Palestiniens: grève de la faim ou poudre aux yeux ?

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La grève de la faim déclenchée par le terroriste palestinien emprisonné Marwan Barghouti (à gauche) vise le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas (à droite).

par Bassam Tawil – Gatestone

C’est partie intégrante de la stratégie palestinienne que de saper, isoler, délégitimer et détruire Israël.

Le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas n’est pas seul à être en difficulté. Marwan Barghouti aussi, sait qu’il y a mieux à faire que de laver en public le linge sale du Fatah. La traditionnelle diversion tactique fonctionne toujours : faire feu sur Israël.

Dépouillée de ses leurres à destination des occidentaux, « la grève de la faim » de Barghouti se réduit à une lutte entre Abbas et un autre prétendant pour le trône du Fatah. Et une fois de plus, Israël – l’Etat qui soi-disant « maltraite » les terroristes palestiniens incarcérés – encaisse les coups.

Les Palestiniens ont la vieille habitude de faire d’Israël une cible chaque fois qu’ils ont un compte à régler en interne. Tous les experts et observateurs de la scène palestinienne sont familiers de ce type de pratiques. C’est partie intégrante de la stratégie palestinienne que de saper, isoler, délégitimer et détruire Israël.

Les personnes moins familières de la culture palestinienne et de ses tactiques comprennent moins bien. Les fonctionnaires de Washington, Londres, Paris et d’autres capitales occidentales ont peu de contacts avec le Palestinien ordinaire, « l’homme dans la rue » qui pourtant représente la voix authentique des Palestiniens.

Ces fonctionnaires n’ont affaire qu’aux politiciens et aux universitaires de Ramallah – des « experts » qui sont en réalité des escrocs. Ces Palestiniens-là connaissent l’état d’esprit des occidentaux, et savent les arguments qu’il convient de servir et les pressions qu’il convient d’exercer pour aboutir au résultat escompté.

La réaction occidentale à la grève de la faim déclenchée le 17 avril par les prisonniers palestiniens des prisons israéliennes est un bon exemple. La grève a été initiée par Marwan Barghouti, un haut responsable du Fatah qui purge cinq peines de prison à vie pour le rôle qu’il a joué dans diverses attaques terroristes. Barghouti est en prison depuis 15 ans déjà.

En dépit d’une incarcération de longue date, Barghouti mène ici sa première grève de la faim. Découvre-t-il maintenant le soudain inconfort de ses conditions d’incarcération ? Ou bien cette grève recèle-t-elle un motif caché ?

La grève de la faim n’a en effet aucun rapport avec les conditions de détention dans les prisons israéliennes. Elle est en lien direct avec les luttes de pouvoir au sein du Fatah. La grève de la faim vise moins Israël, que le président de l’Autorité palestinienne (AP), Mahmoud Abbas (également président du Fatah).

Barghouti et ses partisans accusent Abbas et son clan de chercher à le marginaliser et même de vouloir « l’enterrer ».

En novembre dernier, Barghouti a gagné haut la main les élections au sein du Fatah. Son statut de prisonnier et son implication dans le terrorisme sont au fondement de sa popularité. La victoire de Barghouti l’a placé en position de numéro deux après Abbas, et beaucoup attendaient du président de l’AP qu’il nomme Barghouti son vice-président.

Mais en février dernier, le Conseil central du Fatah, ou les partisans d’Abbas sont en position dominante, a asséné directement une gifle à Barghouti. Malgré l’écrasante victoire de ce dernier, c’est Mahmoud Aloul qui a été choisi comme vice-président du Fatah. Les partisans de Barghouti ont aussitôt accusé Abbas et ses fidèles de chercher à marginaliser le chef du Fatah en prison et même de vouloir « l’enterrer ».

