Réflexion sur la paracha de la semaine par le rav Mordekhai Bismuth:
Ces paroles seront pour l’elevation de l’âme d’Albert Avraham ben Julie et Denise Dina bat Elise.
« Vois, Je place devant vous aujourd’hui : une bénédiction et une malédiction » (Devarim 1,27)
La question que de nombreux commentateurs posent à propos de ce verset concerne le changement de personne effectué, du pluriel au singulier, dans les premiers mots du verset. En effet, au début nous lisons « Vois » et peu après : « devant vous ». Or en toute logique il aurait dû être écrit « vois » et « devant toi » ou « voyez » et « devant vous ». C’est ainsi que tout le monde écrit et c’est ainsi que nous devons donc écrire. Certes, mais ces règles d’accord ne concernent pas Le Créateur du monde Qui a de nombreux enseignements à nous transmettre dans chaque mot de Sa sainte Tora.
Revenons cependant au sujet de faire comme tout le monde, de manière générale. Lorsque l’on se pose la question de savoir pourquoi nous agissons comme ceci ou comme cela, la réponse est très souvent : « Parce que tout le monde agit ainsi. » Nous suivons en effet tous le courant, si tout le monde le fait, c’est que c’est la bonne manière d’agir.
Essayons d’analyser pourquoi nous avons cette forte tendance à suivre la majorité. Qu’est-ce que cela signifie ? Et, est-ce vraiment le bon choix ?
Dans l’accomplissement d’une Halakha, la Tora nous dit toujours de suivre l’avis de la majorité des décisionnaires. Mais ici nous parlons de Posskim, de Sages, de personnes aptes à nous orienter correctement et non de gens qui utilisent la voix du plus grand nombre pour nous faire adopter un comportement contraire à ce qu’il nous est permis de faire.
Si nous Juifs avions accepté cette loi qu’il faut toujours suivre la majorité, en tant que peuple à démographie faible, nous aurions tous, ‘Hass ve chalom, effectué une conversion au christianisme ou à l’islam, afin de nous fondre dans la masse. C’est d’ailleurs ce que beaucoup d’entre nous font sans aller toujours jusqu’à se convertir D’ merci, et le simple fait que nous suivions le calendrier chrétien le prouve, qui ne correspond à rien selon la Tora.
Voici un exemple : une personne doit louer une voiture, elle fait appel à une compagnie de location qui lui propose un certain prix pour une petite voiture assez modeste. Tout-à-coup un homme s’approche de lui, et lui propose une solution de covoiturage, dans un véhicule beaucoup plus confortable et surtout à un prix nettement plus intéressant. Notre homme s’intéresse bien sûr immédiatement à cette offre alléchante, mais après quelques questions, il s’aperçoit que le chauffeur de ce véhicule ne va pas du tout dans la même direction que lui, l’un va vers l’Est tandis que l’autre doit se diriger vers l’Ouest.
S’il n’avait pas vérifié ce « petit » détail, et qu’il ne s’était fié qu’au prix et au confort du véhicule, il aurait dû non seulement recommencer son voyage en sens inverse pour rentrer chez lui, mais il aurait aussi perdu l’argent donné pour ce covoiturage et dû repayer une location pour effectuer le voyage qu’il devait faire de toute façon ! Et qui sait, s’il aurait eu les moyens physiques et financiers de faire et refaire ce long et difficile voyage.
La Tora nous met en garde : « Vois, Je place devant vous aujourd’hui : une bénédiction et une malédiction. » Lorsque la Tora emploie le terme « vois », cela signifie qu’elle s’adresse à chacun d’entre nous personnellement. C’est vrai que c’est devant tout le monde, « devant vous » que Hachem a placé une bénédiction et une malédiction, mais chacun doit les accepter individuellement.
Celui qui se laisse influencer pour de mauvaises raisons témoigne de sa faiblesse physique ou spirituelle.
Afin de mieux comprendre notre sujet, le rav Eliyahou Abergel rapporte la Halakha suivante du Choulk’an ‘Aroukh (Yoré Déa’ 59), que nous allons ensuite illustrer.
