Mohamed ben Salman est-il le nouveau messie d’Arabie ?

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Pour l’heure, le prince Mohamed ben Salman (MBS) n’est que l’héritier du Royaume saoudien mais ses multiples activités témoignent de la mégalomanie de ses projets révolutionnaires dans un monde musulman archaïque, déchiré entre sunnites et chiites, modérés et fanatiques, dans ce pays wahhabite, lequel a grandi le terroriste le plus dangereux de la planète : Ben Laden. Qui aurait imaginé un tournant historique si rapide en Arabie ? MBS s’est-il inspiré des Sept piliers de la sagesse ? Est-il capable de changer complétement la donne géopolitique du Moyen-Orient ? Charmeur, coqueluche des médias et des réseaux sociaux, MBS parcourt le globe et négocie avec tous les grands la planète. Au programme : achats d’armes, investissements, médiation, et le souhait d’un islam tolérant et modéré. On apprécie son ouverture sur le monde, l’encouragement au tourisme non religieux avec la construction d’une nouvelle ville moderne au bord de la mer Rouge ; on tend l’oreille à ses projets pour l’égalité aux femmes notamment à des postes militaires. Il leur avait offert même un permis de conduire…

MBS est devenu une superstar de la diplomatie mondiale. Avec des idées et du pétrole en abondance, même le ciel n’a plus, pour lui, des limites. Ses ambitions extravagantes sont notamment dans la conquête du nucléaire et de l’espace. Il souhaite représenter une puissance régionale et transformer son gigantesque pays désertique en une oasis florissante, un centre international pour la paix et la coexistence entre les trois religions monothéistes.

Mohamed ben Salman fête ces jours-ci ses 37 printemps et l’avenir est devant lui. A l’âge de 29 ans, il est déjà désigné ministre de la Défense et voilà que ses zones d’ombre apparaissent soudain. Devant un vieux père malade, il dirige son pays avec une main de fer. Dès le départ, il procède à une répression féroce : des centaines d’arrestations arbitraires, une purge sans précédent au sein du palais royal et contre tous les opposants. Il est même impliqué dans l’assassinat d’un journaliste américano-saoudien à Istanbul et s’embrouille avec Washington. Ses relations avec l’administration Biden, chatouilleuse sur les droits de l’Homme, se dégradent et il n’obtient plus ses commandes d’armement pour pouvoir faire face aux menaces iraniennes et gagner sa guerre impitoyable au Yémen. Il finit par céder, accepte une trêve par une médiation chinoise, et renoue les relations diplomatiques avec l’Iran, son ennemi implacable.

Cependant, MBS comprend très vite que la normalisation avec les Iraniens l’écarte des Etats-Unis et d’Israël et lui cause de graves problèmes avec les pays sunnites au moment même où les ayatollahs préparent leur propre bombe atomique et menacent toute la région. Le rapprochement des ayatollahs refroidit également ses relations avec tous les émirats du Golfe persique et particulièrement avec son rival Mohamed ben Zayed (MBZ). Ils lui reprochent l’abandon du camp occidental alors que Téhéran s’aligne avec les Russes et les Chinois dans la guerre en Ukraine. C’est alors qu’il change de cap et organise à Djeddah une conférence internationale pour trouver une solution de paix à l’agression russe. On remarquera que sa politique étrangère évolue en zigzag, est volatile et souvent irréfléchie. Prudence et vigilance obligent pour suivre dans tous les azimuts ses grands pas.

Déjà en 2018, MBS avait apprécié un rapprochement avec l’Etat juif. La visite de Donald Trump à Ryad et les Accords d’Abraham l’avait encouragé à une normalisation par étapes avec Israël. Depuis, toutes les spéculations et les opportunités sont dans l’air et avec elles la signature de fabuleux contrats commerciaux dans un nouveau Proche-Orient devenu enfin paisible.

Après la normalisation signée avec les Emirats du Golfe peut-on y croire vraiment ? Ces jours-ci, nous célébrons le centenaire de la naissance de Shimon Pérès qui avait rêvé à un nouveau Proche-Orient après la signature des Accords d’Oslo. Il nous a berné d’illusions. Trop pressé, cherchant un traité rapide, la gloire et le Nobel, Pérès était trop en avance sur son temps. Il a dangereusement fait confiance à Yasser Arafat. Cependant, trente ans après le fiasco des Accords d’Oslo, un accord commercial et stratégique avec l’Arabie saoudite n’est guère une utopie puisque plus d’un million de touristes israéliens ont pu voir de leurs propres yeux que le rêve peut devenir une belle réalité dans cette péninsule et pour toute la région.

Benjamin Netanyahou est-il capable de relever le défi ? Ses multiples interventions sur les chaînes américaines nous laissent parfois dubitatifs mais nul doute, nous devrions poursuivre les efforts pour aboutir avec MBS à une normalisation dans nos rapports bilatéraux et régionaux. Mohamed ben Salman pourrait être un partenaire crédible si nous lui proposons un plan audacieux et pragmatique. Le temps est propice pour toutes les parties. Washington renforcerait sa position dans la région au détriment de l’Iran et de la Chine. Un accord tripartite USA-Arabie-Israël faciliterait une aide aux Palestiniens, renforceront l’Egypte et la Jordanie mais aussi le Liban qui souhaite mettre un terme à la crise et desserrer l’étau du Hezbollah. Les Saoudiens profiteront d’un accord de défense mutuelle avec les États-Unis, obtiendront des technologies nouvelles et un programme nucléaire civil. Bien entendu, avec des garanties solides contre une prolifération atomique dans notre région et le refus d’offrir aux Saoudiens un armement plus sophistiqué que possède Israël. La supériorité qualitative des armes est une condition sine qua non pour Tsahal.

L’accord éventuel avec MBS donnera un second souffle à l’économie régionale et mondiale. Israël en profitera largement sur tous les plans et domaines. Les opportunités existent mais tout dépendra de la bonne volonté saoudienne et surtout du leadership de Netanyahou et ses capacités d’apaiser les esprits à l’intérieur du pays.

Le Cape – Freddy Eitan

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