Netanya, Ashdod et Raanana se vident des francophones

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Par Jacques BENILLOUCHE – Temps et Contretemps

Illustration : Raanana 81m² 3.000.000 shekels (925.000 euros)

C’est un phénomène nouveau que l’on n’a pas connu depuis longtemps, depuis la ‘alyah des années 1960/70 ; de nombreux immigrants français sont contraints de retourner en France, leur pays d’origine. Ce n’est pas la première fois que nous tirons le signal d’alarme sur la situation de familles dont les moyens se détériorent sous deux effets, le taux de change de l’euro qui était il n’y a pas longtemps encore à 3,90 shekels et qui est tombé à 3,25. La grande masse des retraités qui touchent leur retraite de France en euros ont perdu plus de 20% de leur pouvoir d’achat. Si l’on ajoute l’augmentation des prix qui devient presque incontrôlable, le compte n’y est plus. Certes, ceux qui ont planifié à long terme en devenant propriétaires d’un appartement ne sont pas concernés par la hausse des loyers mais ils sont forcés de compter leurs sous tous les mois.

Les Français qui ont vendu leur appartement à Créteil, Charenton ou Fontenay ne peuvent pas acheter l’équivalent dans une banlieue proche. Même les propriétaires de Levallois, nouvelle banlieue chic, ne peuvent se loger avec l’équivalent en Israël sauf à la rigueur à Ashkelon qui reprend d’ailleurs des couleurs. Il vaut mieux oublier la région de Tel-Aviv où les prix sont devenus inabordables. Il est vrai que Airbnb est passé par là et que les propriétaires ne veulent plus louer à long terme préférant gagner plus, sans compter que les hôtels sont touchés par cette clientèle qui a fui. Il suffit pourtant, comme en Espagne d’interdire Airbnb et surtout de forcer les hôtels à réviser leurs prix à la baisse s’ils ont un meilleur remplissage.

Il fut une époque où les retraités à faible revenu s’installaient en Israël car la vie était moins chère et le soleil brillait. Mais ce n’est plus le cas ; Israël est devenu le pays des riches, des nouveaux riches surtout. Quant à la hausse des prix, il existe beaucoup d’experts économiques plus compétents que les journalistes pour trouver des solutions immédiates. La seule mesure qui doit être appliquée est la baisse du taux de TVA sur les produits alimentaires et de première nécessité à 5% compensée par une hausse à 20% sur les autres produits. Les gouvernements prétendent que cela grèverait leur budget et mettent en avant les besoins militaires. En fait, ils craignent un bouleversement qui mettrait en danger les monopoles alliés et les banques qui décident de la politique économique à la place des ministères. Israël n’a jamais gagné autant d’argent et les caisses de la Banque d’Israël explosent de devises qui, le cas échéant pourraient être prêtées aux autorités du pays. Avigdor Lieberman se glorifie que le budget n’est pas seulement en équilibre mais en excédent. Mais à quoi sert de s’asseoir sur un tas d’or lorsque des pans entiers de la population ne bouclent plus leur fin de mois ?

Quant à l’immobilier on se perd en conjectures. Aucun immeuble social n’a été construit depuis l’époque des travaillistes et d’Amidar alors qu’en France chaque Mairie doit consacrer 20% de ses constructions à du logement social. Il suffit d’imposer quelques logements sociaux dans tout immeuble construit, le premier étage par exemple. Mais on continue à engraisser les monopoles immobiliers qui, à force d’indigestion, pourraient subir l’équivalent de la crise américaine des « subprimes » de 2008. L’État pourrait confier des terres domaniales à des organismes sociaux de construction qui feraient baisser d’un coup les prix des logements de 30%, soit l’équivalent du prix du terrain. Cela implique de s’opposer aux monopoles immobiliers, dont certains se goinfrent au dépend de la population.

Mais le nouveau problème est la question des nombreux retours des Français qui réintègrent leur pays d’origine où la vie est moins chère, où les avantages sociaux sont constants, où ils peuvent se loger pour un prix très raisonnable et où le gouvernement aide beaucoup en ces périodes difficiles. Ils le font discrètement car ils en honte après avoir claironné leur retour à la terre promise. A Paris, un trois-pèces se loue à 1.500 euros, moins de 4.000 shekels soit la moitié des prix des loyers dans la périphérie des grandes villes. Des familles de Netanya, de Raanana, de Jérusalem, d’Ashdod et de Tel-Aviv retournent avec leurs enfants à leur point de départ car en travaillant, ils ne peuvent pas subsister même en rognant sur la nourriture. Le nombre de colis distribués aux «pauvres» par des associations caritatives est en très forte expansion. Et l’Agence juive reste muette sur ce point et continue sa propagande. Pire, elle cache aux futures arrivants la réalité de la vie dans le pays. Elle continue à faire la promotion d’un Israël idéal qui n’existe plus depuis longtemps.

