«L’immigration, grand tabou des Européennes»

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Gilles-William Goldnadel estime qu’une question n’a pas été suffisamment posée pendant cette campagne: celle de l’immigration.


Gilles-William Goldnadel est avocat et essayiste. Toutes les semaines, il décrypte l’actualité pour FigaroVox. Son dernier ouvrage, Névroses Médiatiques. Le monde est devenu une foule déchaînée, est paru chez Plon.


Je laisse évidemment le soin aux spécialistes de la politique politicienne de commenter finement les résultats des élections européennes qui me paraissent laisser le pays fracturé dans une sorte de pré-guerre civile et intellectuelle larvée.

Je voudrais quant à moi dégager les principales raisons qui causent la confirmation de deux faits politiques majeurs: la prééminence du Rassemblement National à droite qui aura incarné une manière de vote utile préjudiciable aux Républicains, et le déclin de la gauche.

Ces raisons, d’ordre métapolitique, sont profondes et durables.

La première de toutes, est celle qu’il convient de ne pas évoquer dans les studios médiatiques capitonnés qui représentent aujourd’hui les salons d’autrefois.

L’épisode des gilets jaunes montre à quel point le surmoi migratoire aura été assimilé par les gens les plus frustres voire les plus frustrés.

Raison pourquoi j’en parle d’emblée, par une sorte de défi public qui contraste avec la discrétion de beaucoup de Français dans l’isoloir. On aura compris que j’évoquais l’immigration.

Le facteur qui sonne désormais à chaque fois. Celui que l’on veut cacher. Invitez-le dans un débat, qu’aussitôt on vous traitera d’obsédé exactement comme s’il s’agissait de pornographie scabreuse.

Même, ce dimanche soir, lors des débats télévisés, le mot n’a pas été prononcé, à l’exception notable de Bernard Tapie.

L’épisode des gilets jaunes montre à quel point le surmoi migratoire aura été assimilé par les gens les plus frustres voire les plus frustrés. Débuté par une revendication culturelle autant que sociale, le mouvement aura terminé sa course dans des revendications violentes et marxisantes. Nul ne saura jamais la part médiatique dans la sélection idéologique de la contestation.

L’Élysée lui-même, dans l’affolement qui l’a saisie et l’obligea à proposer un cahier des doléances, avait fait de l’immigration une question à part entière. Elle fut rétrogradée à une place plus discrète après les protestations de la gauche macronienne. Et passée à la trappe par la suite.

Ordinairement, lorsque dans un débat vous osez soutenir qu’il s’agit d’une des premières questions qui préoccupe le peuple, après vous avoir taxé d’obsédé, on ajoute pour faire bonne mesure, que vous êtes dans l’erreur disqualifiante et que la question ne sera pas posée, faute de tout intérêt.

Grâce soit donc rendue cette semaine au Figaro-Magazine qui, dans le cadre de son article principal justement intitulé «Immigration: l’enjeu occulte des Européennes», précise sous la plume de Carl Meeus: « Au début du mois d’avril, Nathalie Loiseau et Pascal Canfin, les numéros un et deux de la liste Renaissance, avaient publié une tribune dans le quotidien Libération pour que l’Europe fasse de «l’urgence climatique sa première priorité». Malgré la volonté, clairement exprimée, de la majorité de la population européenne de placer à l’inverse, l’immigration en pole position des préoccupations du moment.

Il convient de comprendre, qu’à un niveau de 39 % de préoccupation, un problème nié tourne à l’obsession et à l’exaspération.

C’est en tout cas ce qui ressort de l’Eurobaromètre Kantar effectué à l’automne 2018 pour la Commission Européenne. Clairement, les Européens interrogés pour savoir «quels sont les deux problèmes les plus importants auxquels doit faire face l’Union Européenne» placent l’immigration en première position (40 %) très largement devant le terrorisme (20 %).

Concernant la France, et selon un sondage cette fois Harris Interactive, ses citoyens plaçaient à la mi-avril d’abord le pouvoir d’achat comme thème qui aura une importance dans leur vote (42 %) juste devant l’immigration (39 %). L’environnement n’arrivant qu’en quatrième position (35 %).

Précisément, il convient de comprendre, qu’à un niveau de 39 % de préoccupation, un problème nié tourne à l’obsession et à l’exaspération.

Et c’est dans le creux de celles-ci qu’il faut comprendre la première place du Rassemblement National identifié comme le parti ayant le premier fait les frais de son évocation par une inepte et indécente nazification qui aujourd’hui choque et agace davantage qu’elle n’effraie.

Mais au-delà du défi relevé dans l’exaspération, du bras d’honneur aux élites déshonorées par leur mépris, de la révérence irrévérencieuse à la nation, c’est l’inquiétude, qui par essence caractérise la préoccupation.

Et cette inquiétude outrageusement méprisée pour son irrationalité, sa sottise, sa vilenie, sa vulgarité est la plus rationnelle et noble qui soit.

