Les menaces du nouveau chef des Gardiens de la Révolution en Iran

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Le 21 avril 2019, le Guide suprême de l’Iran, l’ayatollah Ali Khamenei, a nommé Hossein Salami au poste de commandant en chef des Gardiens de la révolution islamique. 

Cette nomination est intervenue deux semaines après que les États-Unis ont désigné les Pasdarans comme organisation terroriste étrangère et leur ont imposé des sanctions immédiates.  

Lors d’une cérémonie à laquelle assistaient de hauts responsables de la GRI, de l’armée et de la police, l’ayatollah Khamenei a octroyé à Salami le rang de major-général et le poste de commandant en chef de la GRI. Le guide suprême a exprimé l’espoir que le major-général Salami « soit capable de créativité dans ses nouvelles fonctions et redonne un second souffle et une vive ardeur au moral et à l’esprit combattant de ses troupes. »

Dans son compte Twitter, Khamenei a entre-autres écrit : « Pour vos qualités, votre zèle, et votre riche expérience au sein du pouvoir et dans la direction de divers secteurs du GRI, je vous nomme commandant en chef du GRI, qui vous octroie le grade de major général. »

Salami a remplacé le major-général, Mohammad Ali Aziz-Jafari, qui occupait ce poste depuis plus de 12 ans. Il avait été nommé en 2007 pour superviser le nerf de la guerre révolutionnaire de l’Iran.

Salami est né en 1960 à Golpayegan, dans la province d’Ispahan. En 1978, il suit des études à la faculté des Sciences et des Technologies, et se spécialise dans le génie mécanique à l’Université de Téhéran. Lors de la guerre irano-irakienne qui a débuté en 1980, il rejoint les Pasdarans et devient commandant de la base navale opérationnelle des Gardiens de la Révolution à Nuh. En 1988, juste après la fin de la guerre, il obtiendra son diplôme universitaire. Il gravira plusieurs échelons au sein du commandement et à l’état-major des Gardiens de la Révolution. Il occupera plusieurs postes clé dont celui de chef adjoint aux opérations militaires et commandant de la Force aérienne des Pasdarans. En 2009 il est nommé adjoint au chef du corps armé ; un poste qu’il occupera jusqu’à sa récente nomination.

Le cheminement de la carrière de Salami au sein des Gardiens de la Révolution est semblable à ses prédécesseurs depuis le début de la Révolution islamique en 1979. Tous ont participé à la guerre contre l’Irak, qui a duré plus de huit ans, et ont exercé des fonctions importantes dans les secteurs économique, militaire, et politique en Iran.

Depuis la révolution de 1979, les Gardiens de la Révolution ont conservé leur pouvoir et ont réussi à devenir la plus puissante organisation iranienne. Son but est de « sauvegarder la révolution islamique et ses réalisations dans tous les domaines ». Pour ce faire, ils ont toutefois élargi le rayon de leurs activités en interprétant à leur manière et d’une façon excessive l’article 150 de la constitution iranienne. Mis à part le président Akbar Hashemi Rafsanjani, récemment décédé, personne n’a osé contester l’emprise croissante des Pasdarans sur le régime islamique en Iran.

L’ancien chef des Pasdarans, Mohammad Ali Aziz-Jafari (à droite), avec le ministre iranien des Affaires étrangères

Hossein Salami, à l’instar de nombreux commandants des Pasdarans, est connu pour sa rhétorique enflammée contre Israël, les États-Unis et l’Arabie saoudite.

Le 31 janvier 2019, Salami a déclaré à la suite des raids de Tsahal contre des cibles des Gardiens de la Révolution et des milices pro-iraniennes en Syrie : « Nous avertissons le régime sioniste de ne pas jouer avec le feu… cela ne fera que mener à sa disparition et il sera détruit avant que les États-Unis n’entendent crier SOS et à l’aide… il n’aura pas l’occasion de creuser suffisamment de tombes pour enterrer ses cadavres. … Si une guerre est déclenchée, le régime sioniste sera définitivement  condamné. » 

Le 5 octobre 2018, lors d’une allocution devant un groupe de commandants et d’officiers à Ispahan, Salami a déclaré : « Netanyahou devrait savoir qu’il ne peut faire autrement que de fuir la région. Il devrait  désormais savoir nager en Méditerranée. »

En 2015, Salami avait déclaré que l’Iran était prêt au « pire scénario », avertissant les États-Unis d’une défaite cuisante et des conséquences d’un éventuel conflit avec l’Iran… Il avait aussi conseillé aux négociateurs iraniens sur le projet nucléaire iranien de n’accepter aucun compromis ou accord susceptible de saper le patriotisme et les convictions de l’Iran dans son juste combat. Il leur avait suggéré de quitter la table des négociations s’ils pensaient que les Américains recherchaient l’hégémonie politique en utilisant des méthodes intimidantes, menaçantes ou humiliantes.

Après la désignation américaine de qualifier les Pasdarans d’organisation terroriste (8 avril, 2019), Salami a déclaré : « Nous sommes fiers d’être appelés terroristes par quelqu’un comme Trump. »

La nomination de Salami intervient à un moment très sensible et donc deux semaines seulement après que le gouvernement américain a désigné les Gardiens de la Révolution, et notamment la Force el Qouds, comme organisation terroriste étrangère au titre de l’article 219 de la loi américaine sur l’immigration et la nationalité. La récente décision des États-Unis d’augmenter les pressions exercées sur l’Iran par les exportations de pétrole place le nouveau commandant des Pasdarans dans une position délicate. Il est donc mis dans une grave épreuve et prochainement nous saurons si ses positions intransigeantes à l’égard des États-Unis et son allié, Israël, seront mises en exécution.

Le 23 avril 2019, le commandant de la marine des GRI, Alireza Tangsiri, a souligné que la récente nomination de Salami n’avait « rien à voir » avec la dernière décision américaine. Toutefois, a-t-il averti : « L’Iran fermerait le détroit stratégique d’Ormuz. Si nous sommes interdits d’utiliser cette route de navigation internationale, eh bien, nous la fermerons. Nous n’hésiterons pas à défier toute menace visant à protéger et à défendre les eaux maritimes de l’Iran, et à défendre notre dignité. »

Au mois de février 2019, Tangsiri avait déjà menacé de fermer le détroit d’Ormuz si les exportations de pétrole de l’Iran étaient réduites à zéro. « Nous avons le plein contrôle sur Ormuz et ne permettrons pas à des étrangers de l’extérieur de la région de venir acheter du pétrole et de l’exporter tant que nous-mêmes, nous ne pouvons pas laisser nos navires circuler librement… Cela ne se produira jamais ».

Les menaces des dirigeants iraniens surviennent alors que les États-Unis renforçaient leur présence dans la région. Pour la première fois, des chasseurs F-35 de l’aviation américaine ont été déployés, à proximité, dans les Émirats arabes unis. Deux porte-avions de la marine américaine ont aussi traversé le golfe Persique (les porte-avions Abraham Lincoln et John Stennis).

Soulignons que le porte-avions français, Charles de Gaulle, se trouve également dans la région dans le cadre de manœuvres conjointes avec la marine américaine.

Michael Segall

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