Il est vrai qu’Israël ne manque pas d’immigrants et qu’il peut se passer des Français considérés comme râleurs. 12.175 immigrants sont arrivés d’Ukraine et 18.891 de Russie en l’espace de cinq mois. Les Russes et les Ukrainiens sont bien contents de sauver leur peau en Israël. Les Français peuvent donc repartir. Sur 3.000 nouveaux immigrants chaque année, le retour d’un millier reste négligeable pour le pays.

Le guide Frédéric Coscas, qui n’émarge dans aucun parti, et qui ne peut être taxé de mauvaise foi, a explosé dans un texte qui a eu peu d’écho : «Aujourd’hui il y a un phénomène très grave et non maîtrisé par le gouvernement israélien et l’Agence juive, c’est la chute de l’euro face au shekel. Personne autour de nous ne veut monter maintenant. C’est trop cher de venir vivre ici. Et pire, des centaines de Français, notamment des retraités, rentrent en France. Tel-Aviv, Netanya et Jérusalem sont vides. Le coût de la vie augmente de façon exponentielle et les revenus des gens diminuent. C’est un désastre et apparemment personne ne s’en soucie. Ni l’Agence juive ni le gouvernement israélien. Pendant ce temps, les banques et les investisseurs s’enrichissent. On nous dit qu’on ne peut rien faire, que c’est la loi du marché. C’est un mensonge… Nous pouvons agir. Le problème est que 5 ou 6 familles dirigent vraiment le pays et elles se divisent toutes et bloquent toute avancée vers la compétition. La Banque d’Israël est pleine d’argent mais ne le distribue pas au peuple. L’Agence juive d’abord. Il faut 1/ Permettre dès le départ des programmes d’aide aux immigrés qui sont en Israël pour les empêcher de revenir en France 2/ Faire pression sur le gouvernement pour modérer la chute de l’euro 3/ Augmenter les budgets de l’aliyah et aider les familles à trouver un logement avec aide au loyer pendant plusieurs années (se loger en Israël est une tâche impossible). Est-ce que l’une de mes connaissances tiendra compte de mon cri d’alarme. Je suis dans le doute. Je ne suis pas une personne de réseau mais une personne amoureuse de mon pays uniquement… Mais, j’ai jeté une bouteille à la mer, on verra maintenant».

On n’y peut rien parce qu’Israël est un pays égoïste et que la vie est dure pour tout le monde à l’exception des 10% de privilégiés qui voient leur situation s’améliorer de jour en jour. En cette veille d’élections, il serait temps que les partis mettent en avant leurs programmes économiques parce qu’il y a deux millions d’Israéliens qui souffrent et qui sont défavorisés. La crise est déjà partiellement chez nous car, signe significatif, les startups licencient. Ce n’est pas encore la panique mais le signe que de nombreux emplois vont disparaitre à moyen-terme. Face à la crainte d’une «bulle», plus de 500 licenciements en 24 heures. AID Genomics a transféré son centre de R&D à l’étranger, limogeant 400 personnes ; Asurion a fermé son centre ; des milliers d’employés ont perdu leur travail, ces derniers mois. L’entreprise de cybersécurité Tufin a licencié 55 personnes. Selon les chaines de télévision, plus de 3.000 employés du secteur high-tech ont été limogés ces derniers mois, et la moitié seulement en juillet 2022. Cela risque d’entrainer des drames familiaux.

On ne comprend pas les politiques gouvernementales car il existe un problème sérieux d’utilisation des fonds publics. La banque Centrale d’Israël n’effectue pas le travail pour lequel elle est mandatée, consistant à mettre ses fonds à la disposition de la collectivité, en particulier quand l’inflation rode alors que les financiers sont optimistes quant à la croissance globale de l’économie. Le produit intérieur brut a augmenté de 6,8% au deuxième trimestre de 2022. L’excédent budgétaire depuis le début de 2022, recettes supérieures aux dépenses, est de 34,4 milliards de shekels (10 milliards d’euros) alors que tous les pays européens sont en déficit. Il est normal que cet excédent budgétaire, ce trop perçu, soit redistribué sous une forme à convenir.

Les réserves de change d’Israël à la fin du mois de juillet 2022 s’élevaient à 197,841 milliards de dollars, soit une augmentation de 4,031 milliards de dollars par rapport à leur niveau à la fin du mois précédent. Par comparaison, la France détient 249 milliards de dollars. Et pendant ce temps, les prix des logements bondissent de 18%, tandis que l’inflation pourrait atteindre 5,2% en 2022. Ces chiffres sont irréfutables car ils proviennent des services de l’État.

L’augmentation des taux d’intérêt de la Banque d’Israël, passés de 0,75% à 2%, va alourdir les montants des remboursements de crédit immobilier de plusieurs centaines de shekels par mois.

Allumer les feux de détresse est mal vu en Israël. Certains considèrent la démarche comme une volonté de décourager l’alyah. Pourtant, il est normal de mettre les futurs immigrants devant la réalité qui les attend en Israël pour éviter les drames sociaux qui se traduisent souvent par des déséquilibres familiaux, des divorces et des ruines financières.

