L’islamisme d’Erdogan infiltre l’Europe via Erasmus

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Malgré le gel des négociations pour l’intégration de la Turquie à l’Union européenne, Bruxelles semble sous-estimer l’entrisme islamiste d’Erdogan. Avec Erasmus+, elle lui a ouvert la porte en grand.

Nulli concedo. “Je ne fais de concessions à personne. ” L’Union européenne (UE) semble avoir oublié la devise du philosophe Érasme. Curieux, quand on sait que 300 000 étudiants participent chaque année à un programme qui porte son nom et qui permet aujourd’hui à l’islamisme d’Erdogan de pénétrer l’Europe.

Depuis 1987, Erasmus+ a bénéficié à 12 millions de personnes à travers le continent. Géré par la Commission européenne, qui lui a alloué un budget de 26,2 milliards d’euros pour la période 2021-2027, le programme soutient « l’éducation, l’inclusion sociale, la formation de la jeunesse et les sports en Europe », notamment via le financement de plusieurs projets en collaboration avec des ONG.

Rapidement, Erasmus+ suscite l’intérêt de Recep Tayyip Erdogan. Depuis quelques années, le président turc œuvre à l’islamisation du Vieux Continent. L’Allemagne, la Belgique et la France, qui se partagent deux tiers des 21 millions de musulmans d’Europe ainsi qu’une très importante communauté culturelle turque, sont des cibles de choix pour Ankara. S’y sont alors implantées des ONG, européennes de façade, de facto éligibles aux subventions d’Erasmus+, et pourtant bien liées au pouvoir turc.

Les dernières barrières sont tombées en 2004, quand le programme s’est directement ouvert à la Turquie, permettant aux ONG turques d’intégrer Erasmus+ et à 700 000 ressortissants d’y être admis. Une aubaine pour Erdogan : si les portes européennes lui restent closes, il passera par les fenêtres.

À ce petit jeu, le Turc part avec un avantage : la clémence de l’Europe à l’égard de l’islam. Récemment, ses campagnes faisant la promotion du voile faisaient polémique en France. Ce n’est que la partie émergée de l’iceberg. À l’insu du grand public, la Commission européenne finance, dans le cadre d’Erasmus+, des mouvements très éloignés de “l’islam des Lumières”.​

Quelques exemples : malgré ses liens forts avec le Femyso, une organisation transnationale proche des Frères musulmans, l’association turque Al Sharq Forum n’a pas eu de difficulté à intégrer Erasmus+. Avec ses trois branches Strategic Research, Academia et Youth, Al Sharq prétend œuvrer pour un « monde plus inclusif et juste » . Dans sa brochure de présentation, Al Sharq Strategic Research met surtout en avant son « programme sur l’islam politique » , destiné à lui « développer de nouveaux cadres conceptuels adaptés aux terrains nouveaux et changeants ».

Rien de surprenant, tant les profils à la tête de l’association sont sulfureux. Si son directeur de la recherche stratégique, Mohammad Affan, a quitté les Frères musulmans, il précisait au New Yorker en 2012 que c’est en raison de leur « manque de créativité ». Le président actuel de l’ONG, le Palestinien Wadah Khanfar, est hautement suspecté d’être un maillon capital de l’organisation secrète panislamiste. Il a par ailleurs longtemps entretenu des liens forts avec Youssef al-Qaradawi, le leader spirituel des Frères, qui considérait Hitler comme un « envoyé d’Allah » qui avait porté un « châtiment divin » aux Juifs. Malgré cela, entre mars 2021 et mai 2022, Al Sharq a obtenu 100 000 euros de la part de la Commission européenne et Erasmus+ a cofondé plusieurs de ses projets.​

Pour l’eurodéputé Jean-Paul Garraud, de tels financements réduisent à néant les efforts entrepris pour lutter contre l’entrisme religieux radical. Certes, les demandes de subventions dans le cadre d’Erasmus+ sont sélectionnées. Mais c’est compter sans quelques trous dans la raquette. Quand il n’est pas assuré par des évaluateurs payés au lance-pierre (entre 70 et 115 euros par dossier), le filtrage est réalisé par des comités nationaux parmi lesquels… la Turquie. Pour le président de la délégation RN au Parlement européen, c’est bien la preuve que les institutions ne prennent pas la mesure de l’offensive islamiste.

“Armer intellectuellement la jeunesse musulmane”

​Le premier week-end d’octobre de cette année a confirmé ses craintes. C’est sous la coupole du Pavillon des Vanniers, à Istanbul, que s’est tenue la réunion de lancement “Let’s say stop to islamophobia ! ”. Quatre ONG se sont réunies pour convenir des derniers détails du programme Erasmus+ de lutte contre les discriminations que subissent les musulmans du continent. Pendue au mur de la salle, une bannière lourde de sens : la couronne d’étoiles européenne, changée en croissant islamique, s’y noie dans le rouge du drapeau turc.

​De fait, l’agenda de ce programme est sans équivoque : dans sa présentation officielle sur le site de la Commission européenne, “Let’s say stop to islamophobia !” se donne jusqu’à 2024 pour « armer intellectuellement la jeunesse musulmane » de 18 à 29 ans et entraîner « une prise de conscience européenne commune pour éviter tout conflit culturel » . À cet effet, elle peut compter sur trois pays partenaires européens (France, Belgique et Allemagne), ainsi qu’un financement de l’UE de 141 852 euros.

« Indirectement, la Commission reconnaît donc que la montée en puissance de l’islam en Europe peut être source de conflit culturel » , note Jean-Paul Garraud. Problème : elle pense que la solution réside dans la lutte contre l’islamophobie. Ce faisant, l’Europe pave le chemin d’Erdogan.

