C’est un site exceptionnel et trop peu connu à Montpellier: le Mikvé, classé aux monuments historiques. Un lieu souterrain au coeur de l’écusson qui ramène à l’origine de la ville.
Au coeur de l’écusson, l’imposante porte du 1 rue de la Barralerie. Passer le seuil, c’est revenir 800 ans en arrière, quand le Mikvé était le centre du quartier juif de Montpellier.
Rares sont les Montpelliérains qui connaissent l’existence de ce site exceptionnel, classé aux monuments historiques. Un lieu souterrain, secret, plombé dans une semi pénombre: ce bain rituel datant du XIIIème siècle, découvert en 1985, est l’un des mieux conservés d’Europe. Il a depuis subi une rénovation et plusieurs campagnes de fouilles archéologiques. La dernière, qui s’achève en ce moment, confirme la présence d’une communauté juive dès le XIIème siècle à Montpellier.
Pour accéder au Mikvé, on s’enfonce à 5 mètres sous terre par un escalier très étroit. Notre guide: Christian Markiewicz, membre associé au LA3M (Laboratoire d’Archéologie Médiévale et Moderne en Méditerranée, basé à Aix en Provence) est chargé des fouilles ici depuis 2009. Il raconte le rituel du bain, depuis le déshabilloir jusqu’à ce bassin construit dans un rocher excavé. Pourquoi une eau si pure et bleutée? Il explique tout ça ici:
Le Mikvé était le coeur, le noyau du quartier juif à l’époque. Monument incontournable de la pratique religieuse et de la vie spirituelle. On estime à 500, peut être 1.000 le nombre d’habitants à l’époque.
C’est l’un des mieux conservé d’Europe. En France ces bassins rituels ont presque tous disparu, détruits ou transformés, par usage ou par volonté d‘anéantir toute trace de la communauté juive explique Christian Markiewicz: « Le Mikvé a resisté au temps, mais il n’a servi de lieu rituel que pendant deux siècles. Après le départ des juifs, chassés, il a servi tour à tour de puits, de cave à charbon, puis de débarras jusqu’à sa découverte dans les années 80. Il avait été recouvert mais plutôt bien conservé.
Ce lieu doit être visité comme un des éléments architecturaux qui symbolise la fondation de la ville
« Ce n’est pas le cas des autres éléments du quartier dont il ne reste que des traces souterraines. Les archéologues ont donc travaillé ces dernières années à recomposer au mieux les éléments de ce quartier juif. Autour du Mikvé, dans un espace de 100 mètres carré à peine: une cuve à vin, une grande salle voûtée, une école de rabbin. Ils ont récemment mis au jour un bassin de plus de 3 mètres de diamètre au dessus du Mikvé, dont on ne sait pas s’il servait pour l’hygiène ou pour le vin (NDLR : Cela pourrait bien être le bassin de hachaka, permettant de rendre le mikvé cacher… Si toutefois l’alimentation en eau est celle d’eau de pluie). Plusieurs hypothèses sont avancées. Les recherches ont enfin permis de découvrir des dallages.
Pour rendre plus compréhensible l’organisation de ce monde souterrain, les archéologues travaillent en ce moment à une reconstitution 3D du quartier juif tel qu’il existait au XIIème siècle. Elle sera présentée lors des journées du patrimoine en septembre. A long terme, la Ville, propriétaire des lieux, souhaite ouvrir plus largement ce lieu au public, pour intégrer le Mikvé dans l’histoire de la fondation de Montpellier et « la grande histoire de la présence juive au bord de la Méditerranée » dit le maire Philippe Saurel.