Lettre du rabbi de Kalov pour ‘Hanoucca 5782
Proposons des activités appropriées à nos enfants
On raconte que rabbi Moché Leib de Sassov zatsal, dans sa jeunesse, se conduisait de manière exceptionnelle. Il se consacrait à l’étude de la Tora chaque jour, jusque tard dans la soirée, puis se rendait dans une salle communautaire où se retrouvaient le soir des jeunes gens dévoyés pour danser, jouer et se saouler, jusqu’à ce qu’ils finissent par commettre des fautes. Le rabbi changeait de tenue pour revêtir les mêmes habits qu’eux, entrait dans la salle et chantait. Les jeunes gens appréciaient beaucoup sa belle voix, et dansaient avec lui de longues heures jusqu’au matin, et par ce biais, il les sauvait et leur évitait de se livrer à la débauche.
Quelques années plus tard, lorsqu’il devint un grand Tsadik et des centaines d’hommes se réunissaient autour de lui le Chabbath, l’un de ces jeunes hommes se rendit également à sa table du Chabbath. Lorsqu’il aperçut le rabbi, il reconnut son visage et sa voix, et se dit : comme la ruse domine ce monde, cet homme dansait avec les jeunes gens peu fréquentables et il parvient à se jouer du monde au point que tout le monde s’imagine que c’est un Tsadik !
À la fin du Tisch, le rabbi énonça des propos de Tora, et l’homme discerna alors sa sagesse et sa sainteté, et saisit que certainement, dans sa jeunesse, il venait danser avec eux uniquement pour les préserver des fautes. Il se leva aussitôt et dit au rabbi : « Merci mille fois au rabbi qui m’a sauvé dans ma jeunesse de nombreuses fautes. »
Un maître explique que cette histoire nous permet d’interpréter un épisode de notre paracha à propos de Yossef Hatsadik : dans la prison égyptienne étaient enfermés des hommes de très faible niveau, aux mœurs dépravées, qui n’occupaient pas leur temps de manière profitable en prison et qui se livraient à la débauche. À ce sujet, nos Sages (dans Ketoubot 59b) ont dit : « L’oisiveté mène à la licence ».
Mais à son arrivée en prison, Yossef Hatsadik se fixa pour mission de les éloigner des fautes, car même les non-Juifs sont tenus de s’abstenir de conduite immorale, et il s’occupa d’eux dans le même esprit que le rabbi de Sassov, en jouant avec eux et en organisant des danses, pour les occuper constamment de sorte qu’ils n’aient pas le loisir de commettre des fautes.
Des observateurs auraient pu penser que Yossef était un homme de faible niveau comme les autres, qui perdait son temps à des jeux et des danses, mais le directeur de la prison qui vit le succès de Yossef, comprit qu’il s’agissait d’un homme saint bénéficiant d’une aide divine, et que sa seule motivation était de les préserver des fautes.
C’est le sens du verset de notre paracha (39,22) : « Le gouverneur mit sous la main de Yossef tous les détenus de la prison » : le gouverneur nomma Yossef pour trouver des activités aux prisonniers « et tout ce qu’on y faisait, c’était lui qui le dirigeait » : tous les jeux auxquels ils jouaient, Yossef y participait également.
Puis le verset poursuit : « Le gouverneur de la prison ne vérifiait rien de ce qui passait par sa main » : le directeur ne discerna aucun problème dans la conduite de Yossef, comme l’indique Onkelos : il ne vit aucune faute chez Yossef : « parce que Hachem était avec lui et ce qu’il entreprenait, Hachem le faisait réussir. »
Mon vénérable ancêtre, rabbi Yits’hak Eizik de Kalov, adopta également cette conduite. Lorsqu’il fut nommé au poste de la localité de Kalov et de sa région, il remarqua une terrible brèche dans la sainteté : lors des mariages, jeunes filles et garçons dansaient ensemble. Il annonça immédiatement aux résidents de la ville son désir de participer à tous les mariages, du début jusqu’à la fin et de fait, il fut décidé que deux mariages n’auraient pas lieu le même soir. Il consacra de son précieux temps pour participer à tous les mariages, dirigeait toutes les danses, et veilla ainsi lui-même à éviter toute mixité. De surcroît, il instilla en eux l’amour du Créateur par ses belles mélodies.
D’autres Tsadikim se conduisirent de façon similaire, et consacrèrent de leur temps et de leurs forces pour œuvrer de diverses manières afin de proposer des activités aux jeunes gens pour les détourner des fautes.
Il est vrai que tout homme ne peut se mêler à des gens de faible niveau, car tout le monde ne peut se comparer à ces grands Tsadikim dotés d’un niveau élevé de pureté, dont il va sans dire qu’ils ne seront jamais attirés par les actions ou les pensées négatives des hommes qu’ils cherchent à influencer. Mais ces histoires renferment néanmoins un message pour chaque Juif : il faut s’évertuer de trouver des occupations à notre famille dans leur temps libre, en leur proposant des activités appropriées, et éviter qu’ils ne soient livrés à eux-mêmes, risquant alors de succomber à la faute.
Cette atmosphère de relâchement conduisit à la grande baisse spirituelle observée à la période du miracle de ‘Hanoucca, lorsque la culture grecque se répandit en terre sainte, et que les Grecs édifièrent de grands stades, où de nombreux Juifs se rassemblaient lors de leur temps libre. Ils regardaient des spectacles avec des taureaux par exemple, et passaient leur temps libre à des jeux, dans une atmosphère de légèreté propice à la faute. Ils en vinrent à rejeter le joug de la Tora et des Mitsvoth et devinrent des hellénistes.
Dans cette optique, nous pouvons interpréter le décret imposé par les Grecs aux Juifs: « Inscrivez sur les cornes du taureau que vous n’avez pas de part dans le D’ d’Israël », ils leur prescrivirent d’inscrire ceci sur la corne du taureau qui paradait devant tous les spectateurs. Le but de ces grands rassemblements était que les participants affirment n’avoir aucune part dans le D’ d’Israël, que D’ nous en préserve.
Mais les ‘Hachmonaïm et leurs associés luttèrent contre cette tendance, et afin que leurs fils ne soient pas tentés de consacrer leur temps libre dans ces endroits, ils s’efforcèrent de trouver des jeux appropriés auxquels ils pourraient se consacrer dans leur temps libre. Ils jouaient par exemple à la toupie lorsqu’ils ne pouvaient étudier la Tora, afin qu’ils évitent la faute, et ils méritèrent ainsi de protéger leurs enfants des épreuves de cette époque.
Cette manière de procéder est une leçon pour nous en cette période de ‘Hanoucca où l’usage est de jouer à la toupie. Nous sommes tenus de veiller à occuper nos enfants par des activités cachères, afin qu’ils ne se heurtent pas à l’ennui qui risque de les exposer aux fauteurs et aux nombreux écueils de notre époque. Et ainsi, à l’image des ‘Hachmonaïm, nous mériterons de fonder des foyers empreints de sainteté et de bénéficier de délivrances et de miracles.
‘Hanoucca saméa’h !