Les pots-de-vin à l’étranger sont-ils admissibles ? Pour Transparency International, qui enquête sur la corruption transnationale, la réponse est non. L’ONG publie ce mercredi une étude se basant essentiellement sur les enquêtes, procès et condamnations engagés par les juridictions nationales sur des versement occultes réalisés à l’étranger.
La pratique est en effet interdite pour tous les signataires d’une convention de l’OCDE datant de 1997: un engagement à ne pas corrompre d’agents publics, même si les actes délictueux ont lieu dans un pays tiers et sont faits dans l’intérêt de l’économie nationale.
Pour lutter contre cette pratique, les pays sont donc parfois tenus de poursuivre leurs propres entreprises, et donc, d’une certaine manière, à aller contre leurs propres intérêts.
Une résolution affichée qui rencontre, à l’échelle mondiale, un succès mitigé: au total, sur les 44 pays étudiés par l’ONG, ceux dont l’engagement est «limité» ou «inexistant» en la matière représentent encore 52% du commerce mondial.
Dans le détail, 22 pays totalisant près de 40% des exportations dans le monde, parmi lesquels la Russie et le Japon, ont lancé très peu de poursuites judiciaires, voire aucune, ces dernières années.
Parmi ces pays réfractaires, quatre – la Chine, Hong-Kong, l’Inde et Singapour – sont inclus pour la première fois dans le bilan de Transparency bien qu’ils ne soient pas adhérents de ladite convention internationale.
Ils sont néanmoins signataires d’une convention des Nations unies contre la corruption.
En générant à elle seule près de 11% des exportations au plan mondial, la Chine endosse une «responsabilité particulière» dans ce bilan, assure Transparency.
«Les performances de la Chine en matière de règles internationales de lutte contre la corruption influencent le comportement d’autres grands pays exportateurs», soulignent les auteurs du rapport.
À l’inverse, sept pays sont classés parmi les plus diligents pour punir les aigrefins: les États-Unis, l’Allemagne, le Royaume Uni et la Suisse, rejoints cette année par Israël, la Norvège et l’Italie, l’ensemble pesant pour 27% des exportations mondiales.
La France se classe quant à elle parmi les onze pays dont l’engagement est encore jugé «limité», au même titre que l’Argentine, l’Autriche, la Grèce ou l’Afrique du Sud.
Paris a mis en place en 2017 l’Agence française anticorruption (AFA), qui n’a pas encore pu réellement faire ses preuves. La lutte contre les pots-de-vin internationaux reste timide dans notre pays où, jusqu’à la transposition de la convention de l’OCDE, les entreprises pouvaient déduire de leur résultat les sommes versées afin de remporter ou de sécuriser des contrats à l’étranger. Interrogé par France Inter en 2016, un ingénieur commercial dans l’armement confirmait: «J’avais une fiche contrat sur laquelle j’avais 15% de FCE, les ‘frais commerciaux exceptionnels’.
Si quelqu’un de l’armée de l’air aboudabienne venait en France et que pour être sûr d’avoir le contrat, il voulait qu’on lui loue une Porsche avec des sièges en cuir et une jeune femme accorte sur le siège de droite, eh bien ces dépenses étaient déclarées par l’entreprise à Bercy».
Prostituées, articles de luxe, séjour dans des hôtels réputés et bien sûr commissions, tout était admis pour le bien des contrats français.
Les exportations françaises ont longtemps bénéficié de cette disposition fiscale.
Transparency note toutefois que la France fait partie des pays qui ont amélioré la législation protégeant les «lanceurs d’alerte», ces personnes qui donnent des indications aux enquêteurs sur des cas potentiels de corruption.
Mais dans l’ensemble, «l’objectif fondamental de la convention, à savoir créer des conditions de concurrence équitable et sans corruption, est encore loin d’être atteint en raison d’une application insuffisante», résument les auteurs de cette étude pluriannuelle, dont la dernière édition date de 2015.
Les pays qui ont le plus amélioré leur notation sont le Brésil et Israël, qui n’avaient pas de dispositif légal efficace avant l’application de la convention.
Au contraire, l’Autriche, le Canada, la Finlande et la Corée du Sud ont vu leur bilan en matière de lutte contre les pots-de-vin se dégrader.
Source Koide9enisrael