Macron reconnait l’échec des négociations avec l’Iran

Macron reconnait l’échec des négociations avec l’Iran

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Les confidences d’Emmanuel Macron sur l’Iran.

En visite aux Émirats arabes unis, le président français s’est laissé aller à une étonnante analyse de la crise du nucléaire iranien.

Tout auréolé de la signature d’un contrat record de vente de Rafale aux Émirats arabes unis, le président de la République n’en a pas moins perdu le sens de la gravité lorsqu’il a évoqué l’une des plus grandes crises diplomatiques du moment : le dossier du nucléaire iranien. Alors qu’il commentait l’achat par Abou Dhabi de 80 avions de chasse français pour un montant total de 16 milliards d’euros, Emmanuel Macron a été interrogé par une poignée de journalistes, dont celui du Point, au sujet de l’avancée des négociations entre l’Iran et les grandes puissances, qui ont repris cette semaine à Vienne après cinq mois d’interruption.

But des pourparlers : parvenir à un retour commun de l’Iran et des États-Unis dans le cadre de l’accord nucléaire iranien (JCPOA). Signé en juin 2015, ce texte limitait l’avancée du programme atomique de la République islamique en échange d’une levée des sanctions internationales contre son économie. Mais Donald Trump s’en est unilatéralement retiré trois ans plus tard et a rétabli les mesures punitives américaines contre Téhéran, avant que l’Iran ne reprenne à son tour en mai 2019 ses activités nucléaires sensibles pouvant lui permettre d’obtenir la bombe atomique.

Pessimisme

Or, cinq jours à peine après le début des négociations, Emmanuel Macron s’est montré pour le moins pessimiste sur la suite des pourparlers. « Je pense qu’il est probable que ce round de négociations n’aboutisse pas compte tenu des positions », a déclaré le président français qui s’exprimait depuis le pavillon d’honneur de l’exposition universelle de Dubaï. « Cela veut-il dire que la négociation ne se rouvrira pas ensuite, même rapidement ? Je pense qu’il ne faut pas l’exclure. » Après une semaine de discussions ardues, les diplomates de l’Iran et du P4 + 1 (Russie, Chine, France, Royaume-Uni, Allemagne, toujours signataires de l’accord), ainsi que ceux des États-Unis qui se tenaient à l’écart, ont quitté la capitale autrichienne afin de procéder à des consultations dans leur pays respectif.

Loin d’avoir conclu un compromis, les différentes parties ont au contraire évoqué d’importants blocages. De hauts diplomates de la France, de l’Allemagne et du Royaume-Uni ont ainsi exprimé vendredi leur « déception et préoccupation » face à l’intransigeance dont ils accusent l’équipe iranienne, issue du nouveau gouvernement du président ultraconservateur Ebrahim Raïssi. « Téhéran revient sur la quasi-totalité des compromis qui avaient été difficilement trouvés » au cours du premier cycle de négociations entre avril et juin dernier, se sont-ils émus auprès de l’Agence France-Presse. Les pourparlers doivent reprendre en début de semaine prochaine, « pour voir si ces divergences peuvent être surmontées ou non », ont-ils précisé.

Sécurité du Golfe et d’Israël

Le nœud gordien des négociations demeure la question des sanctions américaines. L’Iran souhaiterait que l’ensemble des 1 500 mesures imposées par Donald Trump soient levées, y compris celles liées au terrorisme et aux violations des droits de l’homme, tandis que les États-Unis ne se disent prêts à toucher qu’aux sanctions sur le programme nucléaire iranien. Mais d’ores et déjà, Emmanuel Macron semble regarder au-delà des négociations de Vienne. « Il est important de réengager une dynamique un peu plus large et d’y impliquer les puissances régionales », explique-t-il depuis Dubaï. « Je pense qu’il est très difficile de trouver un accord si les pays du Golfe, Israël et tous ceux qui sont directement touchés dans leur sécurité, n’en sont pas partie prenante. Le deal de 2015 a besoin de pouvoir inclure les pays de la région, en tout cas que leurs intérêts soient pris en compte et qu’ils soient concertés. »