13 Commentaires

  1. Tout ceci est le résultat des politiques de NETANYAHOU qui n’a qu’un seul D.ieu ….l’argent.
    Pour notre part, pourtant un peu privilégiés, il n’est pas dit que nous laissions nos avoirs en Israël au delà des 10 ans d’exonération. ….Et peut être même quitter ce pays de gens incompétents et de voleurs.

    • Oh là, pas mal : cela n’existe plus, à votre avis, des gens qui pensent sincèrement pour le bien du public ? Netaniahou pourtant semble bien, selon une importante partie des gens, oeuvrer clairement pour la chose publique, sans chercher ses propres intérêts, au-delà du raisonnable (faut bien vivre, non ?). Et qui est-il mieux ?
      Actuellement, toute la catastrophe présente provient exactement de ses opposants, et nous n’avons pas cessé de mettre le public en garde : c’est cela, la Gauche, et ses sombres sbires.
      Puis sincèrement, cela est mieux en France, avec un gouvernement encore plus pourri ? Difficile de recevoir toutes ces déclarations haineuses.

  2. Voila pourquoi je suis parti.
    Israël n’appartient pas aux Juifs mais aux israéliens.
    Desormais et cela est malheureux, ils défendront leur pays tout seul.
    Écœuré !

    • Pour arriver en France qui n’appartient qu’aux Français…
      La vie est comme cela : nous ne dépendons que de Hachem, où que nous vivions…

  3. Oui Monsieur, je suis rentré en France pour que mon dernier fils reprenne un cursus normal et surtt qu’il ne fasse pas l’armée. Je précise que les 2 premiers ont fait l’armée pour une poignet de main et un merci.
    Je ne parle pas du suivi scolaire des enfants jusqu au BAC pour ne pas etre indigent.
    Alors je vis en France désormais chez MOI, je sais que si j’ai faim D’… preserve l’Etat m’aidera.

    • Pour ce qui est de vos choix dans votre vie, ce sont les vôtres, en particulier pour l’armée et l’éducation que vous tenez à donner à vos enfants. Nous préconisons d’autres voies. Mais dire qu’on est chez SOI en France, c’est très triste. Cela ne fait pourtant que 75 ans que ces charmants français ont envoyé nos parents à Auschwitz…

  4. Moi aussi je pense souvent à « retourner » mais je croit qu’il faut bien réfléchir à la question de savoir pourquoi on fait la Aliya : si on imagine que notre vie en Israël va ressembler à ce qu’on a pu entrevoir lors de nos vacances dans le pays, des « vacances prolongées » en quelque sorte et qu’il n’y aura aucun problème parce qu’on est « entre nous », que l’on va être aidé comme en France, etc…il vaut mieux ne plus y penser.
    Mais si on se dit qu’il y a quelque chose à prendre (ou mieux encore à apporter) et que, quelles ques soient les difficultés, c’est quand même mieux qu’en France, la démarche devient différente est on peut réussir à y vivre correctement.

  5. Ce qui est inadmissible en Israël c’est l’absence de concurrence,
    Moins de 100 familles tiennent toute l’économie
    – Les traces d’importation sont excessives
    – Les banques ont des tarifs excessifs, ponctionnent les épargnants. Pourquoi n’y a t il pas de banque en ligne concurrentielles comme en France ?
    L’économie est verrouillée :
    – Souvenez du n’2 de Free Mickael Boukobza qui a monté Golan en l’Israël, on a empêché de se développer alors qu’en France l’état avait favorisé Free pour abaisser les abonnements des concurrents.
    – vendre une société comme Tnouva aux chinois est ce c’est bon pour Israël s’ils exportent une partie de sa production en chine ? Cela va t’il faire baisser les prix en Erets ?
    Quant à l’immobilier je n’en parle même pas tant à l’achat qu’à la location

  6. C’est comme la mer, il y a du flux et du reflux… On parle bien de vagues d’Alya. … Maintenant, c’est pour certains malheureusement la yerida…. J’ai un fils qui est parti en eretz il y a 18 ans.. Pour rien au monde, il ne reviendrait.
    Je crois en 2 réalités spirituelles :
    Israël s’acquiert par des souffrances.
    C’est une terre qui choisit ces habitants.
    Je pense aussi que quand on veut entrer dans le palais du Roi, il faut d’abord s’essuyer les pieds sur le paillasson.
    Tout ceci pour dire que les considérations politiques et économiques qui font que les Français partent ne sont q’un habillage. C’est la Terre sainte et n’y habite pas qui veut. C’est comme ça. Pourquoi y a t-il des Lapid et cie aussi la bas ? On n’est pas dans les ‘Hechbonoth du Boré ‘olam.
    On peut expliquer des phénomènes, mais la volonté du Roi des rois n’est pas dans notre compréhension.
    « Yechouat Hachem ké-‘éref ain », qui dit que si ces personnes avaient décidé de rester en eretz, coûte que coûte, leur situation aurait pu s’inverser dans le bon sens des le lendemain, un bon Juif ne désespère et ne renonce jamais, malgré un « décorum » apparemment négatif…

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