L’auteur de l’attaque à New York mardi est un Ouzbek de 29 ans. Selon des observateurs du jihadisme, cet exemple montre une nouvelle fois que les ressortissants des anciennes républiques soviétiques d’Asie centrale ont pris une place importance dans la galaxie islamiste depuis la chute de l’URSS.
Un Ouzbek de 29 ans, installé aux Etats-Unis depuis 2010, a tué au moins huit personnes et fait douze blessés à New York mardi, en fauchant des piétons et des cyclistes au volant d’un pick-up sur l’île de Manhattan. L’assaillant est considéré comme « lié à Daesh » par les autorités, comme l’a souligné Andrew Cuomo, gouverneur de l’Etat de New York. Une note manuscrite, en arabe, retrouvée sur les lieux de l’attentat, indiquait d’ailleurs la fascination du tueur pour l’organisation jihadiste.
La chute de l’Union soviétique à l’origine du phénomène
Le drame a attiré l’attention des spécialistes sur son pays d’origine, l’Ouzbékistan, un pays d’Asie centrale, membre de l’Union soviétique jusqu’en 1991. Sur notre plateau, ce mercredi, le directeur-adjoint de la rédaction de Paris Match et expert du terrorisme islamiste, Régis Le Sommier, a livré son analyse: « Les Ouzbeks se sont manifestés dans des actes terroristes, comme à Saint-Pétersbourg. Les radicaux ouzbeks sont très impliqués dans la mouvance jihadiste international, pour des raisons liées à la chute de l’Union soviétique ». Il a poursuivi: « A la fin des années 90, quand le modèle soviétique s’est décomposé, l’Ouzbékistan et un certain nombre d’anciennes républiques soviétiques musulmanes sont restés sans modèle et la religion a pris une place très importante. »
« Ensuite, il y a eu une reprise par l’Etat, une sorte de religion d’Etat, qui a complètement ostracisé les radicaux et les radicaux sont partis ailleurs. Donc les Ouzbeks pendant très longtemps, comme les Tchétchènes, sont devenus des ‘desperados’ du jihad. Ils ont servi Al-Qaïda pendant un moment et quand Daesh s’est constitué, ils ont composé un noyau très dur en son sein car ce sont des gens très compétents, de très bons combattants », a achevé Régis Le Sommier.
« Ce n’est pas une nouvelle filière »
Auprès de France Info, le spécialiste du jihadisme, Abdelasiem El Difraoui, a relevé que le lien entre entre la terre ouzbek et l’islamisme s’était noué plus en amont encore, au coeur des années 1980:
« Ce n’est pas une nouvelle filière. Il y a des mouvements jihadistes en Ouzbékistan qui se sont globalisés depuis les années 1980-1990. Notamment le Mouvement islamique d’Ouzbékistan, qui a été allié des talibans en Afghanistan, d’Al-Qaïda. »
Rukmini Callimachi, journaliste du New York Times, est intervenue sur le plateau de la chaîne de télévision américaine MSNBC. Elle a expliqué que l’Ouzbékistan et ses voisins revêtaient une importance fondamentale aujourd’hui pour Daesh:
« Les chiffres les plus récents que nous ayons, qui sont sortis il y a seulement quelques jours, au sujet du nombre de combattants étrangers, disent que 40.000 personnes sont venues du monde entier pour intégrer Daesh. Et la région du monde qui a fourni le plus gros contingent, ce sont les anciennes républiques soviétiques. »
Une région du monde vulnérable au message jihadiste
Evoquant les départs américains vers les rangs du « Califat », elle a ajouté: « Et cinq ou six personnes parties des Etats-Unis pour rejoindre Daesh étaient de nationalité ouzbèke ».
Prudente, elle a fait observer, au sujet de l’assaillant de Manhattan: « On sait que cette personne a émigré légalement en 2010. Je ne veux pas suggérer que cette personne a rallié Daesh puis est revenue. Je dis simplement qu’il y a un nombre prépondérant de personnes de cette région du monde qui ont été endoctriné par leur message. »