Pour s’en convaincre encore, je supplie mon lecteur de lire ce chef-d’œuvre qu’est «Histoire de l’islamisation de la France» (éditions l’Artilleur), ouvrage dont j’ignore le nom de l’auteur puisqu’il se prétend sur la couverture «Collectif». De tous les grands et bons livres qu’il m’ait été donné de lire sur les questions liées de l’immigration, la démographie, l’insécurité, l’islamisme, le terrorisme, le racisme et l’antisémitisme, celui-ci est, sans discussion ni emphase, de loin le plus intelligent.

Selon que le solde migratoire anticipé atteint 20 000 ou 120 000 à partir de 2020, l’apport migratoire représenterait près de 40 % à 73 % de la croissance démographique pour cette période.

Les hommes où l’homme qui l’ont écrit ont tout vu, tout consigné et tout compris.

Et pour revenir à la question migratoire et plus largement à la démographie, je me contenterai pour établir la rationalité de l’angoisse migratoire du peuple français de citer ces derniers passages du livre précité: «Ce changement rapide du peuple français a été confirmé par les projections de l’INSEE 2013-2070 publiées en 2016, dans lesquelles l’immigration devrait jouer un rôle majeur dans la croissance démographique. Selon que le solde migratoire anticipé atteint 20 000 ou 120 000 à partir de 2020, l’apport migratoire représenterait près de 40 % à 73 % de la croissance démographique pour cette période. Dans ce cas, la France entière sera dans quelques décennies, à l’image de la Seine-Saint-Denis, qui est déjà la pointe avancée de la «partition» évoquée et admise par François Hollande dans «Un président ne devrait pas dire ça…» – Avec, en 2016,deux-tiers des naissances d’enfants d’au moins un parent né à l’étranger et plus de 60 % des jeunes de moins de 18 ans d’origine étrangère (immigrés nés en France d’au moins un parent immigré).

Un rapport de l’Assemblée Nationale a conclu, en mai 2018 à un véritable abandon de ce territoire déjà grandement islamisé, au point que «l’État ignore le nombre d’habitants» du département, qui constitue, à quelques kilomètres de l’aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle, un «sas d’entrée» pour l’immigration illégale. Ces chiffres officiels confirmant l’islamisation accélérée de la France furent peu commentés. Il conforte pourtant l’optimisme claironné à la mosquée d’Orly, en août 1011, par Marwan Muhammad, responsable du Collectif Contre l’Islamophobie en France, que le Monde a promu en octobre 2016 «porte-voix combatif des musulmans»: «Qui a le droit de dire que, dans 30 ou 40 ans, la France ne sera pas un pays musulman?… Personne dans ce pays n’a le droit… de nous nier le droit d’espérer dans une société globale fidèle à l’islam.»

Abordons à présent les raisons profondes et durables qui expliquent le déclin de la gauche et qui se conjuguent avec la première. Elles sont elles aussi liées: la désunion et le doute.

On constatait autrefois à gauche une vertu que la droite ne possédait et ne possède toujours désespérément pas: le sens du collectif. Elle puisait sa raison dans le sentiment d’incarner l’intelligence et le progrès. Cette espérance sincère et émulsive réussissait à dissoudre l’ego des concurrents politiques dans un bain-marie de morale commune. A l’heure du doute, il n’en est plus question, et les couteaux émoussés sont tirés de tous les fourreaux rapiécés. La tentative largement avortée de Place Publique de vouloir incarner le renouveau du socialisme de parti dans l’union aura au contraire illustré la démesure de l’ego et le vide du propos.

Mais non seulement la gauche est passée de mode, mais elle exaspère.

Reste surtout ce doute qui confine au désarroi. Non seulement la gauche n’incarne plus l’intelligence et le progrès, mais elle semble représenter une manière de révulsif moral à la hauteur de la désillusion qu’elle inspire. Le temps de l’indulgence est définitivement passé.

Le goulag et la faillite économique du communisme avaient détruit les fondements, les crimes d’un islamisme longtemps regardé avec une xénophile bienveillance auront porté l’estocade à l’édifice.

Indulgence à la hauteur de toutes ses impostures. Si l’on veut s’en convaincre à nouveau par la lecture, je recommande celle de Roger Scruton (L’Erreur et L’Orgueil)(encore L’Artilleur!), ouvrage au demeurant souvent vanté dans ces colonnes. L’auteur démonte avec autant de talent que de jubilation les authentiques escroqueries intellectuelles commises dans les années 60 et 70 par des charlatans portés au pinacle grâce à la mode du temps. Les gourous de l’époque, en France, s’appelaient Lacan, Deleuze, Derrida et Badiou.

Il leur suffisait de jargonner en se réclamant peu ou prou de la religion marxienne pour être encensés.

Le goupillon était à gauche et il sabrait toutes les fortes têtes.

Mais non seulement la gauche est passée de mode, mais elle exaspère.

Notamment et principalement parce qu’elle moque la principale préoccupation populaire.

Il ne lui reste qu’une partie des minorités qui, pour l’heure, sont minoritaires.

Source www.lefigaro.fr

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