La femme de Barghouti, Fadwa, a accusé Abbas de « céder » aux menaces d’Israël. Les responsables israéliens ont en effet vivement réagi à la victoire électorale de Barghouti, estimant qu’il s’agissait d’un vote en faveur du terrorisme. Fadwa Barghouti a déclaré que son mari avait gagné au premier tour, « ce qui signifie qu’il est le numéro deux du Fatah. On ne peut ignorer la position de Marwan Barghouti ».

Cette charge de la femme de Barghouti contre Abbas n’est pas une première. Dans le passé, elle a accusé Abbas et les dirigeants de l’AP de censurer toute information concernant son mari. Dans une lettre adressée à Abbas, elle a exprimé son « regret et sa douleur » face au manque de soutien d’Abbas dans la campagne qu’elle menait pour obtenir la libération de son mari. Elle a également dénoncé le refus du Fatah et des dirigeants de l’AP de financer la campagne qu’elle menait en faveur de la libération de son mari.

Ce n’est un secret pour personne qu’Abbas déteste la concurrence. Il fait la guerre à quiconque menace son pouvoir, surtout au sein du Fatah. Mohammed Da’hlan par exemple, ancien responsable de la sécurité du Fatah dans la bande de Gaza, est aujourd’hui considéré comme l’ennemi numéro un du président de l’AP. Da’hlan a été expulsé du Fatah sur l’ordre d’Abbas. Et il a également été dépouillé de son immunité parlementaire sur l’ordre de ce même Abbas. Da’hlan réfugié aux Émirats arabes unis, est recherché par Abbas pour « corruption » et « meurtre ».

Barghouti, pose cependant à Abbas un problème particulier. Les Palestiniens de la rue ne toléreront pas la diffamation, en tous cas pas la diffamation publique, envers un Palestinien emprisonné en Israël. Or Abbas considère Barghouti comme une menace réelle, en particulier au regard des sondages d’opinion qui, en cas d’élection présidentielle, donnent tous Barghouti vainqueur. Barghouti dans tous les cas est un cauchemar pour Abbas.

Abbas et Barghouti sont donc à couteaux tirés. Leur lutte pour le pouvoir est feutrée mais impitoyable. Barghouti veut succéder à Abbas, quand ce même Abbas fait tout ce qu’il peut pour le marginaliser. De source palestinienne, on apprend qu’Abbas n’éprouve aucune satisfaction de la grève de la faim lancée par Barghouti. Il pense que Barghouti essaie ainsi d’attirer les projecteurs sur lui, notamment à la veille de la rencontre entre Abbas et Trump à Washington. Abbas veut demeurer seul sous les projecteurs et ne supporte pas que Barghouti fasse la Une des journaux et qu’une de ses tribunes soit publiée par le New York Times.

Abbas n’est pas seul à avoir des problèmes. Barghouti sait mieux que personne que les Palestiniens ne supporteraient pas que le Fatah lave son linge sale en public et verraient d’un mauvais œil une attaque directe contre Abbas. Alors, Barghouti a recours à la diversion tactique traditionnelle : il porte le fer contre Israël. Il découvre soudain la dureté de ses conditions de détention et réclame des privilèges. Israël, dit-il, emprisonne les Palestiniens pour leur « résistance pacifique ». Abbas de son côté utilise aussi la grève de la faim pour exiger qu’Israël libère sans conditions tous les terroristes palestiniens, y compris ceux qui ont du sang sur leurs mains. La grève de la faim est en réalité une gigantesque campagne d’intoxication sur les vrais problèmes qui agitent le Fatah et n’a rien à voir avec les conditions des prisonniers dans les prisons israéliennes.

Hors les masques à destination des occidentaux, la « grève de la faim » de Barghouti se réduit à une lutte dont le seul enjeu est la conquête du trône du Fatah. Israël – l’État qui « maltraiterait » les terroristes palestiniens incarcérés – fait une nouvelle fois les frais des guerres intra-palestiniennes.

 

Bassam Tawil, un arabe musulman, est basé au Moyen Orient.

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