Un homme transporte des poules. Il passe un pont, sous lequel l’eau de la rivière s’écoule, lorsque subitement, l’une des poules tombe à l’eau du haut du pont à hauteur d’un mètre environ. Selon la Halakha, une poule qui tombe sur le sol de cette hauteur, et qui a reçu un coup, doit subir des vérifications de tous ses membres, car l’on craint qu’à cause de la chute, l’un de ses membres ne soit cassé ou un tendon déchiré. Dans le cas de la poule qui tombe dans l’eau, nous allons observer l’après chute pour déterminer si des vérifications seront nécessaires ou non.
Si la poule, après sa chute, descend la rivière au fil du courant, alors cette poule aura besoin d’une vérification. Le fait qu’elle se laisse emporter par les flots révèle qu’elle a sans doute un problème physique. Cette poule subira donc une Che’hita sans berakha, car si l’on décelait une fracture ou autre, la berakha aurait été dite en vain.
A présent, si cette poule nage à contre-courant et essaye à tout prix de remonter le fleuve, elle subira une Che’hita avec berakha et n’aura pas besoin d’aucune vérification. En effet, si elle est capable de nager à contre-courant, elle prouve par là qu’elle est en parfaite santé.
Nous pouvons comprendre, à partir de cette Halakha, qu’il en est de même pour nous. Si nous nous laissons emporter par le courant de la société, c’est un signe de faiblesse, de fracture, physique ou morale.
Si par contre, nous nageons à contre-courant d’une société qui cherche à détruire notre identité et notre véritable raison de vivre, c’est le signe d’une totale maîtrise de soi et d’une parfaite santé tant physique que morale. Nous agissons alors comme des hommes.
Rav Amnon yits’hak illustre ce concept par une petite histoire: un homme a commis un meurtre, il est appelé au tribunal pour se faire juger. Le juge le regarde et lui propose un marché. Si maintenant, devant toute l’assemblée présente, le coupable avoue sa faute, promet de ne plus causer de tort à personne, de ne plus commettre de crime et pleure pendant un quart d’heure, il sera acquitté de toutes ses fautes et pourra rentrer chez lui. Évidement, le condamné se met à pleurer. Il se confesse et commence à se repentir. Mais soudain, il aperçoit dans l’assemblée ses amis, sa bande, ses compagnons dans les mauvais coups.
Ses amis le regardent et commencent à se moquer de lui, ils le traitent de «dégonflé», de pleurnichard et lui disent : «Sois un homme!» Notre condamné reprend alors son souffle, arrête son mea culpa et essuie ses larmes. Le juge le regarde et lui demande pourquoi ce changement d’attitude. Cela fait déjà 8 minutes qu’il pleure, la moitié du parcours est effectuée ! Rien à faire, il ne veut plus continuer. Alors le juge rend son verdict et notre condamné passera les 25 prochaines années en prison. Ses amis sont fiers de lui, ça c’est un homme !
Mais cet homme a-t-il fait preuve de courage ou de stupidité? Il a voulu faire le beau et jouer les rebelles mais qu’a-t-il gagné? Sa perte…
Il est parfois louable de jouer les rebelles, mais il faut être rebelle parmi les rebelles!
Savoir dire non : « Non merci, je ne fume pas… Non, je ne travaillerai pas pour des escrocs… Vendredi soir, je ne sors pas car je suis chomer Chabbath… Non, je ne mange pas dans ce restaurant car il n’y a pas de Te’oudath cacherout… » Dans tous ces cas, « non » n’est pas un signe de faiblesse mais de bravoure.
Le contre-courant de la société représente en fait la normalité du Juif puisque la société nous entraîne à contre-courant de notre Tora.
Par exemple, nous entendons très souvent : « Qu’est-ce tu écoutes comme musique ? De la musique normale… c’est-à-dire jazz, rap, rock ? Mais est-ce vraiment normal pour un Juif ?
« Vois » ! Tout le monde a reçu la même Tora, mais après 120 ans, nous seront seuls chacun face à nos actions passées. Soyons des hommes, des vrais, des Juifs, des Tsadikim et nous serons bénis selon la promesse Divine.
Chabbath Chalom !
Rav Mordekhai Bismuth
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