L’un des suspects du meurtre de Mireille Knoll, 85 ans, est de nouveau entendu aujourd’hui par les juges d’instruction du tribunal de grande instance de Paris. Yacine M. nie avoir tué la vieille dame le 23 mars dernier, dans son appartement du XIe arrondissement de Paris.
Depuis le début, Yacine M. nie être l’auteur du meurtre de la vieille dame juive, sa voisine, qu’il connaissait depuis tout petit. L’homme, âgé de 28 ans, ne devrait pas changer de discours ce lundi devant les juges d’instruction. Malgré les déclarations de son comparse, Alex C., qui dit l’avoir vu poignarder Mireille Knoll, en criant « Allah Akbar ». Malgré son passé jalonné de condamnations pour violences, malgré le couteau saisi chez sa mère – et que celle-ci aurait nettoyé – Yacine M. affirme que c’est son complice, Alex C., rencontré en prison, qui a tué la veille dame. Il assure que le couteau saisi chez sa mère lui servait à se scarifier, et à couper son « shit », sa résine de cannabis.
Depuis bientôt trois mois, les deux hommes sont mis en examen pour « homicide en raison de l’appartenance vraie ou supposée de la victime à une religion » et écroués. Après ce second interrogatoire de Yacine M., le prochain acte d’enquête sera, sans doute, la confrontation des deux suspects aux versions diamétralement opposées.
Guerre des polices
On s’en souvient, la mort de Mireille Knoll avait déclenché une immense vague d’émotion. Des milliers de personnes s’étaient rassemblées pour une marche blanche contre l’antisémitisme, cinq jours après sa mort. Selon nos informations, l’affaire, très sensible, a fait l’objet ces dernières semaines d’une véritable guerre des polices.
Quand, le 23 mars dernier, le corps de la vieille dame est découvert dans son appartement incendié du XIe arrondissement de Paris, la 2e Direction de la police judiciaire (DPJ) est immédiatement saisie de l’enquête en flagrance. C’est l’un des plus gros services de police judiciaire, compétent sur tout le nord-est de Paris. Ses enquêteurs font les premières constatations, interpellent les deux suspects, les entendent en garde à vue. La question du mobile antisémite est abordée, parmi d’autres : cambriolage qui aurait mal tourné, ressentiment personnel sur fond d’alcoolisme, etc.
A l’issue des gardes à vue, le parquet puis les juges d’instruction retiennent le caractère antisémite du crime – en raison principalement des déclarations d’Alex C. – donnant ainsi à l’affaire un énorme retentissement. Les magistrates ont-elles pensé que les policiers ne seraient pas à la hauteur ? Elles décident, début avril, de saisir également l’Office central de lutte contre les crimes contre l’humanité, les génocides et les crimes de guerre (OCLCH), un office de gendarmerie à compétence nationale, spécialisé notamment dans la lutte contre les crimes motivés par la haine et l’intolérance.
Les policiers, qui n’ont pas été prévenus, prennent plutôt mal l’arrivée inopinée des gendarmes, dans une affaire qu’ils mènent depuis le début, sans difficulté particulière. Au point que les juges font marche arrière : exit les gendarmes, l’Office vient d’être finalement dessaisi. Et pendant ce énième épisode de la guerre des polices, les résultats des tests ADN sur les couteaux saisis chez les deux suspects se font toujours attendre.
Corinne Audouin