Par Maurice-Ruben Hayoun
Cette fois-ci, la messe est dite, si l’on ose s’exprimer ainsi dans ce contexte précisément. La Knesset israélienne s’est dissoute, il n’y a plus de retour en arrière et les citoyens israéliens iront voter le 1er novembre prochain pour élire leurs représentants. Après maintes discussions entre la coalition présidée par le Premier ministre sortant, Naftali Bennett et l’opposition menée par l’insubmersible Benjamin Netanyahou, Israël sera touché par l’instabilité politique.
Toutes ces turbulences, voire ce naufrage, toutes ces difficultés, étaient prévisibles depuis que Naftali Bennett et son colistier Yaïr Lapid avaient constitué un gouvernement qui, pour la première fois depuis la création de l’État hébreu, faisait place à des représentants de la minorité arabe. En France, l’histoire politique connait cette démarche du soutien sans participation. Un parti politique quelconque apporte ses voix pour que le gouvernement ait une majorité, mais sans avoir des ministres.
Pour bien comprendre cette voie sans issue, il faut se représenter chez nous un gouvernement allant de Jean-Luc Mélenchon à Marine Le Pen… Ces deux personnalités politiques ne s’entendent sur rien…
Il arrive un moment où les tensions sont trop fortes puisque certains membres de cette même coalition avaient annoncé publiquement qu’ils ne voteraient pas la loi prolongeant le statut juridique ambigu d’un demi-million de citoyens israéliens vivant en Judée-Samarie. La droite de Benjamin Netanyahou savait que les députés arabes du parti Ra’am, ralliés à Bennett ne voteraient pas une telle loi… Sans ces voix arabes, l’exécutif n’avait plus de majorité. Il suffisait d’attendre que le gouvernement tombe de lui-même, comme un fruit mûr. Tel fut le calcul de l’opposition et de son chef, Benjamin Netanyahou.
Cette coalition a duré une petite année mais, contrairement à certaines déclarations, ce ne fut pas une année stérile ni en pure perte. Ce gouvernement a offert à un parti arabe, proche du mouvement Hamas de Gaza, la possibilité d’obtenir des crédits substantiels pour les quartiers arabes et combattre la criminalité dans ces secteurs. Le nombre d’homicides commis dans les villes mixtes ou les secteurs arabes de Jérusalem, se compte par dizaines chaque année. Durant cette année, ces députés ont apporté leur soutien au gouvernement de l’État juif dont ils sont les citoyens de plein droit.
Il faudra bien qu’un jour, que l’on souhaite très proche, ce pays moralise certaines pratiques qui n’ont plus lieu d’être. Il faudra bien qu’un jour ces politiciens donnent enfin l’exemple au reste de la population. Le rêve sioniste est comme il est, mais ceux qui le servent devraient le servir réellement.
En annonçant la chute de son gouvernement, Naftali Bennett a dressé une liste de ce qu’il avait fait et de ce qui reste à faire. Depuis un certain nombre d’années, la précarité a augmenté, maintes familles vivent sous le taux de pauvreté. Il ne suffit pas que le secteur du High Tech soit prospère et se développe, il faut aussi que les gens simples puissent acquérir les biens de consommation courante, les produits de base. Que les jeunes couples ne s’endettent palus sur des décennies avant d’avoir enfin un toit au-dessus de leur tête…
Et on ne parle même pas de la question sécuritaire toujours préoccupante.
Dans les livres du prophète Samuel, on parle longuement de la lutte fratricide entre le roi Saül et son rival ou éphémère beau-fils, David… On évoque une rencontre entre les deux chefs d’État-major des deux belligérants : Yoav ben Serouya et Avner ben Ner, appelés à faire cesser l’effusion de sang et à refermer les plaies…
La phrase que je vais citer est révélatrice de la valeur inestimable de la paix. Cette phrase vieille d’au moins trois mille ans, le général Moshé Dayan l’a reprise pour servir de titre à son autobiographie : « Est-ce que le glaive ne sera donc jamais repu » (Ha-la-nétsah tokhal harév ?)