Une précédente annonce en ce sens, plus tôt dans l’année, avait provoqué l’ire de la République islamique, qui avait catégoriquement rejeté le moindre changement à la configuration actuelle du JCPOA. Or, le président français persiste et signe, et évoque un accord élargi qui englobe, outre le dossier du nucléaire iranien, la problématique de l’influence régionale de l’Iran. « Je pense que tout le monde est conscient du fait que de ne pas discuter, et ne pas essayer de retrouver un cadre, à la fois au sujet du nucléaire mais aussi sur les sujets régionaux, affaiblit tout le monde et demeure plutôt un facteur d’augmentation de la conflictualité », souligne le président. « L’objectif doit être de définir ce cadre, et mon souhait est qu’il ne se limite pas au nucléaire, même si c’est un sujet essentiel. » Une déclaration de nature à réconforter l’allié émirien, vent debout contre l’ingérence iranienne au Moyen-Orient, mais qui risque là encore de se heurter au refus de Téhéran, qui a exclu de négocier sur tout autre sujet que le nucléaire.

Pas d’alternative

Il y a pourtant urgence. Selon le dernier rapport de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), la quantité d’uranium enrichi par l’Iran atteignait début novembre 2 489,7 kg, dépassant de plus de douze fois la limite autorisée par le JCPOA. En outre, la République islamique a accumulé 17,7 kg d’uranium enrichi à 60 %, se rapprochant du seuil de 90 % nécessaire à la conception d’une bombe, ce dont elle se défend. La situation est d’autant plus alarmante que les inspecteurs de l’AIEA sont aujourd’hui limités dans leur surveillance des sites iraniens sensibles. « Un des points importants, en tout cas à court terme, sur lequel il ne faut pas transiger, est que l’AIEA ait accès aux sites et restaure un suivi de qualité », souligne Emmanuel Macron, qui s’est entretenu à ce sujet avec le directeur général de l’AIEA, Rafael Grossi, et le président iranien, Ebrahim Raïssi. « Et aujourd’hui, nous n’y sommes pas. »

Problème, le président français, tout comme l’ensemble de la communauté internationale, semble aujourd’hui bien en peine de proposer une alternative crédible aux négociations de Vienne sur le nucléaire pour faire revenir l’Iran à ses engagements. S’il n’écarte pas un durcissement contre Téhéran, Emmanuel Macron n’évoque pas, en revanche, un instant l’hypothèse d’une confrontation militaire, comme Israël en agite régulièrement la menace. « Je crois qu’il faut trouver quelque chose qui permette à la communauté internationale d’éviter, pas simplement l’enrichissement d’uranium, mais l’acquisition de l’arme nucléaire par une puissance régionale, parce que ce serait un facteur de trouble pour la région et au-delà », résume le chef de l’État. « Et dans le même temps, faire en sorte que les voies et moyens pour y arriver ne soient pas eux-mêmes des facteurs de déstabilisation à court ou moyen terme pour les [pays] voisins. C’est cela l’équation. »

La France est donc prise en étau entre son alliance avec les pays du Golfe – et les milliards de dollars qui devraient rentrer dans ses caisses- et son rôle de négociateur qui perd de sa neutralité dans l’affaire du nucléaire iranien. Si ces négociations échouent, comme cela semble être le cas, il faudra se rendre alors à l’évidence ,Trump et Netanyahou avaient raison. Accord ou pas accord l’Iran cherche à avoir son arme nucléaire. Les sanctions étant le meilleur moyen de réduire les capacités financières et de pousser le peuple à la révolte. La guerre de basse intensité menée par Israël contre le programme nucléaire l’a retardé. Tandis que l’Europe a passé son temps à contrarier cette stratégie Trump Netanyahou. Maintenant les négociateurs en particulier la France sont dans un cul-de-sac.

Le Point et JForum

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