Le rabbi de Kalov : l’héroïsme des Juifs croyants

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L’héroïsme des Juifs croyants

« Toutefois, il paiera le chômage et les frais de la guérison » (Chemot 21,19).

Suite à l’épidémie de choléra qui éclata en 1831, mon vénérable ancêtre, auteur du Bené Yissakhar, écrivit une lettre pour renforcer ses disciples résidant à Munkatch, sérieusement touchés par l’épidémie. Il ressentit un désir impérieux d’adresser une berakha spéciale au ‘Hassid rabbi Yossef Yehouda Halpert, qui s’était sacrifié pour sauver des hommes pendant l’épidémie. Par ce mérite, il lui souhaitait d’avoir beaucoup de réussite et de satisfaction. Sa bénédiction se réalisa, puisque son disciple bénéficia de la richesse et d’une descendance bénie de justes, dont le célèbre rav et auteur du Min’hat Yits’hak zatsal.

En période d’épidémie, il y a un mérite particulier de s’investir dans le sauvetage d’êtres humains en s’occupant de soigner les malades. Dans une telle situation où la peur règne de cette maladie contagieuse, on constate une défection auprès des malades contagieux dont les soignants évitent de s’occuper, même si cela ne constitue pas un grand danger pour eux.

Le rav Eliézer Papo, qui résidait en Bosnie, où vivent des chrétiens et des musulmans, écrit dans son ouvrage, le Pélé Yoets, qu’en période d’épidémie, le Juif ne doit pas se conduire comme les musulmans, estimant que le fait de se trouver sous la Providence du Créateur suffit et qu’il est inutile de prendre des mesures de protection. Or, le Juif sait que D’ veut que nous fassions un effort pour nous protéger. Le rav Papo indique également que d’un autre côté, on ne doit pas se conduire comme les chrétiens qui ne croient pas à la Providence divine, et en raison de leur extrême prudence, ils n’entrent pas du tout dans les chambres des malades pour tenter de les soigner et de ce fait, entraînent leur mort.

La Guemara (Chabbath 32a) stipule que généralement, un Juif n’a pas le droit de se mettre en danger, même minime, même si en grande majorité, il ne risque pas d’être affecté. En effet, en période de danger, le Satan lance une accusation et affirme que l’homme qui se met en danger mérite d’être atteint, et parfois, son argument est accepté auprès du Tribunal Céleste, et au final, l’homme s’est causé du tort. Or de nombreux décisionnaires sont d’avis qu’il est impératif de sauver autrui d’un grand danger, et il sera permis, à cet effet, de se mettre dans une situation de possibilité de danger, en particulier lorsque le risque de danger paraît très minime.

Lorsqu’un Juif accomplit la mitsva de sauver des vies humaines de cette manière, conformément à la Tora, le mérite de la mitsva le protègera afin que ce verset s’applique à lui (Kohélet 8,5) : « Celui qui exécute son ordre n’éprouvera rien de fâcheux. » Les ouvrages sacrés rapportent que même si de rares fois, il semblerait que la mitsva ait causé du tort à l’homme, il faut savoir que ce désagrément avait été décrété à son encontre au préalable, et même s’il n’avait pas effectué cette mitsva, il aurait subi un tort d’une autre façon ; de plus, il est possible que le mérite de la mitsva l’ait protégé et réduit sa peine, ou l’ait sauvé d’une mort étrange, que D’ préserve.

D’un autre côté, lorsqu’un Juif voit un homme dans une situation de danger avéré, et s’empêche d’agir afin de le sauver, en prenant en compte une possibilité éloignée de danger, il pourra être puni pour son inaction, comme l’indique la Guemara (Baba Metsia 33a).

C’est pourquoi, à toutes les époques, nous voyons des Juifs animés de crainte du Ciel s’évertuer plus que les autres afin de sauver des êtres humains en situation difficile, sachant qu’ils ne perdront rien de leur action, bien au contraire, s’ils s’abstiennent d’agir, ils risquent d’être perdants.

Le miracle de Pourim se produisit selon ce schéma : la reine Esther se mit en danger en se rendant auprès du roi sans y avoir été invitée au préalable, afin de tenter auprès de lui de sauver des vies. Le rav Yonathan Eibeshitz, dans son ouvrage Ya’arot Devach, indique que c’est pour cette raison que la Meguila relatant le miracle de Pourim se nomme Meguilat Esther, et non Meguilat Mordékhaï, afin de rappeler le sacrifice d’Esther, ce qui nous inculque une leçon fondamentale pour toutes les époques.

De même, pendant la Shoah, des Juifs orthodoxes, notamment le rav Mikhaël Ber Weismandel, agirent avec un don total de soi pour sauver des vies, en plaidant la cause des Juifs auprès des meurtriers, en organisant des opérations de sauvetage clandestin vers d’autres pays, etc.

Cette attitude est particulièrement frappante en période d’épidémie. Lors de l’épidémie de choléra qui éclata en 1931, le rav Akiva Eiguer fonda, dans la ville de Posen, un hôpital provisoire pour les malades juifs, où des Juifs s’occupaient avec dévouement des malades du choléra. On vit alors que chez les Juifs, le pourcentage de décès était plus bas que chez les non-Juifs. Après avoir constaté le grand bénéfice des soins donnés par des Juifs, le rav Akiva Aiguer fonda un bâtiment dédié à cette cause, qui devint un hôpital juif qui fonctionna pendant de longues années.

De nos jours également, nous avons le privilège de voir des Juifs croyants se dévouer corps et âme pour sauver des vies, dans les hôpitaux et par le biais de l’organisme Hatsala et d’autres associations similaires. Ils ont le mérite d’être de bons messagers pour sauver de nombreuses vies.

Ces Juifs extraordinaires accourent pour accomplir la mitsva de sauver des vies même lorsqu’ils sont en plein travail, en plein repas, en plein sommeil, etc. Et dans le cas où, d’après nos décisionnaires, il est souhaitable de se mettre dans une situation d’un danger possible, ils accourent avec une abnégation totale. Ils agissent en étant intimement persuadés qu’en réalisant une mitsva, on ne peut être perdant, mais uniquement gagnant.

Nous pouvons ainsi interpréter le verset de notre paracha qui donne un bon conseil à celui qui a la possibilité d’apporter la guérison, celle du corps ou de l’esprit, mais craint que son action lui causera du tort : « Toutefois, il paiera le chômage » : il réfléchira à ce qui se passera s’il reste impassible et n’entreprend aucun effort de sauvetage, il sera perdant et de ce fait, il accourra pour accomplir la mitsva et « il prendre en charge (les frais de) sa guérison.»

Chabbath Chalom !

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