​Derrière les sourires estudiantins d’Erasmus+ et les promesses inclusives de “Let’s say stop to islamophobia ! ” se cache un entrisme inquiétant. Il y a plusieurs semaines, un contributeur du site Fdesouche s’est intéressé au programme promu par l’UE. Surprise : il apparaît que “Let’s say stop to islamophobia !” n’a d’européen que le financement. En réalité, les quatre ONG (belge, allemande, française et turque) partenaires du projet sont des organismes intégristes proches du pouvoir turc. Bien qu’elles aient été relayées sur Twitter par le lanceur d’alerte Damien Rieu, ces informations ont été très peu commentées. Pourtant, l’affaire est de taille. Valeurs actuelles en a déroulé le fil.

“La Turquie est membre de la Commission européenne”

​À la tête de ce projet associé à Erasmus+, la fondation New World (Yeni Dünya Vakfı). Sans surprise, son siège est à Istanbul. Son président, le prédicateur Mahmut Göksu, est dans les petits papiers d’Erdogan depuis sa participation à la création de son parti AKP – le monde est petit. Après les révélations de Fdesouche, son organisation est montée au créneau sur Twitter, dénonçant des « discours de haine » . Lapsus révélateur, la fondation écrit pour se défendre que « la Turquie est membre de la Commission européenne ». C’est évidemment faux…

​Pour combien de temps ? Interrogée par Christine Anderson, eurodéputée de l’AfD, sur « un éventuel impact négatif du gouvernement autoritaire d’Erdogan sur les jeunes dans le cadre de la coopération » via Erasmus+, la Commission européenne botte en touche : « Leur participation aux programmes  [d’Erasmus+] encourage les institutions publiques et privées de Turquie […] à s’impliquer plus profondément dans le processus d’intégration à l’UE. »

​Erdogan n’a pas attendu cette main tendue pour s’implanter discrètement sur notre sol. Le Metamo Education Center, autre partenaire du projet “Let’s say stop to islamophobia !”, en est un exemple frappant. Émojis, écriture inclusive et couleurs pastel : la communication du centre pédagogique belge montre patte blanche. C’est pourtant l’école woke qui cache le réseau islamiste turc. Sa maison mère, Maarif Belgium, fait partie du réseau international d’écoles de la Fondation Maarif en Turquie.

​Celle-ci accompagne 50 000 étudiants dans une cinquantaine de pays. Son président, Birol Akgün, se réjouissait déjà en 2013 de l’expansion turque via le bras religieux du parti : « La Diyanet a commencé par l’Europe, s’est étendue à l’Asie centrale et a atteint l’Afrique. La Turquie grandit. Ses horizons se sont ouverts. » En France, Maarif se présente comme un organisme de soutien scolaire français. Pour les services de renseignements, elle est un diffuseur de l’islamo-nationalisme de l’AKP et une source de renseignements pour la Turquie.

“L’islam appartient à l’Europe”

​En plein centre historique de Strasbourg, à moins de deux kilomètres du siège de Maarif France, se trouve un important collaborateur du projet “Let’s say stop to islamophobia !” : European Muslim Union (EMU). L’ONG n’en est pas à son coup d’essai, et a participé à pas moins de 16 projets Erasmus+, bénéficiant à cet égard d’un financement européen cumulé dépassant le million d’euros. Son président, le converti Andreas “Abu Bakr” Rieger, est pourtant accusé d’antisémitisme. Interrogée à ce sujet en 2021, la Commission européenne assure n’avoir trouvé aucune preuve allant dans le sens de ces allégations. Valeurs actuelles a exhumé un discours tenu devant quelques milliers de djihadistes à Cologne, en 1993, en l’honneur de Metin Kaplan, surnommé le “Khomeini de Cologne”.

« Comme les Turcs, nous, les Allemands, avons souvent combattu pour une noble cause au cours de l’Histoire, hurle l’avocat germain dans les haut-parleurs. Même si je dois admettre que mes grands-pères n’ont pas été très méticuleux avec notre ennemi principal commun. » Les gradins de la salle des fêtes tremblent aussitôt sous les acclamations – manifestation vive de la déception de l’auditoire quant au manque de zèle du IIIe Reich.

​Peu de temps après ce discours, Abu Bakr Rieger intègre Al-Mourabitoune (“Les Soldats de la Libération”, une secte salafiste internationale), puis lisse son image et cofonde l’EMU avec Nevzat Yalcıntas, membre fondateur de l’AKP… et ancien professeur d’économie d’Erdogan. Toujours à sa tête aujourd’hui, Rieger n’est pas hanté par son passé. L’Union européenne lui accorde une clémence toute particulière, jusqu’à faire appel à lui pour lutter contre la radicalisation des jeunes musulmans en Europe. Avec l’aide d’Eramus+, Abu Bakr Rieger espère l’avènement d’une « nouvelle Europe ».

​Aux yeux de Rieger, le nombre croissant de musulmans dément d’ores et déjà « le mensonge de l’islam comme une religion immigrée, “étrangère” » . L’intégration de sa nouvelle religion à l’Occident serait quasiment achevée, si bien qu’il peut désormais l’affirmer : « L’islam appartient à l’Europe. »

​Une réjouissance qui fait écho à ses désirs d’il y a trente ans : « L’islam doit devenir une véritable force en Allemagne. Les kouffar d’Europe ne craignent que cela, et ils n’en dormiront plus : les Allemands, les Français et les Italiens adopteront l’islam, si Allah le veut. »

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