Dans le dernier cours donné avant sa disparition, le rav Yits’haq Hutner (1906-1980, auteur du Pa’had Yits’haq, un important ouvrage de pensée juive), traite du sujet de ‘Hanoucca. Il rappelle que le Rambam, au début des lois sur cette fête, décrit le miracle comme marquant également le retour de la royauté dans l’enceinte du peuple juif, depuis les Asmonéens et jusqu’à la destruction du Temple.
Pourtant étonnant ! Hérode a arraché la royauté des mains des Asmonéens. Le pouvoir, pris par un esclave d’origine édomite, constituerait-il une bénédiction ? On sait que sous son règne, il assassina ses maîtres, ainsi qu’un grand nombre de Sages du peuple d’Israël, comme rapporté dans la Guemara dans Baba Bathra (3b).
Pour répondre à ce problème, le rav Hutner s’appuie sur le livre ‘Assara Maamaroth du Rema’ de Fano (‘Haqor hadin, 2,19). Il fait remarquer que le principe « Qui sont les rois ? Les Sages ! » (Guittin 62b) a été institué du temps de Hillel le prince (l’ancien), descendant du roi David, et justement contemporain de cette épisode. C’est alors que le Beth Din a décrété que les Sages prendraient dorénavant la fonction de princes, rôle à partir de là héréditaire, à l’image de la royauté.
Le verset qui fixe que « Le sceptre n’échappera point à Yehouda, ni l’autorité à sa descendance » (Beréchith/Genèse 49,10) s’appliquera dès lors à Hillel et à ses fils, les princes, et conférera à leur rôle une nouvelle dimension.
C’est donc par le mérite des Asmonéens que le « règne de la Tora » a pris forme. Voilà un aspect supplémentaire du miracle de ‘Hanoucca.
Rav Hutner, tout au long de son commentaire sur cet épisode de notre histoire, fait passer le message : la lutte contre les Grecs demeure essentiellement culturelle. Seul notre royaume, celui de la Tora, peut vaincre nos opprésseurs, les quatre empires de l’exil d’Israël.
La stratégie spirituelle des Asmonéens intensifiera l’impact de la Tora orale – l’« arme secrète », qui va triompher de la sagesse grecque. ●
Kountrass Magazine numéro 191