Sur la photo: Une personne portant un voile intégral islamique à La Haye, Pays-Bas. (Source de l’image: Patrick Rasenberg / Flickr CC par NC 2.0)
Soeren Kern – Gatestone
- « Le visage ne saurait être dissimulé en société ; nos visages nous confèrent une identité et sont un moyen fondamental de communiquer avec les autres. » – Geert Wilders, Parti pour la liberté (PVV).
- Pour le ministre néerlandais de l’Intérieur, Kajsa Ollongren, la nouvelle loi représente « un juste équilibre » entre « la liberté laissée à chacun de s’habiller comme il le souhaite » et « l’intérêt général de préserver l’échange et la sécurité ». Loin de violer les droits fondamentaux a-t-elle ajouté, l’obligation de montrer son visage donnera aux femmes musulmanes « une vie sociale plus large, plus de possibilités de contact, plus de communication et d’opportunités sur le marché du travail ».
- La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a validé à deux reprises la légalité des interdictions de la burqa, ce qui rend improbable l’annulation de l’interdiction néerlandaise devant un tribunal.
Le Sénat néerlandais a approuvé la loi qui interdit le port de « vêtements couvrant le visage » dans les bâtiments publics, y compris les hôpitaux, les écoles et les bureaux du gouvernement, ainsi que dans les transports publics.
Bien que l’interdiction de masquer le visage n’ait pas été étendue pas aux rues, la loi autorise la police à demander aux personnes voilées de se dévoiler aux fins de vérification d’identité.
L’interdiction vise les vêtements islamiques tels que la burqa (couvrant tout le visage) et les niqabs (qui couvrent tout le visage sauf les yeux), ainsi que les cagoules et les casques intégraux. Tout contrevenant sera soumis à une amende de 410 euros (475 dollars).
Adoptée initialement par la Chambre des représentants néerlandaise en novembre 2016, la nouvelle loi a été votée au Sénat le 26 juin 2018 par 44 voix contre 31. Le Sénat compte 75 représentants.
Le gouvernement n’a pas encore précisé la date d’entrée en vigueur de la loi, mais dans un communiqué il a déclaré : « Les Pays-Bas sont un pays libre ou chacun peut se vêtir et se comporter comme il l’entend. Mais des limites peuvent et doivent être imposées si les vêtements qui masquent le visage bloquent les échanges entre les personnes ou mettent en danger la sécurité.
« La possibilité de regarder l’autre en face est si importante au regard de la préservation des échanges interpersonnels qu’elle a dû être établie par la loi. Chacun sait maintenant ce qui est permis ou interdit dans de telles situations. »
Un groupe d’activistes musulmans appelé « Pas touche à mon Niqab ! » a rejeté l’interdiction comme anticonstitutionnelle. Dans une lettre ouverte envoyée aux législateurs néerlandais, le groupe, qui compte plus de 5 000 abonnés sur Facebook, a demandé :
« Pourquoi refuser de comprendre que cette loi mène à l’isolement social ? Les femmes qui portent des vêtements couvrant le visage ne pourront plus participer à la vie en société, seront exclues de l’éducation, privées d’une demande de permis et de déplacements dans les transports en commun, de consultations médicales et bien plus encore ….
« Qu’en est-il de l’article 6 de la Constitution qui énonce la liberté de religion et de croyance ? Quel est le problème qui ferait que certains n’ont pas le droit d’exprimer librement leur religion ou leur croyance, individuellement ou en groupe ?
La porte-parole du groupe, Karima Rahmani, a ajouté : « Nous sommes discriminés par une mesure répressive qui nous oblige à élever la voix. Il devient de plus en plus difficile de marcher dans la rue en niqab. J’ai moi-même été menacée de mort et d’autres femmes ont même été agressées.
« On parle beaucoup de moi, mais personne ne vient me demander : « Pourquoi portez-vous ce niqab ? » Cela fait partie de ma religion et je veux être libre de mes choix. C’est une expérience spirituelle qu’il m’est donné de vivre. »
Le Conseil d’État, un organisme indépendant qui conseille le gouvernement sur ses choix législatifs, a estimé l’interdiction inutile et potentiellement inconstitutionnelle. Dans un rapport de novembre 2015, Le Conseil d’Etat a déclaré que le gouvernement néerlandais avait été guidé par des « sentiments subjectifs d’insécurité » qui « ne justifient pas une interdiction ». Il a ajouté : « Le Conseil d’Etat tient à faire remarquer que le projet de loi semble avoir été initialement motivé par des objections contre les vêtements islamiques qui couvrent le visage … Si les vêtements qui masquent le visage (par exemple une burqa) sont dictés par une prescription religieuse, cet accoutrement relève de la liberté de religion protégée par la Constitution. Le Conseil d’Etat estime que l’interdiction proposée par le gouvernement ne justifie pas de restreindre le droit à la liberté de religion. »
La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a cependant légalisé à deux reprises les interdictions de la burqa, ce qui rend une éventuelle annulation de la loi devant les tribunaux peu probable.
En juillet 2017, la CEDH a fondé en droit l’interdiction belge de la burqa dans les espaces publics. La Cour a jugé que le gouvernement corrigeait « une pratique qu’il estimait être incompatible avec les règles de la communication qui prévalent au sein de la société belge, et plus généralement incompatibles à l’établissement de relations humaines, à la vie en société … et au fonctionnement d’une société démocratique. » En juillet 2014, la CEDH a validé l’interdiction de la burqa en France, acceptant l’argument du gouvernement français selon lequel cette interdiction encourageait au « vivre ensemble ».
Le gouvernement néerlandais a régulièrement insisté sur le fait que l’interdiction ne consiste pas à restreindre la religion mais à promouvoir la communication et la sécurité publique. Il a qualifié la nouvelle loi de « neutre au plan religieux » parce qu’elle ne vise pas uniquement la burka et le niqab, mais inclut également la cagoule et le casque intégral.
Le ministre néerlandais de l’Intérieur, Kajsa Ollongren, a déclaré que la nouvelle loi représente « un juste équilibre » entre « la liberté pour chacun de s’habiller comme il le souhaite » et « l’intérêt général de la communication et de la sécurité ». Kajsa Ollongren a ajouté que loin de violer les droits fondamentaux, l’obligation faite aux femmes musulmanes de se dévoiler leur ouvre les voies d’ « une vie sociale plus large… multiplie les possibilités de contact, de communication sans parler des opportunités sur le marché de l’emploi. »
En décembre 2005, Geert Wilders, chef du Parti pour la liberté (PVV) avait proposé une interdiction totale affirmant que les burqas et les niqabs sont des obstacles à l’intégration des femmes aux Pays-Bas : « Nous devons interdire la burqa. Le visage ne peut pas être dissimulé car il nous confère une identité et demeure notre moyen le plus fondamental d’entrer en communication avec les autres. »
Les Pays-Bas sont le sixième pays européen à avoir approuvé une interdiction de la burqa, après la France, la Belgique, la Bulgarie, l’Autriche et le Danemark. La Bavière en Allemagne, la Catalogne en Espagne, la Lombardie en Italie et le Tessin en Suisse ont également adopté des interdictions régionales de la burqa, tandis que la Norvège a déposé une loi anti-burqa dans les écoles publiques. La Lettonie a proposé une interdiction de la burqa, mais elle n’a pas encore été promulguée.
Soeren Kern est Senior Fellow de l’Institut Gatestone de New York .