Illustration : Il fut un temps. Louis XIV.
Par Michèle Mazel
Longtemps la voix de la France a résonné haut et fort. Aujourd’hui on l’entend encore mais on ne l’écoute plus.
Qui se souvient de l’époque où la France, chatouilleuse et susceptible, envoyait son armée punir un potentat local coupable d’avoir frappé d’un coup d’éventail le visage de son ambassadeur ! Aujourd’hui on kidnappe impunément des citoyens français de par le monde ; d’autres sont emprisonnés. Il faut alors de longues tractations pour qu’otages ou prisonniers soient libérés moyennant rançon ou concessions politiques. Un peu comme lorsque les pirates qu’on appelait barbaresques écumaient la Méditerranée.
Naguère encore la France protégeait les Chrétiens d’Orient et leurs lieux saints. Aujourd’hui la plupart de ces Chrétiens ont été massacrés ou chassés par la vague d’un Islam intolérant et Paris ne protège plus que les lieux saints chrétiens de Jérusalem que personne ne menace.
Il faut reconnaître toutefois que c’est l’occident dans son ensemble qui a baissé les bras. Seules deux grandes communautés subsistent encore. Un peu moins de deux millions de Chrétiens au Liban, et environ dix millions de coptes en Egypte. Ces derniers sont toujours soumis à des mesures discriminatoires et leurs églises ont été plusieurs fois victimes de sanglants attentats perpétrés par des terroristes islamistes ces dernières années.
La nature, dit-on, a horreur du vide et face au silence des chrétiens, ce sont les islamistes qui montent au créneau. On vient de le voir avec « l’indignation » que les propos du président français, présentant une feuille de route pour lutter contre ce qu’il appelle pudiquement « le séparatisme » et l’émergence d’un état islamique dans l’Etat, a provoqué au sein de l’Islam traditionnel.
L’Académie de recherche islamique affiliée à Al Azhar, la plus ancienne et la plus respectée des institutions sunnites, a qualifié de « raciste » et « d’incitation à la haine » les déclarations d’Emmanuel Macron tandis que le grand Imam Ahmed el Tayeb exprimait son « immense colère » devant des termes comme « terrorisme islamique » qu’il considère comme une insulte à la religion et à ses fidèles. Des propos presque modérés en comparaison de ceux d’Ibrahim Mounir, grand Maître de la Confrérie des Frères Musulmans – mouvement interdit et qualifié de terroriste en Egypte – qui de son siège en Angleterre « rappelle » que la loi d’Allah a préséance sur la loi des hommes, ajoutant que les principes fondamentaux de son mouvement se sont toujours montrés capables de renverser ou de défaire les régimes qui cherchaient à forcer les musulmans à abandonner leur religion, quitte à utiliser des voies illégales ou à recourir à la violence.
Certains voient là une menace à peine déguisée. Autre condamnation mais sans menace explicite, celle du président turc Recep Erdogan, qui cherche à se positionner comme nouveau champion de l’Islam. Il avait déjà eu l’occasion de protester vigoureusement contre la décision de Macron de faire du 24 avril la journée de la commémoration du génocide arménien, une invention selon les Turcs. Cette fois, n’hésitant pas à s’immiscer dans la politique intérieure d’un Etat souverain, il voit dans son programme une provocation, et qualifie le projet de restructuration de l’Islam de France de manque de respect doublé d’impertinence. En conclusion il appelle le président de la République française à agir de façon responsable et non en colonialiste. On appréciera ces conseils de la part d’un dictateur qui a toujours recours à la diplomatie des canonnières, envoyant ses troupes ou des milices à sa solde non seulement en Syrie en Irak et en Libye mais encore au cœur de l’Europe où il s’immisce dans le conflit du Nagorno-Karabakh.
Par Michèle Mazel