c’est se séparer de la matière, se séparer de son corps. Chez les goyim, un homme pieux c’est être une personne qui s’est totalement détachée de toute matière. Ils ne se marient pas, ne boivent pas, n’ont pas d’enfants, ils vivent isolés….et ces gens-là représentent l’élite de leur religion. Mais un tel comportement est un affront et une insulte envers D’ ! Ce serait remettre en question Sa création, Lui dire, que le corps que Tu as donné « n’est pas parfait». Il est répugnant, et il est inadapté avec l’âme de haut niveau que tu nous as insufflée. On ne veut pas de Ton corps !

Cependant le but d’un Juif sera à travers sa vie d’élever son corps, de le mettre en osmose avec sa nechama, de faire monter le corps au niveau de l’âme pour qu’ils fassent qu’UN ! Et pas le contraire, ‘hass ve-Chalom ! Celui dont le corps prendrait trop de place, c’est la nechama qui partirait….

Le Juif vient révéler dans son quotidien toutes les particules divines enfouies dans la création matérielle, pour les élever à un niveau spirituel. Mais le goy incapable de relever ce défi préfère, soit se séparer complètement de son corps, soit s’enfoncer dans une matérialité la plus totale.

Nous pouvons être parfois perdus dans nos préoccupations de monde entièrement matériel dans lequel nous vivons. Submergés, il peut nous arriver d’oublier que Hachem est là (que D’ préserve), même dans ce qui peut nous paraître complètement profane et sans réel lien avec le spirituel et notre Créateur.

Selon les enseignements de la ‘Hassidouth, Hachem a volontairement employé une langue profane au détriment de la langue sainte, pour nous rappeler que le but de la Tora est d’élever et purifier la matière. Mais aussi, pour nous informer qu’Il ne S’adresse pas uniquement aux personnes saintes et élevé, mais même aux plus éloignés de la spiritualité.
L’essence du projet du don de la Tora est de sanctifier et d’élever les éléments les plus impurs et les plus bas. C’est pour cela que Hachem choisit, à un moment phare et déterminent de notre histoire, de s’adresser aux Bené Israël par le terme : «Anokhi » !

A ce propos, le Chem Michemouel écrit que la langue française est une langue totalement imprégnée de touma/impureté et que selon lui, il est impensable de l’employer. Des commentateurs s’interrogent sur cette instruction étonnante, et demandent comment Rachi, français de souche, utilise parfois dans ses illustres commentaires des mots en français ? Et ils répondent que Rachi vient, en employant des mots en français, réparer et élever cette langue (espérons que nous aussi à travers nos divré Tora en français, à l’écrit et à l’oral, participons à l’élévation du monde).

Hachem notre Créateur dans son infime bonté nous a créés d’un corps et d’une âme qui sont indissociable l’un de l’autre. Ainsi, jouir d’un bon repas, boire du vin, se marier, procréer… actions qui ne paraissent en premier lieu que matérielles font partis de grandes Mitsvoth données par Hachem. Cependant pour qu’elles aboutissent, elles doivent être réalisées avec spiritualité, avec notre nechama, selon les règles de la Tora.

Pour finir, avez-vous déjà remarqué que lorsqu’un juif étudie la Tora, il a une tendance à remuer son pouce du bas vers le haut ? Ce geste ‘’naturel’’, est une façon d’exprimer l’essence même de la Tora, que l’on va chercher du bas pour l’élever vers le haut.

Chabat Chalom – Rav Mordékhai Bismuth

Extrait de la Daf de Chabat disponible sur notre site OVDHM.com

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